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SUPERSTITION. L’ASTROLOGl E
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mêle ses interventions aux opérations de ceux qui s’appliquent aux calculs astraux, i Cf.1. Mennessier, La religion, t. ii, p. 473-474, édit. de la Somme dite de la Revue des jeunes. Nous avons vu que le

saint docteur n’avait peut être pas fait toutes ces distinctions, pourtant essentielles, et d’autres qui sont plus psychologiques touchant l’influence des astres sur l’organisme et le tempérament. Cf. II- 1 - II*. q. xcv, a. 5, ad 2um. Cet enseignement, indépendant, en somme du substratum philosophique et scientifique, est resté la doctrine catholique. Cajétan professe qu' « on peut admettre, sans erreur, ni péché, que les Influences célestes sont des causes susceptibles d’incliner les choses humaines, dans la mesure où elles sont en dépendance des corps, pourvu que l’on s’en tienne à des conjectures et même qu’on ne s’y attache pas trop ». Somma, à l’art. Asirorum observatio..Mais l’erreur des astrologues, c’est précisément qu’ils ne s’en tiennent pas aux conjectures I

e) De nos jours, l’astrologie à allure savante étale ses prétentions ; mais son instruction est encore à faire. Les astrologues vulgaires basent leur pronostic sur les données de leurs lointains prédécesseurs ; mais les faits actuels sont là pour prouver qu’ils ont dû, tout au moins, mal faire leurs calculs.

Certains hommes de science, mathématiciens, médecins, docteurs en droit canonique, répudiant l’astrologie millénaire et le nom d’astrologue, préconisent I’astrodynamique, la cosmobiologie, c’est-à-dire une astrologie scientifique. Elle prétend, par des calculs sur les astres, par des statistiques comparées avec le calcul des probabilités, établir, non seulement des interprétations sur le tempérament d’un individu, mais aussi des « directions », des descriptions, pour ainsi dire, chronologiques de toutes les phases de sa vie. Cf. un bon exposé dans Ami du clergé, 1937, p. 289298. Le nom de P. Choisnard, et ses livres : Preuves et bases de l’astrologie scientifique, Essai de psychologie astrale, etc., ont éveillé l’attention des théologiens. Comme l’auteur affirme que « les astres inclinent, mais ne nécessitent pas », il sauvegarde la liberté humaine ; que si le fait astral entraîne dans la conduite des hommes un déterminisme atténué, il y voit l’un des organismes délicats du gouvernement de la Providence. « Vos conclusions me paraissent fondées, lui écrivait J. Maritain. Sur la possibilité en droit d’une astrologie scientifique, je suis d’accord avec VOUS. Quant à la question de fait, l’expérience seule peut la résoudre. » Ainsi entendue, l’astrologie est peut-être une erreur ; ce n’est pas une superstition.

6. Observance vulgaire des temps.

On peut en esquisser une classification pratique, fondée sur le but et l’institution de ces dates fatidiques.

a) Une première catégorie, qu’on ne peut accuser de vaine observance, c’est celle qui rappelle les jours réputés les plus inlluents pour les semailles, les moissons, etc…. toutes choses qui dépendent en effet des influences atmosphériques. C'était le fruit d’une expérience séculaire, qu’on se gardait bien d’ailleurs de prendre trop à la lettre. Quant aux proverbes populaires qui, au Moyen-Age, nommaient saint Médard ou les « saints de glace », c'était, on le sait, la manière usuelle de désigner des dates du calendrier.

b) Mais, selon la vaine doctrine des hommes, d’autres s’imaginent qu’il y a des temps heureux et des temps malheureux. Enchiridion, Inc. cil. Ici les jours sont censés apporter, non pas le beau temps, mais la chance : cette observance tient a des considérations astrologiques sans exactitude scientifique. On les reconnaît, soit a la désignation précise dune heure, de l'âge de la lune, misesouvent en relation avec la naissance d’un individu, soit a la mention d’une prétendue loi de sympathie entre jours et jours. Jean Chrysos DICT. DE THÉOL. CA1HOL.

