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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 15.2.djvu/491

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2 5 I

VALENTIN. LES DISCIPLES

l’eucharistie. <>n sent, en lisant ces pages qu’il s’agit pour lui d’une hérésie bien vivante, dont il redoute la contagion parmi les brebis de son troupeau, et dont il est urgent de dénoncer l’activité malfaisante.

Vers le même temps, le valentinianisme est répandu à Rome. Nous ne saxons pas s’il y compte un grand nombre d’adeptes. Mais nous connaissons au moins un de ses fidèles, le prêtre apostat Florinus, contemporain et compatriote d’Irénée, qui a été en même temps que lui disciple de saint Polycarpe de Smyrne et qui peut-être est arrivé avec lui en Occident. Florinus est tombé dans l’erreur et saint Irénée lui écrit une lettre Sur la monarchie et que Dieu n’est pas l’auteur des maux, lettre dont Eusèbe, H. E., V, xx, 4, nous a conservé un passage plein des souvenirs d’enfance du grand évêque. Il lui dédie encore un ouvrage.Sur l’Ogdoade, pour lui montrer son erreur et l’engager a être fidèle à la tradition apostolique. Vers le même temps, Tertullien consacre un ouvrage entier à la réfutation du valentinianisme ; comme son horizon intellectuel dépasse les limites de l’Afrique et s’étend jusqu’à Rome, on peut croire que ce n’est pas seulement, ni même surtout de Cartilage qu’il parle lorsqu’il écrit : Valenliniani, frequenlissimum plane collegium inter hæreticos, quia plurimum ex apostatis veritatis. Adv. Valent., 1. N’oublions pas cependant que Tertullien exagère volontiers et qu’il est dangereux de le prendre à la lettre. Il doit à saint Irénée le plus clair de ses renseignements sur les valentiniens et souvent il se contente de le traduire : n’aurait-il pas donné des indications plus précises et plus personnelles s’il avait rencontré à Carthage un bon nombre de ces hérétiques ?

Les Philosophoumena d’Hippolyte nous ramènent à Rome aux environs de 220. Quelque quarante ans ont passé depuis la rédaction du grand ouvrage de saint Irénée. Il semble que les gnostiques, les valentiniens en particulier, ont cessé d’être réellement dangereux dans la capitale. Sans doute, Hippolyte sait que certains disciples de Marcus, ayant lu ce que saint Irénée raconte de leur maître l’accusent d’erreur et il ajoute qu’il s’est livré à des recherches minutieuses pour connaître exactement leurs doctrines. Philosoph., VI, 43. Mais en fait, il se borne à copier la notice d’Irénée, ce qui ne trahit pas une connaissance personnelle bien sérieuse. Quant à Valentin et aux valentiniens proprement dits, ce qui l’intéresse le plus, c’est de pouvoir les rattacher artificiellement à Pythagore et à Platon. Pour l’exposé de leur doctrine, il a plutôt recours, semble-t-il, à des sources écrites qu’à des renseignements oraux. Même lorsqu’il parle de l’école italique, il ne voit pas en elle un danger menaçant pour la foi. Il ne parle pas avec le même calme de Sabellius, d’Épigone, de Cléomène : c’est manifestement la doctrine de ces hérétiques qui, de son temps, menace le plus l’orthodoxie des fidèles de Rome.

Vers le milieu du nr 3 siècle, saint Cyprien parle encore de Valentin. Au plus fort de la controverse baptismale, il se scandalise de « l’inflexible entêtement de notre frère Etienne, qui va jusqu’à prétendre que même le baptême de Marcion, et aussi celui de Valentin, d’Apelle et des autres qui blasphèment contre Dieu le Père, donne naissance à des enfants de Dieu. » Epist., lxxiv, 7, 3. Dans sa réponse à l’évêque de Carthage, saint Firmilien fait appel à l’argument de prescription et signale lui aussi le nom de Valentin : « On trouve que c’est longtemps après les apôtres et les temps apostoliques que Marcion, disciple de Cerdon, a introduit sa tradition sacrilège, et qu’Apelle a adhéré à son impiété en y ajoutant beaucoup de graves nouveautés, contraires à la vérité et à la foi. On connaît aussi le temps où

