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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 15.2.djvu/807

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VITORIA (FRANÇOIS DE) Y I V A (DOMINIQUE)


princes chrétiens, s’ils gouvernent à rencontre de la religion. Et, bien que le pape n’ait pas fait cela très souvent, ce n’est pas qu’il n’en eût le droit, mais c’était pour éviter le scandale ou pour tout autre motif de prudence. Semblablement et pour la même raison, le pape pourrait confier exclusivement au roi d’Espagne la prédication de l’Évangile dans les Indes (occidentales), interdire l’accès de ces terres à tous les princes chrétiens, afin d’empêcher des divisions et des troubles qui pourraient nuire à la propagation de l’Évangile. C’est ainsi qu’il faut interpréter, selon Vitoria, la fameuse bulle d’Alexandre VI (sur la ligne de démarcation). Le pape peut encore, si un certain nombre d’Indiens se convertissent au christianisme, leur donner un prince chrétien, tel que le roi d’Espagne, en les soustrayant au domaine des princes païens.

Comme on le voit, Vitoria qui nie carrément le pouvoir du pape en choses temporelles, à rencontre de l’opinion la plus commune à son époque, ne faiblit pas quand il s’agit de défendre le pouvoir spirituel avec son extension maxima, en y faisant rentrer le temporel dans tout ce avec quoi le spirituel peut avoir relation.

Mais pour autant il n’entend pas détruire la souveraineté des rois ou des princes en ce qui concerne le temporel, même s’il s’agit de personnes ou de choses qui aient quelque relation avec le spirituel. Les rois et les princes ont l’obligation de procurer le bien temporel de la République, et si quelques personnes ou si quelques choses sacrées étaient préjudiciables à celui-ci, ils devraient d’abord recourir au pape pour qu’il puisse y remédier et, s’il n’y était pas pourvu, ils pourraient procéder par eux-mêmes. Par exemple, si un prêtre commettait quelque crime et que, dûment averti, le pouvoir ecclésiastique n’appliquât pas le châtiment nécessaire, l’État pourrait procéder contre lui. De même Vitoria propose-t-il aussi la question : à qui faut-il obéir quand le pape et le roi commandent des choses contraires ? et il répond : il faut obéir au pape, s’il s’agit de choses spirituelles, et au roi, s’il s’agit de choses temporelles. Mais il fait observer que, si le pape déclare que ce sont là choses spirituelles ou nécessaires pour le spirituel, c’est lui qu’il faut croire, à lui qu’il faut obéir plutôt qu’au roi.

La souveraineté pontificale est pour Vitoria d’un ordre supérieur à celle de l’État et, en cas de conflit, la première doit toujours prévaloir. Mais par soimême, elle ne diminue ni n’absorbe la souveraineté de l’État, laquelle jouit d’une parfaite autonomie à l’intérieur de sa sphère propre.

Nous avons ainsi les fondements de la vraie doctrine concordataire, qui devait plus tard se développer. Le pape et le roi sont de véritables souverains, encore que d’un ordre distinct. Dans les choses qui ressortissent aux deux souverainetés, le pape doit compter avec le roi et le roi avec le pape. Ainsi les concordats, selon ces principes, sont de véritables traités synallagmatiques entre deux souverains, bien qu’étant toujours sauve la suprématie du pouvoir pontifical en cas de conflit et quand il s’agit de sujets chrétiens. C’était la doctrine communément admise en ces temps-là ; j’ajoute « quand il s’agit de sujets chrétiens », parce que Vitoria nie que le pape ait aucun pouvoir sur les infidèles, si’ce n’est un pouvoir indirect pour la prédication de l’Évangile.

La propriété privée.

