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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 15.2.djvu/571

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2671 VERBE VERECUNDUS DE JU 2672

en date se rapprochent des conceptions philoniennes. Pour Michel Servet, le Verbe n’est plus qu’un logos intermédiaire à la manière du Logos de Philon :

« La Parole ou le Verbe est le monde idéal, la lumière

incréée… Le Verbe créateur émane l’esprit, l’âme du monde… Cet esprit… a trouvé sa parfaite expression en l’homme Jésus, dans la naissance duquel la substance du Verbe ou de la lumière incréée a tenu lieu de semence paternelle… » Voir Trinité, col. 1775.

— On trouve quelques idées analogues chez les protestants italiens réfugiés en Suisse. Valentin Gentilis fait du Fils, de la Parole, « la splendeur de la gloire de Dieu et ensemble vrai Dieu ». Mais, tandis que le Père est seul essentiellement Dieu, le Fils ou Verbe ne l’est que par participation ; il est Deus essentiatus. Ibid., col. 1777. — Les sociniens sont plus nets. Avec eux, nous tombons dans le pur arianisme. « Le Christ est appelé Verbe par saint Jean, parce que Dieu a fait de lui sa « Parole », c’est-à-dire « la révélation de sa volonté envers les autres hommes. Mais ce Verbe est bien un homme comme nous ». Voir Sociniens, t. xiv, col. 2332.

A mesure que la conception religieuse protestante évolue vers l’interprétation subjective, en raison soit de la théosophie, soit de la philosophie, soit du modernisme, la place et la notion du Verbe dans la Trinité devient de plus en plus problématique. On n’y voit plus qu’une adaptation faite par saint Jean de la philosophie judéo-alexandrine à la vie humaine du Christ. Cf. Keim, Geschichie Jesu von Nazara, Zurich, 1867, t. i, p. 112-113. Les préoccupations sont ailleurs, on cherche une interprétation plus large du dogme dans le sens de la philosophie ou de l’expérience religieuse : la considération particulière du Verbe disparaît dans l’ensemble.

2. Chez les catholiques.

La déformation vise ici beaucoup plus la conception du dogme trinitaire en général ou même du dogme tout court que la doctrine du Verbe. Quelques remarques suffiront.

L’adaptation faite par Gûnther de la philosophie hégélienne au dogme de la Trinité a une répercussion sur sa conception du Verbe divin. Le point de départ est, on le sait, la définition psychologique de la personne :

« conscience de soi ». L’insuffisance métaphysique

de cette définition a été rappelée à Hypostase, t. vii, col. 431. Outre l’apriorisme de cette définition, il serait facile de montrer les multiples défauts de l’exposé trinitaire de Giinther. Voir Trinité, col. 1795 ; cf. Janssens, De Deo trino, p. 385 sq. Une seule remarque retiendra ici notre attention (remarque applicable également à Schell) : la doctrine catholique distingue en Dieu deux processions, l’une selon l’intelligence, l’autre selon la volonté ; la première explique le Verbe ; la seconde le Saint-Esprit. Or Günther nous inciterait plutôt à ne voir en Dieu qu’une procession intellectuelle, mais à deux degrés.

Avec Rosmini, nous nous rapprochons davantage du Logos inconsistant de Philon : le Verbe serait la forme intrinsèque et constitutive de tout être fini. Voir ici Rosmini, t. xiii, col. 2932-2933.

Quant aux modernistes, on a vu comment Loisy a exposé la doctrine du Verbe en fonction de l’expérience religieuse des divers auteurs qui en ont parlé et comment aussi, selon lui, le problème qui s’est posé autrefois se pose aujourd’hui à nouveau, la notion de personne, de métaphysique et abstraite qu’elle était, devenant réelle et psychologique.

CONCLUSION. — L’enseignement catholique, sans distinction d’école, s’est aujourd’hui presque unaniment rallié à la doctrine de saint Thomas. Il suffira donc, en guise de conclusion, de rappeler ici les points essentiels de cette doctrine.

