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SUPERSTITION. IDÉE DES SUPERSTITIONS NON CULTUELLES


tout aussi vaines, mais bien plus observantes, du magicien, <lu guérisseur et du voyant, dont nous venons de parler.

<I. L’observance <les parlebonheur apparaît comme un résidu concentré de toutes les précédentes. Les noms de grigris, talismans, caractères, signa, anneaux magiques, etc., physica, élixir de longue vie qu’on donna jadis à nos modernes fétiches », montrent bien qu’on a toujours cru certains Objets doues de certaines

vertus curatives ou maléfiques. Ce qui les caractérise, ce n’est pas. comme précédemment une vertu spéciale, mise a la disposition de toute la communauté, mais bien au contraire une efficacité universelle réservée à l’utilisation de la personne qui a ce fétiche. A toutes les époques, sans doute, on a prêté aux objets magiques, par exemple, des vertus divinatoires, etc. ; et aux objets du culte des vertus curatives : les chrétiens ont porte sur eux les évangiles, des reliquaires ou des médailles à litre d’amulettes. Voir ci-dessus l’art. Amulei iis. t. i, col. 112 1..Mais la destination originelle de ces objets, on l’a oubliée, pour leur prêter une efficacité à toutes fins utiles, par une action directe émanée de ces objets.

Sur les origines de ces diverses observances, il faut se borner a renvoyer aux suggestions de la préhistoire et de l’ethnographie. Les plus naïves d’entre elles ne peinent concerner qu’une religion, à l’état magique. Sur les molaires d’animaux placées comme grigri dans les tombes moustériennes, voir A. liouyssonie, dans Christus, p. 56-57. Chez les peuples de culture inférieure, au contraire. les BantOUS n’ont pas de fétiches ; à peine portent-ils quelques amulettes très simples qui sont surtout des remèdes »..Mgr Le Roy, op. cit., p. 121. Lien plus, le négrito île Malaisie ne possède ni amulettes, ni pratiques magiques… Tout ceci semblera un conte de fée à ceux qui sont pétris de l’idée évolutionniste ». H. 1’. M. van Overbergh.

De même qu’il y a une superstition faite idole, il y a chez tous les primitifs une superstition faite homme, le sorcier, < celui qui sait, mganga, qui est à la fois voyant, devin, charmeur et médecin ». Mgr Le Roy, op. cil., p. SI.

Classification sommaire.

Une psychologie élémentaire

permet d’v voir plus clair, en constatant que, pour chacune de ces lins, il y a une double attitude possible, l’initiative ou l’attente pure et simple, deux méthodes : active et passive. « Les divinations se classi lient suivant leur méthode : les unes se contentent d’observer ce qui arrive spontanément, afin d’en tirer des lumières pour la connaissance des futurs libres ou contingents : c’est l’attitude paresseuse des anciens astrologues et augures ; les autres provoquent, recherchent, expérimentent, se procurent artificiellement les bases de leurs inductions prophétiques et se vantent d’imiter de près les investigations de la science moderne dans le domaine de l’inconnu : c’est la prétention de l’occultisme contemporain..1. Didiot, Vertu iir religion, p. 163. La précédente distinction n’avait

pas échappe a saint Thomas : Aut fier soliun consiilerationem dispositions alterius rei, nul dum facimus aliqaid ni nobis manifestetur occultum. ll a -ll æ, q. xcv, a. 3. Les deux attitudes sont également possibles dans les observances. Pour siprocurer la science par l’art notoire, on me1 en jeu certaines recettes, de même il

y a des procèdes actifs pour obtenir certains effets

corporels, alors que la bonne aventure se tire toute seule, de la simple observation des individus, de leur jour de naissance, etc…. attitude passive qui la rapproche de la divination astrologique. » S. Thomas, ibid., q. xci, a. I et 2. Les observances actives ressortisscnl a ce qu’on appelle maintenant la magie ou la une populaire ; et les anciens v voyaient des arts : arts magiques. /P/<L. a. 2. corp., ait notoire « ,

