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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 15.2.djvu/1197

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    1. ZWINGLIANISME##


ZWINGLIANISME. ZWINGLI ET LE CATHOLICISME

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W. Kôhler, Zivingli und Strassburg, dans Elsass-Lothringisches Jahrbuch, t. xv, 1942, p. 145-180 ; voir aussi : O. E. Strasser, Die lelzten Anslrengungen der Strassburger Theologen Martin Bucer und Wolfgang Capito, eine Union zwischen den deutschen Lulheranern und den schweizerischen Reformierten herbeizufûhren, dans Zwingliana, t. vi, 1934, p. 5-15).

D’autre part, « si le luthéranisme de l’Allemagne du Sud est demeuré jusqu’à ce jour plus flexible et plus ouvert que celui de l’Allemagne du Nord, c’est pour une large part à l’influence du zwinglianisme qu’il le doit » (W. Kôhler, Die Wirkung und Bedeutung Zwinglis, ut supra, p. 79-80). Par sa liturgie, l’Église luthérienne de Wùrttemberg est apparentée au groupe zurichois de la Réforme (cf. K. Millier, Zut Geschichte der wùrtlembergischen Gottesdienstordnung, 1912, et H. Hermelink, Geschichte der Evangelischen Kirche in Wùrttemberg von der Reformation bis zur Gegenwart, Stuttgart und Tùbingen, 1949, p. 39, 74-75, 77). Ce n’est qu’en 1536, avec la concorde de Wittenberg, que le mouvement en avant de ce type liturgique sera arrêté. Quant aux institutions même de Zurich, notamment le tribunal matrimonial ( Ehegericht), elles ont pénétré, au delà de la Suisse, en nombre de villes d’Allemagne. L’influence idéologique de Zwingli s’étend jusqu’à la Saxe (cf. Beziehungen sâchsischer Theologen zur Kirche Zwinglis, dans Neues sâchsisches Kirchenblatt, 20 décembre 1931). Néanmoins, l’assimilation de Zwingli aux Tâufer a nui dans la suite au rayonnement de sa doctrine en pays luthérien (cf. W. Kôhler, art. cit., dans Zwingliana, t. iii, 1913, p. 25) ; de même qu’en Allemagne du Sud, le bucérianisme tendit à supplanter le zwinglianisme.

5° O. Odlozilik a découvert « un écho de la doctrine de Zwingli en Moravie » et l’existence d’une fraternité d’inspiration zwinglienne groupée autour du village de Habrovany (cf. Zwingliana, t. iv, 1925, p. 257 sq.). On y lisait les ouvrages de Zwingli, notamment la Fidei ratio, qui a fortement marqué la dogmatique de ces Frères. En Slovaquie, Zwingli eut des disciples qui furent l’objet des attaques de Luther dans ses lettres à Franz Revay et à la ville d’Eperies (Jân Kvacala, Dëjiny reformâcie na Slovensku 15171711, 1935, p. 47 et 48).

Partout on constate que le zwinglianisme s’est trouvé chez lui dans les pays qui accueillirent ensuite la doctrine de Calvin, et ceci même nous incline à penser que le lien qui unit les deux systèmes est plus étroit qu’on ne le représente d’ordinaire.

6° Comme l’a écrit W. Kôhler, « tout le problème Zwingli-Calvin-protestantisme réformé n’est pas résolu avec le mot ironique et dédaigneux de Calvin sur les « bons Zurichois »… Calvin a dû être fortement influencé par Zwingli et il ne faut pas enlever à ce dernier la place qui lui revient en tête du calvinisme… » (Huldreich Zwingli, 1923, p. 81 ; cf. K. Guggisberg, Das Zwinglibild des Protestantismus, ut supra, p. 37). Il est vrai — c’est un des résultats de la critique moderne de l’avoir montré — que Calvin n’a pu lire les ouvrages allemands de Zwingli, mais la « dogmatique » de celui-ci est écrite en latin et lui était accessible. En outre, des emprunts par voie indirecte sont probables, entendez : l’influence de Zwingli sur Calvin a passé en nombre de cas par Strasbourg et Bucer. Sur l’ensemble du problème, qui demande encore bien des recherches de détail : cf. C. B. Hundeshagen, Die Conflikte des Zwinglianismus, Luthertums und Calvinismus, 1843 ; A. Lang, Zwingli und Calvin, Bielefeld und Leipzig, 1913 (spécialement p. 79-91 : Von Zwingli zu Calvin) ; Fr. Blanke, Luther, Zwingli und Calvin, 1936 (25 p.) ; id., même titre, dans Die Furche, 1936, p. 421, et dans Sammelband : « Der Gott der Wahrheit », 1936, p. 263-275 ; Ernst Wollf, Luther, Zwingli, Calvin,