1° La première procession en Dieu est la procession du Verbe laquelle est selon l’opération de l’intelligence (Sum. theol.. I a, q. xxvii, a. 1). C’est ainsi que le Père « dit » le Verbe.

2° Cette procession du Verbe est une véritable génération, car elle vérifie la définition acceptée dans l’École : origo vi vends a vivente, principio conjuncto, in simîlitudinem naturæ. La similitude du Verbe par rapport à son principe est, dans une nature intellectuelle, formellement réalisée en fonction de son origine. On n’en peut dire autant de la procession du Saint-Esprit. Ibid.. a. 2, 4.

3° Dans son sens propre, le sens que lui a attribué saint Jean, le mot Verbe est un nom personnel et non essentiel, et ce nom ne convient qu’au Fils. I a, q. xxxiv, a. 1-2. Si parfois on le trouve appliqué au Saint-Esprit, c’est d’une manière métaphorique. Contra errores Grœcorum, c. xii. Quelquefois cependant, une propriété essentielle est appropriée au Verbe, en raison précisément de l’origine intellectuelle de celui-ci : c’est le cas de la causalité exemplaire par rapport aux créatures. I a, q. xxxix, a. 8 ; cf. Cont. Gentes, t. IV, c. xiii.

4° Le Verbe procède selon la connaissance que Dieu a nécessairement de toutes choses, c’est-à-dire de la connaissance de l’essence divine et de ses attributs, des personnes divines et de tous les possibles et, de plus, conséquemment au décret libre de Dieu touchant la création, de la connaissance des choses créées. I a, q. xxxiv, a. 3.

5° La notion d’image est connexe à celle de Verbe, en raison de la ressemblance qui existe entre le Verbe et Dieu le Père en vertu de la génération divine. Si parfois l’Esprit-Saint est appelé < image » par les Pères, c’est d’une manière moins propre. Seul le Fils peut être dit, en propriété du terme, l’Image du Père, Ibid, q. xxxv.

Les auteurs à consulter sur la théologie du Verbe sont :
1° D’abord les grands théologiens du Moyen Age, chefs d’écoles, dont les doctrines ont été exposées à Trinitie, col. 1730-1756.
2° Ensuite les auteurs plus récents ; dont les noms ont été rappelés au début de la synthèse théologique de la Renaissance à nos jours ; ibid., col. 1802-1822.

A. Michel.


VERECUNDUS, évêque de Junca dans la province africaine de Byzacène au milieu du vie siècle. — Tout ce que nous savons de la vie de Verecundus est contenu dans deux notices de la chronique de son compatriote et contemporain, Victor de Tunnuna. Nous apprenons ainsi qu’en 551 Verecundus fut appelé à Constantinople par ordre de l’empereur Justinien pour y rendre raison de sa foi : son opposition à la condamnation des Trois Chapitres lui avait mérité comme à d’autres évêques africains, cette sentence d’exil. L’année suivante, 552, nous retrouvons Verecundus à Chalcédoine, où il s’était retiré : il y mourut cette même année dans l’hospice de Sainte-Euphémie. Mon. Germ. hist., Auctor. antiquiss. , t. xi, p. 202. Saint Isidore de Séville nous renseigne d’autre part sur son activité littéraire : Verecundus africanus episcopus studiis liberalium litlerarum diserlus edidil carminé dactylico duos modicos brevesque libellos. quorum primum de resurrectione et judicio scripsit, alterum vero de pœnitentia, in quo lamentabili carminé propria delicta déplorai. De vir. ill., vii, P. L., t. lxxxiii, col. 1088.

Le second des poèmes signalés par Isidore doit être identifié à une pièce de 212 hexamètres éditée, à l’exception des sept derniers vers, par Pitra, Spicilegium Solesmense, t. iv, Paris, 1858, p. 138-143, sous le titre De satisfactione pœnilentiae. Dans l’abattement de son âme, le poète se tourne vers Dieu qui aura peut-être pitié de ses douleurs et lui donnera la consolation dont il a besoin. Sans doute ses péchés