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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 15.2.djvu/136

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    1. TRINITÉ##


TRINITÉ. SYNTHÈSE THÉOLOGIQUE

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minieuse de Jésus. Elle fut surmontée par la foi à la résurrection, qui fut dès l’abord la foi à la vie immortelle du crucifié, bien plus qu’au fait initial qui est suggéré à notre esprit par le mot de résurrection… La seconde épreuve fut l’entrée de la foi nouvelle dans le monde païen… S’inspirant de l’esprit bien plus que de la lettre (de l’Évangile), Paul trouve à l’Évangile un rôle, et à la personne de Jésus une signification universelle… Une nouvelle épreuve de la foi se présentait : quel était le rapport du Christ sauveur avec le Dieu éternel et l’économie de l’univers ? La spéculation judéo-alexandrine avait identifié le Dieu des Juifs au Dieu des philosophes grecs. Philon identifia le Logos, suprême raison et idées éternelles, à la Sagesse de l’Ancien Testament qui assistait le Créateur dans toutes ses œuvres. Paul assigne hardiment cette place au Christ éternel, image du Dieu invisible, par qui et pour qui tout a été fait, etc. L’auteur de l’épître aux Hébreux complète l’idée de Paul. Pour lui aussi, le Fils est la splendeur de la gloire divine, mais, dans sa mission terrestre, il est le grand-prêtre qui s’est fait semblable aux hommes ses frères, accomplissant finalement par une seule immolation, qui était sa propre mort, l’expiation de tous les péchés… Mais la vie de Jésus n’a-t-elle que cette importance morale ? L’auteur du quatrième évangile y découvre la révélation même du Logos, du Verbe divin, etc. P. 120-127, passim.

Mais le dogme de la Trinité n’est encore qu’esquissé. Loisy se demande si "le Verbe et l’Esprit, qui sont de Dieu, sont des personnalités distinctes du Père créateur » ?

Ce problème, répond-il, était assez ardu : le sens chrétien finit par le trancher dans le sens de l’affirmative. Mais aussitôt se posa la question du rapport entre le Père et les autres personnes divines, surtout celle du Verbe-Christ. Le Verbe est de Dieu et personnellement distinct du Père ; est-il Dieu absolument et, s’il est le premier-né de la création, comme l’a dit saint Paul, ne serait-il que la première des créatures ? Arius dit oui. Athanase et le concile de Nicée répondent non. Le Verbe devait être consubstantiel au Père, etc. Ibid., p. 127.

On voit comment, sous la poussée d’expériences religieuses éprouvées par divers auteurs et, par contre coup, par l’Église enseignante elle-même, s’est constitué peu à peu le dogme d’un Dieu unique en trois personnes. Mais la solution trouvée n’est pas définitive :

Le problème qui a passionné durant des siècles les penseurs chrétiens, se pose maintenant de nouveau. C’est beaucoup moins parce que l’histoire en est mieux connue, que par suite du renouvellement intégral qui s’est produit et qui se continue dans la philosophie moderne… N’est-il pas vrai que la notion théologique de la personne est métaphysique et abstraite, tandis que cette notion est devenue, dans la philosophie contemporaine, réelle et psychologique ? Ce qu’on a dit d’après la définition de l’ancienne philosophie, n’a-t-il pas besoin d’être expliqué par rapport à la philosophie d’aujourd’hui ? Ibld., >. 128.

2. Cette conception du dogme entraîne le second point de vue auquel s’arrêtent les modernistes : la valeur exclusivement pragmatique du dogme : Un Dieu en trois personnes, déclare G. Tyrrel — Père, Fils, Esprit — est une formule qui serait contradictoire si elle avait une valeur métaphysique et non purement prophétique et symbolique ; cette formule a une valeur d’imagination, de dévotion, et pratique ; elle indique d’une manière obscure une vérité qui ne peut se définir et qui cependant exclut l’unitarianisme l’arianisme, le trithéisme, le sabellianisme et toute autre impertinence de curiosité métaphysique. Trough Scylla and Charybdis, p. 343. La question serait de savoir si la valeur pratique accordée au dogme trinitaire n’exclut pas aussi d’autres « impertinences de curiosité métaphysique », telles, par exemple, que les définitions du concile de Nicée ? Ainsi, d’après Tyrrel, qui complète bien ici la pensée de Loisy, les formules religieuses n’expriment que les diverses réactions produites dans la conduite religieuse des hommes par l’idée des réalités divines :

