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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 15.2.djvu/379

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URBAIN III — URBAIN IV


quait d’être torturé jusqu’à en mourir ». Vainement le pape chercha-t-il à intéresser à sa querelle l’ëpiscopat germanique. Réuni à Gelnhausen (novembre 1186), celui-ci adressa au pape des remontrances sévères, le rendant responsable de la rupture par son attitude dans l’affaire de Crémone et par le sacre de Folmar. Voir le récit de cette réunion dans les Annales, rapportées par Watterich, op. cit., t. n. Le texte de la lettre des évêques dans Mon. Germ. hist., Constitutiones et Acta, t. i, p. 444-446. Seul l’archevêque de Cologne, Philippe de Heinsberg, entra un peu avant dans la querelle du pape ; duc de Westphalie depuis 1 1 80, il essaya de se mettre en révolte contre l’empereur. Mais ceci ne tarda pas à faire long feu. Avec le temps la querelle entre le pape et l’empereur se serait peut-être envenimée. En fait il n’y eut pas d’éclat. La bulle publiée dans Harzheim, Concilia Germanise, t. iii, p. 436, où il est question d’une croisade à prêcher contre Frédéric, doit être attribuée non à Urbain III, comme l’avait pensé le premier éditeur, mais à Innocent IV ; elle vise Frédéric II et non point Barberousse. Comparer Jafïé, Regesta, n. 15 720 et Potthast, Regesta, n. 12 456 ; Watterich, op. cit., p. 682, n. 2. Selon Arnold de Lubeck, dans Watterich, op. cit., p. 681, le pape était bien décidé à excommunier l’empereur. Redoutant la colère de celui-ci les Véronais supplièrent le pape de ne pas fulminer la sentence de leur ville. C’est la raison qui amena Urbain à quitter Vérone pour gagner le territoire vénitien qui échappait à la juridiction impériale.

Les rapports d’Urbain III avec les autres souverains furent généralement pacifiques. Ils étaient cordiaux avec le roi de France, Philippe-Auguste ; voir Jafïé, n. 15 864, 15 901. Dans une lettre — dont l’authenticité n’est pas au-dessus de tout soupçon — et qui serait de 1187, Urbain fait confidence au roi des persécutions que subit l’Église romaine, regrette les hostilités perpétuelles qui arment les uns contre les autres les souverains chrétiens, France et Angleterre, royaumes d’Espagne, alors que tous devraient s’unir contre les infidèles et courir au secours de la Terre sainte, de plus en plus menacée. Jaffé, n. 15 924. Entre les Génois et le roi de Jérusalem en contestation pour diverses possessions territoriales dans la ville sainte ou dans les places de la côte, Urbain essaya de s’interposer. Jaffé, n. 15 549, 15 553, etc.

Plus que de son activité diplomatique, son registre, qui est relativement considérable (plus de 500 pièces) témoigne de son activité dans le domaine ecclésiastique. La centralisation qui va sans cesse croissant fait dès lors refluer à la Curie une quantité de questions contentieuses et administratives auxquelles celleci donne elle-même une réponse ; de plus en plus encore chapitres, monastères, églises éprouvent le besoin de se mettre sous la protection immédiate de l’Église romaine, laquelle assume à leur égard le rôle de tutrice. Et pourtant le Saint-Siège possède à l’extérieur des légats permanents qui ne sont autres que les titulaires des grands sièges. Signalons au moins le rôle attribué à Pierre, archevêque de Spalato dans le royaume de Hongrie, Jaffé, n. 15 480, à l’évêque de Cracovie pour la Pologne, n. 15 528, à l’évêque de Glasgow, pour l’Ecosse, n. 15 643, 15 645, 15 654, etc., à l’archevêque de Lund pour la Suède. N. 15 717, etc. En France, l’archevêque de Bourges est constitué, dans sa province, légat du Saint-Siège. N. 15 834, etc. Dans un ordre d’idées analogue, les Églises d’Espagne sont groupées autour de l’archevêque de Tolède, véritable primat. N. 15 839 ; cꝟ. 15 967. C’est peut-être l’archevêque de Cantorbéry qui reçoit les pouvoirs les plus étendus. N. 15 673 ; cꝟ. 15 656. À vrai dire, le Saint-Siège n’eut pas toujours à se féliciter de ses rapports avec ce dernier. D’âpres conflits mirent le prélat aux prises