ont paru Valentin et Basilide, et qu’ils n’ont élevé leurs mensonges criminels contre l’Église de Dieu. que depuis les apôtres et longtemps après. Epist., lxxv, 5, 2. À lire ces textes, il ne semble pas que Valentin ait réellement des disciples dans l’Afrique ou la Cappadoce du iiie siècle. A Rome même, on ne s’inquiète plus de sa doctrine. Le De Trinilate de Novatien réfute les hérésies trinitaires de son temps. La gnose de Valentin ne figure pas parmi elles.

Il n’en va pas de même en Egypte. Ce pays est bien la terre d’élection de la gnose. Clément d’Alexandrie, nous l’avons vii, est le seul à nous faire connaître d’importants fragments de Valentin. À plusieurs reprises, il s’occupe dans les Stromates des valentiniens et nous possédons encore sous son nom un recueil d’extraits de Théodote, un des membres les plus représentatifs de la branche orientale de la secte. Consacrerait-il tant de soins à s’occuper d’une hérésie morte ? Un peu plus tard, Origène parle de ceux qui suivent les errements de Valentin comme d’une robuslissima secla. In Ezech., nom. ii, 5. Ces hérétiques lui paraissent d’autant plus dangereux qu’en bien des points, ils sont assez rapprochés de l’orthodoxie et qu’ils font appel à la tradition apostolique. Ibid., n. 2. Ils s’appuient sur les Écritures canoniques, mais ils ne les interprètent pas conformément à la règle de la foi. In Matth., comment, ser. 4(i ; In Is., x, 29 sq. Dans l’Ancien Testament, ils gardent ce qui leur convient et rejettent tout le reste. In Ezech., fragm.. éd. Lommatsch, t. xiv, p. 2. Origène ne se contente pas de parler des valentiniens en général. Il étudie avec-un soin tout particulier le commentaire de saint Jean rédigé par un disciple de Valentin, Fléracléon et. dans son propre commentaire, il n’hésite pas à citer très souvent l’ouvrage de l’hérétique, pour le réfuter et quelquefois pour en accepter les interprétations. Il est peu d’hérésies auxquelles le grand exégète attache plus d’attention qu’à celle de Valentin et l’on se rend compte en le lisant, que, si elle ne menace pas réellement l’unité de l’Église, elle mérite encore d’être combattue.

Les renseignements précis nous font défaut pour suivre les destinées ultérieures de la secte. Dans une lettre au Édesséniens, l’empereur Julien écrit que ceux de l’Église arienne, enflés de leurs richesses, ont attaqué les valentiniens et commis dans Édesse des excès qui ne devraient jamais se produire dans une ville bien policée. Édit. Bidez, Epist., 115. On trouverait sans doute d’autres mentions de la secte valentinienne au ive siècle, voire au ve, dans les provinces reculées de l’Orient. Mais ce ne sont plus des hérétiques redoutables, ce sont des retardataires attachés à leurs souvenirs que signalent ainsi désormais les empereurs dans les lois contre les hérétiques ou les hérésiologues dans leurs réfutations et. quand la Vie de saint Épiphane nous parle de valentiniens dans l’île de Chypre vers 370-380, nous ne sommes pas obligés de la croire sur parole. Il est plus vraisemblable qu’à la même époque, il y avait encore des valentiniens en Egypte comme le dit saint Épiphane lui-même, Hæres., xxxi, 7, 1. Ils ne jouent plus de rôle actif dans l’histoire de la pensée chrétienne.

Principaux disciples de Valentin.

Nous devons

maintenant revenir en arrière et parler rapidement des principaux disciples de Valentin, pour autant qu’ils n’ont pas fait ailleurs l’objet de notices spéciales.

Il est assuré, comme nous l’avons dit que, très rapidement, les doctrines de Valentin se transformèrent. Comment en aurait-il été autrement, si l’on songe à leur complexité et à la fantaisie qui avait présidé à leur élaboration. Chacun croyait avoir le droit, tout en restant fidèle à l’esprit du maître,