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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 15.2.djvu/271

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UNIGENITUS (BULLE). L’ASSEMBLÉE JUGÉE A ROME

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Dorsanne, Journal, 2 vol., Home, 1753, t. i ; Lafitau, Histoire de la Constitution l’niqenitus, 2 vol., Avignon, p. 138-154 ; Procès-verbaux des assemblées du Clergé, t. vi ; Le Roy, La France et Rome de 1700 à l, l~>, Paris, 1892, p. 458-549 (très partial en faveur du jansénisme) ; dom Vincent Thuillier, Histoire de la Constitution, publiée par Ingold, p. 190-285 (l’édition du P. Ingold est une réponse à l’écrit de Le Roy) ; Mémoires et Lettres du P. Timothée de La Flèche sur les affaires ecclésiastiques de son temps (1703-1730), publiés par le P. Ubald d’Alençon, Paris, 1907, p. 79-91 ; Fragment inédit des mémoires du chancelier Daguesseau, Paris, 1920 ; Extrait du Bulletin philologique et historique de 1918 (éd. Gazier).

Mss. : Archives nationales, G’673 et L. 438 ; Hibl. Nat., mss. fr. n. 694’J et 17 74$ ; Aff. Étrang., Corr. Home, t. dxxx et DXXXV.

3e L’assemblée des évêques jugée par Rome. — La division des prélats au sein de l’assemblée, les discussions, les démarches, les difficultés, la longueur des séances surprirent la Cour de Rome. Pour calmer le pape, Rohan crut nécessaire d’envoyer à Rome un courrier extraordinaire, afin de prévenir et d’arrêter des décisions fâcheuses. Le P. Timothée, capucin, fut choisi, après quelques hésitations du roi. Les historiens jansénistes se sont parfois moqués de ce courrier singulier, quelque peu vaniteux, qui a raconté lui-même son voyage pittoresque en termes piquants. Il partit de Paris le 30 janvier 1714 et arriva à Rome le 15 février. Il demanda aussitôt audience au pape, qui le reçut le lendemain. Le même jour, il visita le P. Daubenton, jésuite, et le cardinal de La Trémoille, ambassadeur officiel. Celui-ci, dans ses lettres à Torcy, plaisante ce courrier barbu qu’il regarde un peu comme un espion et un surveillant.

Le P. Timothée fut reçu par le pape « de la façon la plus obligeante » ; il écouta l’éloge des prélats catholiques, soumis à la bulle, bien qu’ils se fussent montrés trop bienveillants pour Noailles et ses amis. Le pape se plaignit en particulier de l’archevêque de Tours, M. d’Hervaux, avec lequel il était fort lié à l’époque où d’Hervaux était auditeur de rote. Dans ses lettres le P. Timothée raconte en détail et avec complaisance le résultat de ses démarches ; il exagère l’influence qu’il exerça sur le pape ; mais cependant, dans sa correspondance avec Torcy, l’ambassadeur officiel, La Trémoille, se montre blessé des visites du capucin. Par ailleurs le cardinal de La Trémoille renseignait aussi Clément XL Le 5 février, il reçut le projet d’acceptation de l’assemblée du clergé et le communiqua au pape, dès le 6 février. Celui-ci lut et relut le projet et en parut assez satisfait, mais l’opposition de Noailles et de ses amis l’émut fort et l’ambassadeur eut peine à soutenir que ce n’était pas une opposition, mais seulement un délai dans l’acceptation : ces prélats voulaient connaître l’Instruction pastorale, avant d’accepter la constitution. Cela, Noailles l’avait écrit à l’ambassadeur, le 29 janvier.

Le 18 février, Louis XIV envoya un courrier spécial qui portait la lettre des évêques au pape et un mémoire pour accompagner cette lettre. Le 27 février, La Trémoille reçut ce courrier, avec une dépêche du roi, une lettre de Rohan, un extrait du procès-verbal des séances et l’instruction pastorale adressée par le nonce au cardinal Paulucci. Tous ces documents font connaître l’état des esprits.