tome. Ilomil., XXXIII. De Noèl au 6 janvier — c’est àdire dans les douze premiers jours du calendrier du Moyen Age — « regardez le temps qu’il l’ait chaque jour, et vous saurez le temps qu’il fera pendant chacun des mois à venir ". Voir des variantes infinies de ce thème dans I..-P. Sauvé, Croyances et superstitions vosgiennes, dans Mélusine, t. ii, p. 277. La mention de la i messe de minuit » ou telle autre fête, ne doit pas donner le change sur l’origine astrologique de ces jours heureux : Noël et la Saint-Jean, c'étaient les solstices d’hiver et d'été. Autour de ces deux dates, faciles à observer, se sont rassemblées deux sortes d’usages ; des observances astrologiques, reconnaissables à l’indication minutieuse des heures, surtout à la Saint-Jean, où le soleil donnait aux plantes toute leur force, et d’autres usages, sans indication précise du moment, qui sont des observances d’origine civile et n’ont rien à voir, ni avec l’astrologie, ni avec la religion.

c) Enfin, il y a d’autres observances à dates fixes qui ont leur origine dans les religions païennes ou chrétiennes. Alors que l'Église avait une autorité divine pour attacher à telle fête le souvenir d’un mystère du Christ, les gens supeistitieux purent y ajouter, de leur chef, des sens différents, soit païens, et c’est du culte faux ; soit des rites chrétiens en contradiction avec la discipline officielle, et c’est du culte superflu ; soit enfin des pratiques profanes d’origine civile ou astrologique. Mais ces superstitions ne sont pas de l’institution de l'Église.

Déjà, du temps de saint Augustin, les manichéens faisaient grief à l'Église catholique de ses fêtes à dates fixes. Cont. Adim., c. xvi, P. L., t. xlii, col. 157. Pourtant l’intention de l'Église avait bien été de faire pièce aux souvenirs païens qui s’attachaient à ces dates astronomiques. La fixation de Noël au 25 décembre, date par excellence du culte mithriaque, en est un exemple remarquable. Mais ces souvenirs étaient abolis au viie siècle ; les prédicateurs eurent peut-être tort d’en remuer les cendres par leurs pieuses allégories. Quoi qu’il en soit des responsables, il est trop certain que presque toutes nos fêtes chrétiennes : Noël, la Purification, l’Annonciation, le mardi-gras, le vendredi saint, les fêtes de Pâques, de l’Ascension et de la Pentecôte, ont hérité d’observances, qui avaient peut-être à l’origine quelque rapport avec les lois d’abstinence et de continence que l'Église avait établies ces jours-là, mais qui n'étaient désormais que des observances superstitieuses des jours heureux ou malheureux. Cf. J.-B. Thiers, Traité des superstitions, t. I, p. 295-310. Beaucoup de ces jours de malheur ont aujourd’hui perdu de leur vogue, et le vendredi même est un jour de travail comme les autres. Seul le vendredi 13 du mois recueille encore son lot de bonheur.

7. Conclusion.

L’altitude de l'Église sur l’usage des forces naturelles dans la défense et la conduite de sa vie, est donc aussi nette que possible : on peut y recourir dès là qu’elles semblent avoir quelque vertu pour cela. Au contraire, tout ce qui est manifestement déraisonnable : user de signes envers des forces inconnues, ou abandonner son sort au hasard ou aux influences astrales est une imprudence et, d’une certaine façon, une vaine observance, fondée sur une

fausse opinion. « Ce n’est pas, à proprement parler, une superstition par excès de religion. C’est plutôt de la paresse, et un dédain des causes secondes » disposées par la Providence pour nous [aire atteindre notre lin. Cajétan, q. xcvii, a. 1, lin. La superstition ni se caractérise que lorsqu’on fait intervenir Dieu indûment dans la conduite de notre vie, ou… le démon. A l'Église il reste donc une tâche, qu’elle partage d’ailleurs avec les vrais philosophes : celle de fixer l’attitude sympathique des catholiques, i^ à vis clés choses

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