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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 15.1.djvu/161

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THÉODORET. ÉCRITS APOLOGÉTIQUES


Ouvrages apologétiques.

Théodoret a eu plusieurs

fois l’occasion de prendre la défense du christianisme contre les païens et les juifs. Il est le dernier des grands apologistes de l’antiquité.

1. Un ouvrage Ad quæsita magorum, Ilpôç xàç ne6aei.ç tcôv [lâyav, Epist., lxxxii, col. 1265 A, ou IIpôç toùç èv HspaLfti j^âyouç, Epist., cxiii, col. 1317 À n’est connu que par quelques allusions de l’auteur. Le ms. Coislin S, fol. 115 v°. contient un fragment assez important : 0£o8co(ptpt(ou) èx toû y’X6yoo toû xoexà Mx.viya.Liuv, inc. Toûto 6y.oi.ov to mb LTaùXou Xeyôjxevov, qui mériterait d’être examiné. Il était dirigé contre les mages persans à l’instigation desquels avait été déclenchée la longue et douloureuse persécution de Bahram I effet de Jazdegerd II ; il répondait à leurs griefs contre le christianisme et combattait l’adoration du feu. Cf. Hist. eccl., V, xxxviii ; Quæstiones in Levit., i. J. Schulte, Théodoret von Cyrus als Apologet, ein Beitrag zut Geschichte der Apologetik, Vienne, 1904, p. 2-6, place en 429-430 la composition de cet ouvrage et en voit l’occasion dans un appel que les chrétiens de Perse eux-mêmes auraient adressé à Théodoret. En toute hypothèse, l’évêque de Cyr avait bien des raisons pour s’intéresser aux mages et pour en dénoncer les doctrines. Cf. J. Bidez et J. Cumont, Les mages hellénisés, Paris, 1938.

2. Un ouvrage Contra judœos, IIpôç’IouSatouç, Epist., cxiii et cxv, ou Kaxà’IouSaîwv, Epist., cxvi, datant lui aussi des premières années de l’activité littéraire de Théodoret, est perdu, à l’exception peut-être d’un assez long fragment, conservé par un manuscrit de Florence, sous le titre de Quæstiones adversus judœos curnelegantissimissolutionibus, EpiùTr]CSEic, x.a.Tà’IouSaîcov xstx xapisoTaTcov Xucegjv. Ces quæstiones sont anonymes ; mais la langue et le style sont ceux de Théodoret et, ce qui est plus important, questions et solutions trouvent dans les œuvres authentiques de l’évêque de Cyr des parallèles très nombreux. L’auteur met en relief la valeur propédeutique de l’Ancien Testament qui prépare et symbolise la nouvelle alliance. Cf. J. Schulte, op. cit., p. 6-22. Le fragment de Florence n’est pas reproduit dans P. G. On le trouvera dans l’ouvrage cité de Schulte ou dans celui de A. -M. Bandini, Catalogus codicum manuscriptorum bibliothecæ Mediceœ-Laurentianæ, t. i, Florence, 1764, p. 110-112.

3. Une série de discours sur la providence divine, De providentia oralioncs deccm, Ilspî npovoiocç, X6yoi. Séxa, nous a été conservée. P. G., t. lxxxiii, col. 555-774. Le xe traite de l’incarnation ; la doctrine qui y est exposée ne permet guère de supposer qu’il ait pu être écrit avant le concile d’Éphèse, comme on le dit ordinairement. Ces discours se proposent de justifier la providence de Dieu contre les objections des païens et traitent, les cinq premiers des désordres apparents qui régnent dans le monde physique, les cinq derniers de ceux qui troublent la vie morale et sociale. Finalement l’auteur est amené à conclure que la plus grande preuve de la providence est fournie par l’incarnation du Fils de Dieu. En dépit de certains détails d’un goût ou d’une valeur discutable, l’ensemble est fort beau : Théodoret manifeste à la fois l’étendue de son érudition et la profondeur de son sens chrétien, pour traiter un sujet difficile et toujours nouveau malgré les apparences.

