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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 15.2.djvu/158

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1845

    1. TRINITÉ##


TRINITÉ. HABITATION DANS LES AMES

1846

XXVI, a. 1, q. ii, ad 1<"" ; Chr. Pesch, n. 668. C’est en ce sens que les posttridentins ont continué à professer la doctrine de la présence substantielle des personnes. Il faudrait donc interpréter en bonne part Ripalda et Viva, ou déclarer leur opinion entachée d’erreur. Quant à Vasquez, Ruiz et Alarcon, l’interprétation en bonne part s’impose, quel que soit le jugement de fait à porter sur leur manière de s’exprimer. En réalité, Vasquez reconnaît implicitement que ce mode spécial de présence divine dans l’âme ne peut soulever aucune controverse entre théologiens ; il nie seulement qu’on puisse le considérer comme étant d’ordre substantiel. Loc. cit., et In / iiii, q. xliii, a. 3. Simple question de vocabulaire, peut-être.

Il reste à déterminer quelle est la nature spéciale de cette relation de l’âme juste à ce terme qu’est ! a présence des personnes divines en elle. Question obscure, que n’éclaircissent pas beaucoup les termes dont on se sert pour la désigner. On ne saurait dire que c’est une relation purement morale, puisant sa source dans les actes par lesquels elle nous oriente vers Dieu : l’habitation divine est tout au moins de nature antérieure à notre activité surnaturelle. Ce n’est pas non plus seulement l’action dynamique de la divinité en nous ; car cette influence sur notre vie surnaturelle est postérieure à l’habitation des personnes et dépend en partie d’elle. Cf. S. Thomas, In J<"° Sent., dist. XIV, q. ii, a. 1, sol. 2. Ce n’est pas non plus une « union substantielle », comme Oviedo le faisait dire à Lessius. Cette expression, mise en honneur par Petau et accueillie favorablement par divers auteurs, est équivoque et a besoin d’explication. Sous la plume de ces auteurs « elle ne vise qu’à accentuer la présence substantielle des personnes divines ; elle s’oppose à l’idée d’une sanctification ne comportant que la présence en nous de la grâce sanctifiante, du don créé. Galtier, L’habitation. .., p. 214. Il ne peut donc être question que d’une union accidentelle de notre âme à la divinité, substantiellement habitant en elle ; c’est-à-dire présente non seulement par son opération, mais par sa substance même, selon un mode spécial qu’il s’agit maintenant de déterminer.

1. Première solution : habitation substantielle par voie de connaissance et d’amour. —

a) Exposé. —

Dans la q. xliii, a. 3, saint Thomas dit expressément que c’est « en le connaissant et en l’aimant que la créature raisonnable atteint Dieu lui-même par son opération et, selon ce mode spécial, Dieu est dit non seulement exister dans la créature raisonnable, mais y habiter comme en son temple ». Aussi n’est-il pas étonnant que de nombreux commentateurs aient enseigné que la présence divine se réalise dans l’âme en raison des actes de connaissance et d’amour surnaturels qui mettent en contact l’âme et Dieu, tout au moins d’une manière « inchoative » sur la terre, en attendant la réalisation parfaite de l’union dans la possession bienheureuse : « De par sa justification, dit en substance Suari’Z, l’âme entre avec Dieu dans les relations de la plus intime et de la plus étroite amitié. Or, l’amitié ne produit pas seulement la conformité des affections ; autant qu’il lui est possible, elle tend à rapprocher et à faire rejoindre les amis. Où donc le ferait-elle plus efficacement qu’entre Dieu et l’âme ? Des deux amis, ici, celui qui aime le plus et à qui appartient toute l’Initiative de l’amour, est aussi celui à qui tout est Il. Rien donc ne saurait faire obstacle au mouvement qui le porte à se rendre présent et à se donner. Contester que l’on jouisse de sa présence par le fait même que l’on jouit de >on amitié serait supposer que sa toute puissance, au lieu de se mettre au service de son amour au contraire pour en arrêter ou en briser l’élan. Ce résumé, cf. Galtier, op. cit., p, 160, montre dans qui Ile mesure on peut parler de pré « substantielle » de la Trinité dans l’âme juste en relation avec les actes surnaturels par lesquels cette âme tend vers Dieu. L’explication est devenue classique. Le P. Terrien l’a développée longuement, op. cit., t. i, t. IV, c. v : l’union par les actes de l’âme. Le P. Froget s’est appliqué à montrer mieux encore comment la présence divine s’établit dans l’état de gloire et comment, par voie de conséquence, elle doit s’établir sur terre dans l’état de grâce par la même voie de la connaissance et de l’amour :

