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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 15.2.djvu/786

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VITAL (PRINCIPE) — VITAL DU FOUR


qui montre les rapports intimes entre la perception sensible, phénomène de la vie animale, et la pensée, phénomène de la vie intellectuelle ; 3° 1.’unité ontologique du composé humain, âme et corps, qui ne semble pas pouvoir admettre de principe intermédiaire entre l’une et l’autre ; 4° Les influences réciproques du physique et du mental, qui marquent l’étroite relation entre la vie spirituelle et la vie animale. Mais, en l’absence d’une déclaration formelle de l’Église, on pourrait se demander jusqu’à quel point l’hypothèse d’un principe vital distinct, dans l’homme, de l’âme intelligente, serait contraire à la doctrine catholique. La controverse ne pouvait donc être dirimée que sur le terrain religieux.

II. Intervention de l’Église.

La controverse au point de vue religieux. - —

Au point de vue religieux, une controverse touchant le principe vital dans l’homme s’est manifestée dès le début du christianisme. On a vu à l’art. Ame, t. i, col. 979 sq., combien la pensée des premiers Pères, notamment de Tatien, d’Irénée, de Tertullien, de Clément d’Alexandrie, d’Origène, est difficile à interpréter quant à la distinction qu’elle semble apporter entre l’âme spirituelle et l’âme corporelle.

1. C’est contre Apollinaire et l’apollinarisme que les Pères du ive siècle ont dû prendre position. Jésus-Christ possède une humanité parfaite ; il est Dieu parfait et homme parfait. Voir Hypostatique (Union), t. vii, col. 469 sq. Or, au dernier temps tout au moins de son évolution philosophique, Apollinaire distinguait dans l’homme le principe de la vie animale, l’âme (<>>yj]), et le principe de la vie intellectuelle, l’esprit (voùç) ; la divinité n’aurait pris, en Jésus, que la place du voùç. En combattant cette erreur, l’Église paraissait déjà bien affirmer qu’elle rejette la distinction d’un « esprit », principe de vie intellectuelle, et d’une « âme », principe de vie animale dans la nature humaine.

2. Au Moyen Age (concile de Vienne, 1312), l’Église condamna le système du franciscain Pierre Olieu, qui distinguait dans l’âme deux parties, la partie intellective et la partie sensitive, cette dernière seule étant unie au corps comme la forme l’est à la matière. Ce qui, en somme, était l’ancienne erreur apollinariste reproduite sous une forme nouvelle. Le concile de Vienne définit comme un dogme de foi que « l’âme rationnelle et intelligente est par elle-même et essentiellement la forme du corps humain. » Denz.-Bannw. , n. 480. Plus exactement le concile parle de l’âme intellective par opposition à l’âme sensitive qu’Olieu représentait comme étant le principe de la vie. Voir Forme du corps humain, col. 546 ; Olieu, t. xi, col. 986 sq.

3. Condamnée, l’erreur d’Olieu ne fut pas longtemps abandonnée. Elle survécut en divers systèmes, mais plutôt dans le monde des médecins et des philosophes. Voir les indications bibliographiques et historiques à Forme du coups humain, t. vi, col. 559 sq.

Ici nous rejoignons Descartes. L’opposition marquée par ce philosophe entre la pensée et l’étendue, c’est-à-dire entre l’âme spirituelle et le corps, l’incitait logiquement à considérer le principe vital comme distinct de l’âme. On a vu plus haut qu’il le réduisait même à un pur mécanisme. Toutefois, parce qu’il est impossible de nier l’action vitale de l’âme sur le corps, Descartes conçoit que l’âme, dont le siège est plus particulièrement dans la petite glande pinéale, reçoit les impressions du corps et transmet elle-même ses impulsions par [’intermédiaire des t esprits animaux » élaborés au cœur. Hypothèse bien fragile et aujourd’hui délaissée.

