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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 15.2.djvu/745

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VIN DE MESSE

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parfois insupportables à certains estomacs. Tout vin authentique contient une proportion variable d’acides ; ces acides sont d’autant plus abondants que le raisin est moins mûr. Une certaine acidité favorise la fermentation et l’éclosion du bouquet ; mais l’excès est nuisible. On corrige cet excès par l’addition de substances qui détruisent chimiquement les acides.

Selon la loi française peuvent être employés : le carbonate de chaux pur (par exemple sous forme de poudre de marbre), le carbonate de potasse commercialement pur, et le tartrate neutre de potasse CH 2 (OH)- (O-K)-. Bien que ce procédé fasse entrer dans le vin des éléments étrangers, si l’opération est pratiquée dans les limites de la loi, c’est-à-dire par l’addition de quantités minimes, la validité comme la licéité du vin ainsi traité est sauvegardée en vertu du principe : parum pro nihilo.

Le même résultat peut être obtenu par l’emploi de la craie, du carbonate de soude (Na 2 C0 3) ou du bicarbonate de soude (Na H CO 3). Du point de vue liturgique, bien que certains auteurs se montrent assez sévères, cf. Pauwels, dans Periodica, t. vi, 1912, p. 69, n. 29, nous serions assez conciliants pourvu que les substances employées le soient en quantités minimes (quelques grammes par hectolitre). Il est vrai que le Saint-Office a répondu en 1896 à propos de l’usage du bitartrate de potasse : non expedire ; mais il semble que le consultant, qui voulait corriger un vin blanc trop acide, n’avait d’autre dessein que de « rendre ce vin plus agréable au goût ». Cf. Nouv. rev. théol., t. lxii, 1935, p. 62. Par les mêmes procédés, on peut atténuer l’acidité d’un vin dont l’alcool, par suite d’une deuxième fermentation, se tranforme progressivement en acide acétique (vin qui pique). Ce vin plus ou moins « piqué » est matière invalide ou illicite selon son degré d’altération. Le fait de la destruction chimique de ces acides le rendrait-il par là même apte à un usage liturgique ? Nous ne le pensons pas, attendu que la condition de ce vin ne s’est pas améliorée. Elle aurait plutôt empiré par le fait d’addition de substances étrangères qui restent en suspension, sans que le liquide ait changé substantiellement. Ce vin est donc à écarter comme matière du sacrifice.

7. Réduction du moût.

Le but est de diminuer la quantité d’eau contenue dans le raisin, afin d’obtenir une fermentation plus rapide et un vin plus généreux. Si cette opération est bien conduite, elle ne modifie pas la constitution du viii, l’eau étant considérée comme une substance non élaborée par la vigne, mais apportée du dehors par osmose. Deux méthodes peuvent être employées : la congélation partielle du moût, qui sépare l’eau en la réduisant en glace, laquelle peut être facilement retirée ; l’évaporation à feu doux, pour ne pas altérer le sucre en le réduisant en caramel.

Interrogé sur la licéité de cette évaporation du moût avant la fermentation, le Saint-Office a répondu le 5 août 1896 : Licere, dummodo decoctio hujusmodi fermentationem alcoholicam haud excludal, ipsaque jermentatio naturaliter obtineri possil et de facto oblineatur. Cf. Collect., n. 1950. On notera à ce propos que la fermentation naturelle n’exclut pas l’intervention humaine. Pour l’activer, il est tout à fait permis de mélanger au moût ainsi concentré un peu de moût frais, dans lequel les ferments sont plus abondants et plus vigoureux. On pourrait même, au cas où les levures auraient été par trop affaiblies, ajouter des ferments purs, tirés du raisin lui-même.