Dans sa dépêche, le roi demande au pape de l’aider à finir l’ouvrage et de contribuer, par sa douceur, à ramener les prélats qui se sont écartés de la majorité ; l’ambassadeur devra remettre à Sa Sainteté la lettre des évêques et suivre les indications données par Rohan. La lettre du cardinal de Rohan rappelle « la différente situation des esprits : quarante et un évêques ont accepté la Constitution et les absents n’ont pas encore parlé ; huit prélats attendent les explica tions de Sa Sainteté. Pour arriver à l’unanimité, étant donné les préventions du public pour le livre de Quesnel, la majorité des évêques a jugé nécessaire de dresser une Instruction pastorale pour instruire les fidèles. Cette instruction suit l’acceptation de la bulle et elle n’a été faite que pour ramener les huit prélats, pour ne pas alarmer les magistrats et leur ôter tout prétexte de s’opposer à l’enregistrement des lettres patentes. Cette instruction doit amener les peuples à l’obéissance ; elle répond dignement aux objections des hérétiques ; elle doit détruire les efforts extraordinaires qu’on a faits pour diminuer l’autorité du successeur de Pierre, pour rendre ses décisions odieuses et pour calomnier les évêques de France, en appelant leur union avec le pape un esclavage et une soumission aveugle aux volontés de la Cour de Rome ». Pour faciliter l’unanimité, il serait souhaitable que le pape envoyât un bref pour approuver la conduite de l’assemblée, louer les évêques de France de leur union au Saint-Siège, et blâmer fraternellement la conduite des huit prélats. Ce bref devrait paraître le plus tôt possible, car les évêques absents se joindraient à la majorité et ne seraient pas tentés de suivre le cardinal de Noailles. Sinon on dira que Rome désapprouve l’assemblée. Si Sa Sainteté veut écrire à Noailles, il faut que, dans sa lettre, « il n’y ait rien qui puisse blesser les usages de France et que Sa Sainteté lui marque de suivre l’assemblée et que c’est le seul moyen de réparer ce qu’il aurait pu faire de désagréable à Sa Sainteté ». Le mémoire qui est joint à cette lettre est un précis de tout ce qui s’est fait depuis le 23 janvier.

Dans l’audience qu’il eut le 28 février, La Trémoille remit au pape les lettres patentes enregistrées au Parlement, l’extrait du procès-verbal de l’assemblée et la lettre des évêques. L’instruction envoyée par le nonce à Paulucci n’arriva que plus tard. Le pape fit d’abord quelques remarques, en particulier sur le discours du procureur général et sur les réserves stipulées dans l’enregistrement et il demanda du temps pour répondre aux évêques, après avoir examiné leur lettre et l’instruction pastorale.

La minute du bref fut communiquée à La Trémoille par le P. Daubenton, le 14 mars ; le 16 mars, il fut appelé par le pape. Celui-ci se plaignit des expressions employées par le procureur général dans les lettres patentes et l’acte d’acceptation, mais surtout de la conduite de quelques-uns des évêques qui avaient suivi le cardinal de Rohan. En effet, une lettre datée du 5 février et envoyée de France fut communiquée au pape par le comte Fédé. D’après cette lettre, les commissaires de l’assemblée étaient persuadés que la constitution ne pouvait être publiée sans des explications qui en préciseraient le sens. L’instruction pastorale n’avait été proposée que pour indiquer le sens dans lequel les évêques condamnaient, avec le pape, les cent une propositions : quarante évêques avaient décidé de donner eux-mêmes ces explications et neuf autres avaient préféré demander ces explications au pape. Ainsi l’acceptation est relative aux explications qui sont insérées dans l’instruction pastorale, « mais cela a été fait de manière que le pape ne s’en aperçoive pas. Ils veulent que l’acceptation et l’instruction ne fassent qu’un même corps, qu’elles soient sous la même signature, que l’une ne puisse jamais être séparée de l’autre… ; ils veulent que la constitution ne soit jamais lue sans l’instruction, afin que cette instruction serve de contre-poison à la constitution. L’auteur de cette lettre ajoutait que les quarante évêques publiaient partout que leur acceptation était relative aux explications et qu’ils avaient ainsi jugé avec le pape. La conduite des opposants avait été plus franche. L’auteur affirmait, en termi-