4. Revenant aux anciennes conceptions trichotomistes, des savants comme Cudworth, Buflon affirmèrent l’existence d’un principe vital distinct, dans l’homme, du principe spirituel. Ce système a trouvé bon accueil dans l’école de médecine de Montpellier avec Barthez et ses disciples (xviir 2 et xixe siècles). Il s’appellera désormais le vitalisme pour le distinguer de l’animisme qui fait de l’âme spirituelle le principe vital du corps humain. Voir les indications bibliographiques et historiques à Forme du corps humain, col. 561.

Intervention de l’Église.

Tant que la question ne fut pas portée sur le terrain théologique, l’Église s’est tue et en est restée aux décisions du concile de Vienne renouvelées au Ve concile du Latran. Mais, au xixe siècle, des théologiens allemands reprirent l’ancienne distinction apollinariste de l’âme, Seele, et de l’esprit, Geist, affirmant que l’âme seule est, dans l’homme, le principe de la vie. Au point de vue de l’union hypostatique et de la valeur méritoire des passions sensibles du Christ, la position présentait des dangers similaires à ceux de l’apollinarisme. Aussi cette doctrine fut-elle condamnée par Pie IX, à deux reprises : d’abord le 15 juin 1857, dans une lettre au cardinal-archevêque de Cologne, puis, plus expressément, le 30 avril 1860, dans une lettre à l’évêque de Brestau. Voir les documents à Forme du corps humain, col. 562-563. Le vitalisme, appliqué à l’homme, doit être considéré comme une erreur dans la foi et l’animisme comme une certitude théologique.

Importance pratique de la solution intervenue.

Pratiquement (quelles que soient les discussions théoriques encore possibles), il faut accepter que l’époque de l’apparition de la vie dans l’embryon humain coïncide avec celle de son animation par l’âme intelligente et spirituelle. C’est dès le premier instant de la conception que se produit cette animation. D’où :

1. Au point de vue légal.

On entrevoit les conséquences importantes en ce qui concerne le délai requis, après la mort du père, pour que l’enfant puisse être réputé légitime et capable d’hériter.

2. Au point de vue moral.

Tout attentat contre l’être humain qui se trouve déjà dans le moindre embryon doit être considéré comme un homicide véritable. L’Église condamne toute tentative directe d’avortement et prononce contre tous ceux qui y coopèrent, sans en excepter la mère, la peine de l’excommunication réservée à l’évêque. Can. 2350, § 1.

3. Au point de vue surnaturel.

Tout embryon, possédant déjà une âme spirituelle, doit recevoir le baptême si, d’une façon ou d’une autre, il vient à être mis au jour avant le temps : « Il faut veiller à ce que tous les fétus nés avant terme, à quelque époque que ce soit, soient baptisés absolument, s’ils vivent certainement ; si l’on doute qu’ils vivent, on les baptisera sous condition ». (".an. 747.

Cet aperçu général de la question du principe vital est extrait en grande partie de mon manuel : Leçons élémentaires de métaphysique chrétienne, Paris, 1938, p. 41-46. Il constitue, semble-t-il, une introduction utile à l’étude plus documentée, insérée dans l’art. Forme w corps humain, t. vi, col. 559-564.

A. Michel.


VITAL DU FOUR, frère mineur et cardinal (12607-1327). —
I. Vie. II. Œuvres et doctrine.

I. Vie.

Jean du Four, d’une bonne famille de Gascogne, naquit vers 1260 à Bazas, ville épiscopale de la province d’Auch. Entré jeune chez les frères mineurs de la province d’Aquitaine sous le nom de frère Vital, il fut envoyé en 1285 au Studium générale de Paris. Il y étudia les Sentences sous frère Jacques du Qucsnoy et y aurait été le condisciple de Scot. Les opinions diffèrent sur le curriculum vitiv de Vital du Pour à cette époque de sa vie ; cf. A. Callebaut, Les séjours du bx J.-D. Scot à Paris, dans Arch. franc.