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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 15.2.djvu/586

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VERSIONS DE LA BIBLE. LES SEPTANTE


à contester, de l’enseignement oral dans la transmission de la vérité révélée, la lecture de la parole de Dieu est indispensable aux croyants considérés dans leur ensemble. L'étude des versions bibliques anciennes montre que, dès la plus haute antiquité, les autorités gardiennes du dépôt script uraire ont pris soin que celui-ci fût accessible, en dépit de la question de langue, à tous ceux qui en avaient besoin. Et, pour ce qui est d'époques plus rapprochées de nous, il est intéressant, pour le théologien, de constater ce qui a été fait pour mettre la parole de Dieu, avec les précautions convenables, à la portée du grand nombre.

A cause de la diversité des problèmes soulevés, il y a intérêt à séparer l'étude des versions anciennes de la Bible et celle des traductions récentes, et pour ce qui est des premières à distinguer les versions de l’Ancien Testament et celles du Nouveau. — I. Versions anciennes de l’Ancien Testament. II. Versions anciennes du Nouveau Testament (col. 2725). III. Versions médiévales et modernes de la Bible (col. 2728).

I. Versions anciennes de l’Ancien Testament. — Il convient de les étudier dans l’ordre de leur apparition. On mettra donc en tout premier lieu la version grecque, dite des Septante, et les versions apparentées ; les versions araméennes ; enfin les versions qui dérivent plus ou moins directement des Septante.

I. LA VERSION GRECQUE DES SEPTANTE.

SOUS le

nom de version des Septante, on désigne, de temps immémorial, la plus ancienne version grecque connue de l’Ancien Testament. Cette traduction faite bien avant l'ère chrétienne pour les besoins des juifs alexandrins a été reçue et jusqu'à un certain point canonisée par l'Église : clic est encore aujourd’hui la traduction officielle des chrétiens de langue grecque. Traduite à son tour en différentes langues, elle est à la base de la plupart des anciennes versions de la Bible. Celles même qui n’en sont pas immédiatement dérivées n’ont pas laissé d’en subir l’influence. Cette antique traduction est donc un des canaux les plus importants par lesquels s’est répandue la parole écrite de Dieu.

1° Orif/ine. — L’origine cle cette version est mal connue ; à défaut de données certaines, la légende a travaillé énergiquement sur ce point. Souvent admise comme vérité historique, la légende a largement contribué à consacrer l’autorité de la version.

1. La légende.

Son point de départ se trouve dans la Lettre d’Aristée. Texte dans l'édition de Wendland, Leipzig, 1900, ou dans H.-B. Swete, An introduction to the Old Testament in areek, Cambridge, 1900, p. 499574 ; traduction allemande dans É. Kautzsch, Apokryfihrn und Pseudepigraphen des A. T., t. ii, p. 131, Cette lettre est censée écrite par Aristée, un

fonctionnaire du roi d’Egypte, Ptolémée II Philadelphe (283-247), à son frère Philocrate, qui, tout païen qu’il soit, comme Aristée d’ailleurs, s’intéresse aux choses juives. Aristée lui raconte les faveurs accordées aux Juifs par le roi, puis comment à la requête.le I)e mé I ri us do Phalère. directeur de la bibliothèque d’Alexandrie, Ptolémée a envoyé à Jérusalem nue mission demander une traduction grecque des Livres saints d’Israël. Aristée a fait partie de cette mission et peut donc rapporter ses impressions sur le culte israélite ; il a même recueilli de la bouche du grand prêtre de précieux éclaircissements ^ur l’interprétation allégorique de i.-i Loi. Quoi qu’il en soit, le pontife rassemble soixante-douze savants juifs, six par tribu, qui sont envoyés à Alexandrie avec un magnifique exemplaire de la Torah, qu’ils devront traduire. Somptueusement reçus par Pto lémée, ils sont installés dans l'île de Pbaroi OÙ

partageant le travail et mettant au besoin leurs lumières en commun, ils terminent en soixantedouze jours la traduction de la Torah. Le nom de Septante, sous lequel la traduction grecque est désignée depuis fort longtemps rappelle et le nombre des traducteurs et le nombre des jours qui furent employés au travail.