avec les moines qui, suivant la coutume anglaise, desservaient sa cathédrale. La Curie qui avait pris parti pour ceux-ci dut intervenir à plus d’une reprise et même menacer l’archevêque. Voir n. 15 969-15 975 ; 16 005-16 008. Les ordres religieux, et tout spécialement les cisterciens furent spécialement encouragés ; les hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem et à un moindre degré les templiers curent une part considérable dans la sollicitude pontificale ; cꝟ. 15 514 sq., 15 551, etc. Bon nombre des décisions rendues par Urbain III dans des affaires contentieuses sont [lassées dans les collections canoniques postérieures et spécialement dans le recueil dis Décrétâtes. Signalons n. 15 726 sur le commerce et l’usure ; n. 15 735 sur une irrégularité empêchant la réception des ordres ; n. 15 742 sur un serment bizarre dont l’archevêque de Pise devra délier les ayants-cause ; n. 15 820, sur les droits de sépulture. Comme de juste un certain nombre de ces réponses visent le mariage ou sa dissolution. La bulle n. 15 752 prend la défense des intérêts du roi de France, dont certains clercs avaient falsifié le sceau. Le pape demande que l’on épargne aux coupables toute mutilation et tout châtiment corporel, qui puisse les mettre en péril de mort, mais ils seront dégradés, on leur imprimera une marque qui les fasse reconnaître et ils devront quitter leur province. Texte passé aux Décrétâtes, t. V, tit. xx, c. 8.’fout le long de son pontificat, Urbain III avait été préoccupé du péril qui menaçait les États latins d’Orient, depuis que Saladin avait entrepris de mettre sous son pouvoir tous les pays avoisinant l’Egypte. Vainqueur de Damas et de Mossoul il encerclait les États latins, qu’il envahissait par le Nord. Le 4 juillet 1187, à la bataille de Tibériade, le roi Lusignan était fait prisonnier et l’armée chrétienne presque anéantie. Le 2 octobre suivant la ville sainte était prise et bientôt il ne resterait plus aux chrétiens qu’une étroite bande côtière avec les places d’Antioche, Tripoli et Tyr. Très rapidement portée en Occident, la nouvelle de cet immense désastre aurait hâté la mort d’Urbain IV, mais ce point est loin d’être assuré. Il succomba à Ferrare, où, se dirigeant vers le territoire vénitien, il venait à peine d’arriver, le 20 octobre 1187. C’est à Ferrare qu’il fut inhumé ; son tombeau se voit encore dans la cathédrale de cette ville.

Jafïé, Regesta pontif. rom., 2e éd., t. ii, p. 492-528 ; Watterich, Pontif. roman, vitæ t. ii, p. 663-683, où l’on trouvera les principales chroniques ; L. Duchesne, Le Liber pontiflealis, t. ii, p. 349 (notice des Annales romaines), p. 451 (notice de Martinus Polonus) ; le texte des lettres et diplômes dans P. L., t. ccn (groupement très incomplet ) et Baronius, Annales, an. 1185 -an. 1187 ; pour les travaux se reporter à ceux qui sont donnés à la notice du pape Lucius III, t. IX, col. 1062 ; ajouter E. Jordan, L’Allemagne et l’Italie aux XI’/ et XIIIe siècles, dans G. Glotz, Histoire du Moyen Age, t. iv, l re partie, Paris, 1939, p. 136-149.

É. Amann.


URBAIN IV, pape du 29 août 1261 au 2 octobre 1264. — Alexandre IV était mort à Viterbe le 25 mai 1261. Les cardinaux, qui n’étaient plus que huit, ne parvinrent pas à s’entendre sur le choix d’un successeur pris dans le Sacré-Collège. En fin de compte, après trois mois d’attente, ils unirent leurs voix sur un personnage du dehors, le patriarche latin de Jérusalem, qui séjournait en Curie pour diverses affaires concernant la Terre sainte. Le 29 août, Jacques Pantaléon devenait ainsi le pape Urbain IV ; il fut couronné le dimanche suivant, 3 septembre, dans l’église des dominicains de Viterbe. Urbain demeurera dans cette ville une année environ, puis se transportera à Orvieto, où s’écouleront les deux dernières années de son pontificat. Il ne mettra pas le pied à Rome, où la souveraineté pontificale était toujours précaire.