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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 15.2.djvu/352

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UNIVERSITÉS. ORGANISATION


nouit en multiples fondations. À vrai dire, le développement se fit selon le modèle des deux prototypes de Paris et de Bologne. La première, qui dirigeait la pensée spéculative du Moyen Age et donna naissance à la science théologique, était plutôt une corporation de maîtres. Bologne, qui formulait la pensée juridique du monde à cette époque, était plutôt une université d’étudiants. Les fondations du XIIIe siècle, surtout dans le nord de l’Europe, imitèrent de préférence la constitution parisienne.

L’organisation intérieure.

Elle ne fut pas uniforme,

mais conditionnée le plus souvent par les circonstances extérieures de temps et de lieu, dans lesquelles naquirent et se développèrent les diverses fondations.

1. Les facultés.

Les maîtres chargés de l’enseignement des diverses sciences, ou les étudiants appliqués aux diverses disciplines, se groupaient tout naturellement entre eux et s’assemblaient de temps en temps à part, pour régler de concert tout ce qui touchait à leurs intérêts respectifs. Ce fut l’origine des « facultés », sorte de corporations en miniature, au sein de la grande corporation. Originairement le terme paraît désigner surtout l’ordre des études, l’objet particulier de l’enseignement. Dès le milieu du xiiie siècle, il s’applique à la réunion ou corporation des maîtres et étudiants adonnés à une discipline.

A prendre pour type l’université de Paris, la plus célèbre de toutes, quatre facultés la composaient. D’abord la théologie, sacra theologiee facilitas, la vraie gloire de la capitale ; puis la faculté des arts, c’est-à-dire des lettres, urtes libérales, la plus nombreuse et la plus importante, prseclara artium facilitas, celle dont les grades ouvraient l’accès des autres. Venait ensuite la faculté de droit ou de décret, constanlissima juris canonici facilitas, et enfin celle de médecine, dite saluberrima. A vrai dire, les études de droit étaient cultivées à Paris, dès l’année 1160. Cependant l’enseignement du droit civil fut retiré à l’université en 1218, par le pape Honorius III, et cette interdiction demeura jusqu’à l’édit de Louis XIV en K171). Par ailleurs, on érigea des facultés de droit dans presque toutes les universités. En France spécialement, la vitalité des studia de province dépendait en grande partie de renseignement du droit. Cf. Marcel Fournier, Les statuts et privilèges des universités françaises, t. i. Introduction. La médecine elle-même se retrouve tôt ou tard, dans toutes les universités du xiii c siècle.

Cependant, dés cette époque, on note une tendance à la spécialisation des divers studia, Montpellier demeure l’école principale de la médecine ; Bologne et Orléans sont célèbres par le droit, tandis que Paris brille principalement par la théologie, puis bientôt par la philosophie, qui eut sa faculté distincte (issue de

celle des arts), vers le milieu du XIIIe siècle. La théologie demeure d’ailleurs une science réservée, une sorte de monopole « le certaines universités. Outre Paris, on l’enseignait à Toulouse, Oxford et Salamanque. Les jeunes fondations ne lui font pas immé dlatement une place ; ce n’est qu’à partir du xiv siècle qu’elle s’int induit un peu partout. Cf. St. d’Irsay, Hisl. des universités, t. i, p. 160-171.

2. Les nations. - Les étudiants de la faculté des arts prirent de bonne heure, eu égard a leur nombre, l’habitude de se rassembler en groupements par régions ou pays d’origine, appelés nations., subdivi-I Iles -mêmes en proinces. Il y axait la nation de

France, honoranda Gallorum natio, avec ses cinq tribus ou provinces : Paris. Sens. Reims, Tours, Bourges ; à cette dernière avait été rattachée fictivement l’Italie, la Savoie, l’Espagne, le Portugal et tout l’Orient. La

nation de Picardie, surnommée fldelissima, comptait

également cinq provinces : Beauvais, .Amiens, Noyon,

Laon et Térouanne. Il y avait encore la nation normande, vencranda, et enfin celle d’Angleterre, qui fut, au xve siècle, absorbée et remplacée par celle d’Allemagne, constanlissima. Cette dernière compta deux provinces ou tribus : les « continentaux » (Allemands, Hollandais et Danois) et les « insulaires » (Anglais et Écossais).

Chaque nation avait à sa tête un procureur élu, chargé de défendre les intérêts du groupe et de concourir à la nomination du recteur. Toutes les universités, même celles de province, furent, au xiiie siècle, plus ou moins internationales. Mais ces confréries de compatriotes ne relevaient d’aucune puissance politique ; c’étaient simplement des groupements assez llottants d’étudiants, heureux de parler leur langue à l’étranger et de célébrer joyeusement leurs fêtes nationales. Ce n’est pas que ces clercs ne fussent parfois turbulents au point de troubler l’ordre public. Le soin de rétablir la tranquillité incombait alors aux seuls chefs de la corporation, procureurs et recteurs.

3. Les maîtres.

À la tête de chacune des facultés se trouve un doyen. On le signale, à partir de 12(17, comme préposé aux destinées des facultés de théologie, décret et médecine ; mais l’usage est plus ancien. Quant au corps enseignant, il est formé par les professeurs titulaires, portant les titres de magister, doctor, regens, professor ; sans parler d’autres personnages analogues aux maîtres de conférences de nos universités modernes ; on les appelait « extraordinaires » à Bologne et, plus tard, dans les universités d’Italie et d’Europe centrale.

A l’origine, il semblait que seule la licence séparât l’étudiant du maître. Plus tard, on devint plus exigeant, surtout dans les facultés supérieures de théologie et de droit. Le nombre des maîtres effectivement admis à enseigner fut limité, et leur nomination réservée soit aux facultés seules, soit aux facultés munies de l’agrément de l’évêque ou du chapitre (ou même du conseil municipal, comme à Lérida, en Aragon), soit enfin aux maîtres et étudiants comme à Bologne.

A la tête de l’université était le recteur, amplissimus dominus rcclor, élu primitivement tous les mois, et, à partir de 127N, tous les trois mois. Il était toujours choisi parmi les maîtres ès-arts ou « nrlicns i (nous dirions aujourd’hui les professeurs de lettres et de sciences). Son élection était réservée aux procureurs des quatre nations. S’ils ne parvenaient pas à s’entendre, on faisait appel à la médiation du recteur en exercice ; et, en cas d’échec, les nations nommaient quatre électeurs que l’on enfermait comme en conclave, leur interdisant toute communication avec l’extérieur et leur supprimant toute nourriture tant

que l’accord n’était pas fait (ou encore tant que n’était pas consumée une bougie d’un certain poids) !

A partir du xiv siècle, le candidat au rectoral de vait avoir été agréé par le roi ; et cette haute dignité valait au titulaire des privilèges réels et honorifiques considérables. Cf. Marion, Dut. des institutions de lu France, p. 545. Cependant le pouvoir effectif des rec teurs était très variable. A Bologne, par exemple, la prédominance de l’élément étudiant faisait d’eux les rais chefs de l’université, tandis qu’à Paris, leurs pouvoirs étaient, à l’origine du moins, plus honorifiques que réels.

Au dessous du recteur, fleurit bientôt une série d’officiers, parmi lesquels émergea le procureur général ou syndic, nomme pour un an par le recteur et les quatre nations pour suivre les affaires de l’université. Il y avait aussi un greffier, un questeur ou receveur, sans parler du questeur particulier, du censeur, prieur et prévôt, que possédait en propre chacune des ii ; i lions des arts.

Si le vrai chef île l’université lut bientôt le recteur,