A saint Pierre, le Christ s’est présenté tout à coup sous l’idée de Messie, de Fils du Dieu vivant. À l’auteur du quatrième évangile, comme Logos éternel… Dans chacun de ces cas le même ébranlement d’expérience religieuse donne une réaction mentale différente… Le théologien observera que le Christ en toutes circonstances a été placé dans la plus haute catégorie de glorification dont chaque intelligence se trouvait meublée… C’est parce que les hommes ont senti et éprouvé que le Christ était leur Dieu, leur Sauveur, leur pain spirituel, leur vie, leur voie, leur vérité, qu’ils l’ont conçu sous toutes ces formes et ces images, dont les unes sont plus adaptées que les autres à satisfaire le besoin qu’éprouve l’âme d’exprimer sa plénitude. » Ibid., p. 289.

Mais ces conceptions elles-mêmes, « en tant que révélées, n’ont pas de valeur théologique directe ; elles ne sont qu’une partie de l’expérience dont elles aident à déterminer le caractère ». Ibid. Ainsi donc, les formules religieuses, la formule trinitaire comme les autres, ne peuvent traduire la réalité que « par ce que nous devons être à l’égard de cette réalité ». Nous devons considérer en Dieu un Père, en Jésus-Christ un Fils de Dieu, dans le Saint-Esprit, l’esprit divin envoyé aux hommes pour leur sanctification. Mais nous ne sommes aucunement assurés que cette attitude prise par nous garantisse la vérité ontologique du mystère d’un Dieu à la fois un et trine.

Condamnations de l’Église. —

Ce sont des condamnations générales, formulées soit dans le décret Lamentabili dans les propositions condamnées et rapportées plus haut, soit surtout dans l’encyclique Pascendi. Résumant la doctrine de l’évolutionnisme doctrinal purement humain qui est à la base du système moderniste, Pie X conclut : « Ainsi la doctrine des modernistes, comme l’objet de leurs efforts, c’est qu’il n’y a rien de stable, rien d’immuable dans l’Église. » Et le pape indique que les modernistes ont eu des précurseurs, dont il suffit de rappeler les condamnations. « Dans l’encyclique Qui pluribus, Pic IX écrivait : « Ces ennemis de la révélation divine exaltent le progrès humain et prétendent, avec une témérité et une audace vraiment sacrilèges, l’introduire dans la religion catholique, comme si cette religion n’était pas « l’œuvre de Dieu, mais l’œuvre des hommes, une « invention philosophique quelconque, susceptible « de perfectionnements humains. » Denz.-Bannw., n. 1636. Sur la révélation et le dogme en particulier, la doctrine des modernistes n’offre rien de nouveau : nous la trouvons condamnée dans le Syllabus de Pie IX, où elle est énoncée en ces termes : « La révélation divine est imparfaite, sujette par conséquent à un progrès continu et indéfini, en rapport avec le progrès de la raison humaine. » Prop. 5, ibid., n. 1705. Plus solennellement encore, dans le concile du Vatican : « La doctrine de foi que Dieu a révélée n’a pas été proposée aux intelligences comme une invention philosophique qu’elles eussent à perfectionner, mais elle a été confiée comme un dépôt divin à l’Épouse de Jésus-Christ pour être par elle fidèlement gardée et infailliblement interprétée. C’est pourquoi aussi le sens des dogmes doit être retenu tel que notre Sainte Mère l’Église l’a une fois défini, et il ne faut jamais s’écarter de ce sens, sous le prétexte et le nom d’une plus profonde intelligence > C.onst. Dei Filins, c. iv, ibid., n. 1800. Et Pie X rappelle en terminant que c’est là le principe même du vrai développement du dogme, selon la formule de Vincent de Lér/bV par laquelle le concile lui-même conclut sn déclaration.


IV. Synthèse théologiue : de la renaissance a nos jours. —

Après l’étude et l’exposé Am doctrines hétérodoxes, il faut reprendre, en guise de synthèse théologique, l’exposé des doctrines profes