ibid., p. 233 sq. ; D. Bêla von Soôs, Zwingli und Calvin, dans Zwingliana, t. vi, 1936, p. 306 sq. ; O. E. Strasser, Der Consensus Tigurinus, dans Zwingliana, t. ix, 1949, p. 1-16 ; P. J. Millier, Die Gottestehre Zwinglis und Calvins. Eine vergleichende Studie, Sneek, J. Campen, 1883, 115 p.


X. Épilogue : Zwingli et le catholicisme.

1° En terminant cette enquête sur la pensée zwinglienne, conduite aussi objectivement que possible, un théologien catholique ne peut manquer de s’interroger sur la position de Zwingli à l’égard du catholicisme et sa propre attitude à l’égard du zwinglianisme. Sans doute, la rupture de Zwingli avec l’Église a eu de profondes répercussions sur son attitude doctrinale ; son système est monté pour une grande part en anticatholicisme. Avec son épuration de la religion, ce n’est pas seulement à la religion populaire ou à la superstition qu’il en a : il entend éliminer les derniers restes de catholicisme. Ce rejet se solde par une perte en universalité : le zwinglianisme se construit comme une doctrine aristocratique — - ici s’accuse la parenté avec Érasme et l’humanisme. Zwingli lui-même a fait ressortir que ses vues sur la Providence et la prédestination correspondaient à un état avancé et épuré de la foi, lequel ne peut être le fait que de quelques âmes mystiques ou d’un groupe d’initiés (cf. C. R., ix, 31, 5). Son tempérament religieux même le portait, nous l’avons dit, vers le peuple, et cependant, que d’atermoiements, de précautions, de ruses même il emploie, avant de passer aux réformes et de divulguer sa doctrine sur la prédestination ou l’eucharistie. Ce trait n’a pas été assez relevé par les historiens ou critiques protestants, aux yeux desquels le caractère ésotérique de ce système n’est pas apparu.

2° Cependant Zwingli, et c’est son mérite, a mis l’accent sur certaines valeurs religieuses, méconnues sans doute par une partie de l’Église de son temps, mais qui ont néanmoins leur place au sein du catholicisme. La grandeur infinie de Dieu et le néant de la créature laissée à ses seules forces, n’est-ce pas là l’article premier du Credo ? Quelle témérité il y aurait à soustraire au Créateur tant soit peu de l’honneur qui lui revient pour reporter sa considération vers la créature, placer en celle-ci, à un titre quelconque, son espérance 1 Ici encore, cependant, il y a lieu de distinguer : dans l’état où elles se présentent chez Zwingli, ces valeurs authentiques sont brouillées par des apports d’origine extra-chrétienne ou faussées par un courant scolastique décadent. Car, à la racine du dualisme zwinglien, il y a, outre Duns Scot, l’humanisme, l’antiquité : en d’autres termes, cette rupture totale entre le Créateur et la créature, dont a hérité la tradition réformée, n’est pas chrétienne : c’est la morale à tirer de cet article. Dans le dialogue avec les réformés, il n’y a donc pas, pour expliquer les divergences, à recourir, comme on le fait souvent, à une hétérogénéité de philosophie (rejet de Yanalogia entis par les réformés), mais simplement à souligner tout ce qu’il y a d’historique et de contingent dans cette tradition. Formée à la Renaissance, sous l’empire de préoccupations syncrétistes, elle a prétendu incorporer à la dogmatique chrétienne des éléments qui ne sont pas chrétiens, mais païens : Hinc dolor, hinc lacrgmse.

3° L’apologétique catholique a tourné ses regards de l’œuvre à l’homme pour relever ses misères. Par sa fameuse « lettre de confession », Zwingli lui-même lui donnait la partie belle. Répondre avec W. Kôhler et, récemment encore, J. Courvoisier (Zwingli, 1947, p. 41), que « les protestants n’ont pas ôté l’auréole qui nimbait la tête des saints pour la placer sur celle des réformateurs », ne suffit pas. Sans l’excuser, et en se plaçant du point de vue protestant, on dirait mieux que Zwingli avait par ailleurs assez de caractère pour