t La grâce n’est-elle pas une inchoation en nous de la gloire future ? En conséquence, nous possédons déjà en germe et d’une façon initiale ce qui constituera un jour notre béatitude. Et, puisque la béatitude formelle consiste dans l’acte par lequel la créature raisonnable prend possession du souverain bien et jouit de lui, il faut que, dès cette vie, le juste atteigne, lui aussi, par son opération, la substance divine, qu’il entre en contact avec elle par la connaissance et l’amour et commence à jouir de Dieu. C’est ce qui a lieu effectivement par la connaissance expérimentale et savoureuse, qui est le fruit du don de sagesse, et surtout par l’amour de charité : connaissance et amour qui supposent, non pas la vue, non pas la pleine possession et l’entière jouissance, mais la présence réelle et sentie de l’objet connu et aimé. » B. Froget, De l’habitation du Saint-Esprit dans les âmes justes, p. 157.

b) Difficultés. —

La grande difficulté qu’on oppose à cette solution est de savoir s’il est légitime de passer de la communication certaine de Dieu à l’âme glorifiée dans l’état de béatitude à une communication analogue à l’âme qui est encore dans l’état de voie. On peut admettre sans peine que l’amitié consommée du ciel établit entre Dieu et les élus l’union et la présence substantielle, sans pour autant être obligé d’étendre le fait de cette union et de cette présence aux prémices de cette amitié sur la terre. Les analogies qu’on invoque, de l’état de gloire à l’état de grâce, ne suffisent pas à le prouver. Parler d’ « inchoation », de « germe », d’ « ébauche » n’apporte pas une raison convaincante ; il faudrait prouver que la grâce est un commencement de la vision, de l’appréhension, de la possession divine. Et comment le faire, puisqu’ici-bas nous n’avons pas la « lumière de gloire » nécessaire à la vision béatiflque’?

Une difficulté d’ordre particulier, mais d’une importance qui n’échappera à personne, est celle de l’habitation des personnes de la Trinité dans l’âme des enfants, encore incapables de faire un acte de connaissance ou d’amour. Rien ne sert de dire, avec le P. Froget, que l’union de l’âme à la divinité est ici purement habituelle. Si l’union dépend de la connaissance et de l’amour, on conçoit qu’elle soit habituelle en celui qui a déjà pu faire de tels actes ; il s’agit alors d’habitus acquis et persistants. Mais, avant l’usage de la raison, de tels habitus sont inconcevables. D’ailleurs, en formulant la doctrine de la présence divine en raison de nos actes de connaissance et d’amour, n’a-t-on pas fait une confusion « entre le fait de manifester, de rendre connaissable ou de rendre la connaissance possible, et le fait même de la perception ou de la connaissance actuelle à en résulter ? » Galtier, op. cit., p. 190. C’est cette simple possibilité que saint Thomas appelle la « connaissance habituelle » et c’est seulement en ce sens que l’union de la divinité et de l’âme existe chez les enfants sans raison : « Pour qu’il y ait mission, il n’est pas besoin qu’il y ait connaissance actuelle de la personne elle-même, il suffit d’une connaissance habituelle, qui consiste en ce que h don conféré à l’âme, i dire la vertu, représente et à titre de ressemblance, la propriété de la personne divine ; et tel’t le si us où l’on dit qu’être envoyé c’est être connu : être connu comme procédant, par formi de repré.i ntation. Ain.i dit-on d’une chose qu’elle se manifeste ou te tait connaître : elle le fait en se représentant dans ce qui