Cette narration paraît connue de Philon, Vita Mosis, ii, 5, et de Josèphe Ant. jud., XII, ii, qui ont lu vraisemblablement la lettre d’Aristée ; elle est admise par un bon nombre de Pères : S. Irénée, Cont. hser., III, xxi, 2, P. G., t. vii, col. 948 ; Clément d’Alexandrie, Strom., i, 22, t. viii, col. 892 ; Cyrille de Jérusalem, Catech., iv, 34, t. xxxiii, col. 497 ; Tertullien, Apol., xviii, P. L., t. i (1844), col. 379 ; S. Hilaire, In Psalm. //, 3, t. ix, col. 263 ; S. Augustin, à diverses reprises : De doctr. christ., II, xv, 22, t. xxxiv, col. 44 ; De civ. Dei, XVIII, xlii, t. xli, col. 602 ; S. Jérôme, qui a lu certainement la lettre d’Aristée, Præf. in Pentat., t. xxviii, col. 150. Aux données primitives s’ajoutèrent plus tard des embellissements : les soixante-douze traducteurs, enfermés séparément chacun (ou deux à deux) dans une cellule auraient réalisé exactement la même traduction. Pseudo-Justin, Orat. ad Grsec, 13, P. G., t. vi, col. 265 sq. avait vu de ses yeux les restes des cellules où avaient travaillé les interprètes et cette fable a trouvé créance chez plusieurs des Pères que nous venons de citer. Augustin lui-même s’y est laissé prendre, encore qu’il ne repousse pas l’idée d’un travail fait en commun. Voir la citation du De doctr. christ. Jérôme, par contre, proteste bruyamment contre ce « mensonge », en se réclamant de la lettre d’Aristée. Loc. cil. Cette petite histoire n’est pas sans importance, nous le dirons plus loin.

2. Critique. L’origine vraie des Septante. — La Lettre d’Aristée ne mérite aucune créance ; elle fait partie de cet ensemble considérable de littérature apocryphe mise en circulation dans un but de propagande par les Juifs alexandrins. Cf. art. Judaïsme, t. viii, col. 1591 sq. C’est l’avis unanime des critiques, encore que les auteurs diffèrent sensiblement sur la date de composition de la fameuse lettre. Entre les opinions extrêmes, celle de Schurer, p, >r exemple, qui la daterait de 200 avant J.-C, et celle de Willrich qui y trouve des allusions à Hérode, à Auguste, à Tibère et la mettrait donc après 33 de l'ère chrétienne, il y a toute une gamme d’hypothèses intermédiaires. Inutile de nous y arrêter, comme aussi de rechercher si Aristobule a connu cette lettre. La date de ce dernier est difficile à fixer et soulève de nouveaux problèmes.

En fait, la traduction en grec de la Torah doit son existence non point à l’intérêt porté par un roi d’Egypte aux choses juives, ni même au désir d’enrichir la bibliothèque d’Alexandrie, mais aux besoins de la Diaspora juive des pays hellénisés. Très nombreuse, très puissante, la communauté israélite d’Alexandrie, qui avait peu à peu oublié l’hébreu, lui-même tombé en désuétude en Palestine, avait besoin, tant pour le service synagogal, que pour les usages religieux et scientifiques des particuliers, d’une traduction grecque des saints Livres. Quand et comment prirent naissance les premiers essais, il est difficile de le dire. Peut-être la traduction du Pentateuque fut-elle déjà entreprise sous Ptolémée Philadelphe (283-217) ; en tout cas, elle existait j la qu du hte siècle, puisque l’historien juif Démétrius. auteur d’une Histoire des mis de la Judée (llspi TÛV 'IouSotlq : ^-/T.Jidiv), dont quelques fragments ont survécu, paraît bien l’avoir utilisée. Or. Démétrius semble avoir véCU sous Ptolémée IV (222205). Selon toute vraisemblance, des essais de tra