4. Grœcarum afjectionum curatio. — Le plus important des ouvrages apologétiques de Théodoret est celui qui porte le titre de Grœcarum afjectionum curatio seu evangelicæ veritatis ex gentilium philosophia cogniiio, ’EXXt)vi, xwv 6epa7tsuTt.XY] rox0Y)quxT<ov rj eùtxyyeXixriç àX7)6etaç èZ, èXXï)V(.xî)ç quXoaocpîaç èmyviùcst.ç, P. G., t. lxxxiii, col. 783-1152. On a dit maintes fois que cet ouvrage était la dernière mais

aussi la plus belle des apologies contre le paganisme et ce jugement est des plus mérités. Pourtant Théodoret était encore au début de sa carrière lorsqu’il l’écrivit, s’il est vrai qu’il le composa avant 431, comme le pense M. Richard, art. cit., sur de bons arguments. Les citations qu’en donne l’auteur lui-même, ou les allusions qu’il y fait, Epist., cxiii, cxvi ; Quæst. in Levit., i, ne fournissent aucune précision supplémentaire.

L’œuvre comprend douze livres : le premier traite de la foi et de sa nécessité comme fondement de la connaissance religieuse. Les suivants sont consacrés à l’existence et à la nature de Dieu, 1. II ; à la doctrinechrétienne sur les anges, par rapport à la doctrine païenne sur les dieux, 1. III ; à la matière et au monde visible, 1. IV ; à la nature de l’homme, qui est la plus parfaite des créatures terrestres, 1. V ; à la Providence qui veille sur toute la création, 1. VI ; au sacrifice, qui est l’expression la plus achevée de l’adoration, 1. VII ; au culte des saints et des martyrs, 1. VIII ; aux lois païennes comparées aux exigences de la morale chrétienne, 1. IX ; aux oracles païens et à leur origine, 1. X ; à la fin du monde et au jugement dernier, 1. XI ; enfin à la vie pratique des philosophes païens et des disciples du Christ, 1. XII. À première vue, on découvre mal l’idée générale qui préside à l’enchaînement des livres, et souvent des digressions viennent encore obscurcir le plan de l’ensemble. Cependant, Théodoret indique l’ordre qu’il se propose de suivre, lorsqu’il explique, au début du t. I, que la foi précède la science, et que la science conduit à l’action ; après un livre sur la foi, vient en effet un exposé de la doctrine chrétienne, 1. II-VI ; puis un exposé de la vie chrétienne, 1. VU-XL

Pour parler du paganisme, Théodoret cède habituellement la place à des écrivains païens. Selon les statistiques données par Schulte, il ne cite pas moins de cent cinq philosophes, poètes, historiens ou autres auteurs profanes ; trois cent quarante citations environ expriment le témoignage de ces écrivains : elles sont pour nous d’autant plus précieuses que, souvent, elles nous font connaître des œuvres aujourd’hui perdues. Sans doute, l’érudition de l’évêque de Cyr n’est pas habituellement de première main : elle doit beaucoup en particulier à deux apologies antérieures, la Démonstration évangélique d’Eusèbe de Césarée et les Stromates de Clément d’Alexandrie. Ce qui n’est pas emprunté à Eusèbe et à Clément provient, pour une bonne part, de florilèges païens, comme les Placita d’Aétius. En utilisant de pareils recueils, Théodoret se conforme à l’usage de son temps ; il va sans dire qu’il s’expose aussi à bien des erreurs, puisqu’il reproduit de confiance ce qu’il a trouvé dans ses sources, sans se soucier le moins du monde de recourir aux originaux.

Ces remarques n’enlèvent rien ni à la valeur de l’ouvrage, ni au mérite de l’auteur. Au ve siècle, le paganisme ne présentait évidemment pas pour l’Église chrétienne un danger aussi grand qu’au iie et l’apologétique était un genre littéraire bien défini, avec ses usages et ses règles. Lorsqu’on n’avait pas affaire à un adversaire nettement défini, à Porphyre ou à Julien par exemple, dont les ouvrages trouvaient encore de fervents lecteurs, on était plus ou moins obligé de suivre ces règles et l’on s’exposait à composer une œuvre assez artificielle et assez froide. Cependant il n’était pas inutile de reprendre, pour l’opposer aux doctrines païennes, la somme de la doctrine chrétienne : dans les milieux cultivés, le paganisme connaissait un renouveau ; on s’y intéressait soit pour faire opposition au gouvernement, soit pour chercher la satisfaction de certaines aspirations mystiques, soit pour maintenir les vieilles traditions. Théodoret ne lutte pas contre des fantômes lorsqu’il présente à ses