Pour être tout à fait

d’actualité*, il convient d’indiquer très sommairement la doctrine de Vitoria concernant la propriété privée des biens fonds. Pour lui, comme pour saint Thomas et pour tous les scolastiques, la division, la répartition des propriétés est du Droit des gens, non de Droit naturel, comme l’ont prétendu beaucoup de

modernes. Par conséquent s’il y a collision entre le Droit naturel et le Droit des gens, c’est toujours ce dernier qui doit prévaloir. Or, il est de Droit naturel que tous les hommes aient les moyens convenables pour leur subsistance — à moins que de leur faute ils n’en soient frustrés par leur oisiveté ou leur vice — et si la propriété privée était un obstacle pour cela, elle finirait par être injuste dans la mesure où elle s’opposerait à ce droit fondamental. Vitoria a essayé de résoudre ce conflit en enseignant l’obligation grave de l’aumône. Mais, comme cette obligation est allée s’atténuant de plus en plus aux mains des moralistes, en même temps qu’est allé se perdant l’esprit de charité des époques passées, ont surgi les conflits sociaux et aujourd’hui il s’agil de résoudre par la justice sociale ce que Vitoria cherchait à résoudre par le moyen de la charité. Les principes sont les mêmes et c’est d’eux que paraissent s’inspirer les dernières encycliques pontificales en matière sociale.

La bibliographie se rapportant à Vitoria qui apporte des données nouvelles du point de vue historique et littéraire a été indiquée au cours des deux parties de cet article. L’aspect doctrinal a été étudié, en dehors de quelques articles de revue, par les auteurs suivants : H. Beuve-Méry, La théorie des pouvoirs publics d’après François de Vitoria et ses rapports avec le droit contemporain, Paris, 1928 ; J. T. Delos, La société internationale et les principes du droit public, Paris, 1929 ;.1. Brown Scott, The origin o/ international law, Washington, 1928 ; le même, The spanish origin of international law. Francisco de Vitoria and his law of nations, Oxford-Londres, 1934 ; JE. Naszalyi, Doctrina Francisci de Vitoria de Stalu, Rome, 1937 ; C. Barcia-Trelles, Francisco de Vitoria, jundador del derecho internacional moderno, Madrid, 1928.

J.-G. Menendez-Rigada.


VITTORELLI ou VICTORELLI André, savant ecclésiastique italien, et l’un des hommes les plus érudits de son temps, né à Bassano (Vénétie) vers 1580, mort à Rome en 1653. Vittorelli a ajouté les biographies de Léon XI, Clément VI II, Paul V, Grégoire XV et Urbain VIII aux Vitæ et res gestæ summorum pontificum Romanorum et S. R. E. cardinalium de Ciaconio ; il a annoté par ailleurs V Institutio sacerdotum de F. Tolet, Rome, 1636, in-4°, le De o/ficio curati de Possevin, Lyon, 1614, in-16, et le célèbre manuel de Navarre (Azpicuelta), Venise, 1614, in-4°. On trouvera la liste complète des écrits de Vittorelli dans Allatius, Apes urbanæ ; citons entre autres De angelorum cuslodia libri II, Padoue, 1607. in-4° ; Délia cuslodia degli angeli, Venise, 1616, in-8° (traité différent du précédent) ; De sancto extremæ unctionis sacramento, Padoue, 1609 ; Gloriose memorie délia BB. Vergine Matre di Dio, Rome, 1616 ; De origine et clausura monialium, Rome.

J.-B. Verci, Scrittori Bassanesi, t. i, p. 57 ; Tiraboschi, Storia délia letteratura italiana. Milan, 1733, t. viii, p. 95 (Vettorelli) ; Hurter, Nomenclator, 3e éd., t. iii, col. 1106 et 541 ; Michaud, Biographie universelle, nouvelle éd., t. XLiii, p. 685.

J. Mercier.


VIVA Dominique, de la Compagnie de Jésus, (1648-1726). — Né à Lecce, petite ville épiscopale de la province d’Otrante, le 19 octobre 1648, il entra dans la compagnie le 12 mai 1663. Après avoir professé les humanités et la philosophie, il fut appliqué aux sciences proprement ecclésiastiques, huit ans il professa la morale, huit ans la scolastique au grand établissement que les jésuites avaient à Naples ; en 17Il il devint recteur de ce collège, finalement provincial. Il mourut à Naples le 5 juillet 1726. Sa production littéraire, qui est relativement volumineuse, est l’expression de son enseignement.

Le premier de ses ouvrages, De jubitœo anni sancti, Naples, 1699, réédité plusieurs fois, Padoue, 1709,