ibid., a. 1 ; ou d’un mot plus général, des « observances », mais non de vaines observances, car ce sont des pratiques laborieuses faites en vue d’un résultat positif. Ibid., q. xc.vi, introd. Par contraste, la simple attention accordée à de menus faits qui se passent autour de nous et sans nous, c’est ce que saint Augustin. De doctr. christ.. t. II, c. xx, et saint Thomas, ibid., a. 3, per tolum, appelaient « de vaines observations . et que nous dénommons vaincs observances » ; vaines assurément dans l’attention qu’on donne à certaines conjonctures, mais à peine sont-elles des observances, puisqu’on se borne à remarquer, a considérer les faits sans y intervenir. Il serait donc logique de classer en actives et passives aussi bien les superstitions divinatoires qui visent à la connaissance, que les observances et observations qui se rapportent à l’action.

Sans doute ce raffinement peut sembler bien théorique : car toutes ces superstitions, quelle que soit leur méthode, ont des visées et des conséquences pratiques. i Ces observations finissent par enserrer les hommes en de multiples liens », remarque saint Augustin, loc. cit. Sous ce rapport, elles méritent bien leur nom actuel de vaines observances. De toute façon, la magie prétend agir directement sur la conduite des hommes par ses maléfices ; et la vaine observance dirige indirectement celle-ci d’après la constatation de tel événement fortuit. On peut en dire autant des horoscopes les plus anodins : entendus inopinément, ils empoisonnent parlois toute une vie ! C’est dire quc, si l’on envisage tout le déroulement de ces superstitions, quelbs qu’en soient les méthodes, leur résultat final est toujours de diriger ou plutôt de dévoyer la conduite. Saint Thomas était donc assez proche du réel en ne faisant pas deux espèces à part de la divination active et de la divination passive, pas plus que de la vaine observance et de la magie. II"-II æ, q. xcv a. 3, ad l um.

Cependant, autre chose est de s’en remettre paresseusement à un vieux dicton déraisonnable sur les jours de malheur et autre chose d’évoquer les esprits ou même, comme le dit le Docteur angélique, « d’invoquer soi-même le démon : c’est beaucoup plus grave, et il y a là une specialis ratio peccandi. Ibid., a. 5, ad l um. Au contraire, ce que nous appelons la vaine observance se réduit à l’observation de certains signes introduits plutôt par la vanité humaine, aidée tout au plus par la malice des démons, qui s’efforcent d’impliquer l’esprit des gens en des vanités de ce genre. Ibid., a. 3. On a donc eu pleinement raison, dans l’ai t. Magie, t. ix, col. 151 1, de dépasser la pure spéculation et de distinguer la magie de la vaine observance. De même l’art. DIVINATION, t. iv, col. 1 1Il sq., a surtout étudié " la divination pratiquée sérieusement », laissant pour la présente étude tout ce résidu divinatoire qui consiste dans l’attention aux présages, aux dires des astrologues et des chiromanciennes. Cf. ll^-II" q. xcv, a. 3. Il ne nous reste donc à étudier que les multiples formes de la bêtise humaine sans prétentions en matière de religion. Pour le contenu plus sérieux de ces abus, nous renvoyons simplement aux articles Indiqués plus haut, ainsi qu’à l’art. SORCEL-LERIE, col. 23’. » I. et à l’art. ENCHANTEMENT, t. V. col. 1-6. On voit bien déjà que ces tentatives déraison

nabies ont quelque chose d’immoral, puisqu’elles vont contre la prudence ; mais en quoi peuvent elles bien aller contre la religion, au sens Ihéologiquc de ce mot, c’est a dire contre le vrai culte de Dieu’.' C’est à la théologie de le dire.

li" Signification religieuse des superstitions non-cultuelles. — C’est en la scrutant qu’on voit leur opposition à la religion.

1. Les anciens théologiens et les modernes à leur suite, ont Coutume, dans leur expose du culle supers lilicux de la créai lire, de parler successivement : de