Deux procédés apparaissent donc aptes à confectionner un vin liturgique licite pour la messe au moyen de la concentration du moût : a) opérer une réduction modérée qusqu’à un tiers), par un chauffage tempéré au bain-marie (ne pas dépasser 65 degrés) ; les levures laissées à peu près intactes permettront une fermentation un peu plus lente peut-être, mais spontanée. b) Pousser la concentration jusqu’à évaporation presque complète de l’eau et réduction du moût à un état sirupeux ; le transport s’en trouverait facilité et tout danger de corruption écarté, même sous des climats tropicaux. Sans doute les ferments auront été à peu près totalement détruits et le liquide stérilisé. Sous cette forme, il serait certainement impropre à la consécration. (Le P. Pauwels, dans Periodica, t. vi, 1912, p. 65, le déclare invalide ; tandis que le P. Vitoria, dans Razon u fe, 1909, El vino dulce para misas, pencherait plutôt pour la validité, attendu que c’est du vrai jus de raisin. Nous conclurons que la matière serait au moins douteuse, donc à écarter.) Mais si la fermentation de ce sirop était obtenue par les moyens « naturels » que nous avons indiqués, il semble que rien ne s’opposerait plus à un usage licite du vin ainsi obtenu, après qu’on lui aura restitué la quantité d’eau convenable pour le rendre liquide. Cf. Brouillard, dans Xouv. revue théol., t. lxii, 1935, p. 71 ; Capello, De sacramentis, t. i, 4e éd., 1945, n. 271.

8. Utilisation de raisins secs. —

Certains auteurs avaient émis des doutes sur la légitimité de l’usage liturgique de vin confectionné uniquement avec des raisins desséchés, principalement en raison de l’obligation d’ajouter de l’eau, substance étrangère à la vigne. Interrogé sur ce point, le Saint-OfTice a répondu le 22 juillet 1706 : Licere (celebrare cum vino ex uvis passis), dummodo liquor, ex colore et gustu, dignoscatur esse verum vinum. Cf. Collect., n. 270. Mêmes réponses les 7 mai 1879 et 10 avril 1889. Donc, si tont vin de raisins secs n’est pas nécessairement licite, on ne saurait affirmer sans restriction son illicéité.

Quant à la fabrication de ce viii, des auteurs comme Génicot-Salsmans, Institut, theol. moralis, t. ii, 14e éd., 1939, n. 171, préconisent la méthode suivante : placer dans un récipient un poids égal de raisins secs et d’eau pure, laisser macérer dix heures au maximum, retirer le raisin gonflé d’eau, presser et laisser fermenter. On notera, avec Vermeersch, Theol. mor., t. ii, n. 372, que la quantité d’eau contenue dans le raisin frais pouvant aller jusqu’à 70 et même 80 o, on peut mettre dans le récipient deux fois plus d’eau que de raisins (soit environ un tiers de raisins). Voir dans le même sens la réponse du Saint-Office de 1706, confirmée le 7 mai 1879 et le 4 mai 1887. De plus, il n’apparaît pas essentiel que l’eau soit totalement absorbée par les raisins avant que le mélange soit livré au pressoir. On n’oubliera pas surtout de faire fermenter le liquide ainsi obtenu, au besoin en y ajoutant quelques raisins frais ou des ferments purs. Il y faudra un certain temps, probablement plusieurs jours. Le vin ainsi fabriqué est parfois le seul que puissent se procurer les missionnaires qui évangélisent certaines régions où la vigne fait défaut, et où le vin de messe ne peut être ni facilement ni sûrement transporté.

On n’oubliera pas non plus que le Saint-Office recommande aux missionnaires qui ne peuvent se procurer de l’alcool de vin aux fins de renforcer les vins du pays trop faibles pour se conserver, d’ajouter à la vendange une certaine quantité de raisins secs et de faire fermenter le tout. S. Off., 25 juin 1891, Collect, n. 1949. Cf. Instruction de la S. C. des Sacrements, 26 mars 1929, Acta apost. Sedis, t. xxi, p. 633. Un autre moyen d’obtenir un vin plus généreux lorsque la récolte n’est pas parfaitement-mûre serait de faire dessécher au moins partiellement les raisins avant de les presser.

Traitement et conservation du vin.

Les diverses opérations que l’on fait subir à un vin déjà achevé ont