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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 15.2.djvu/951

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VOLTAIRE. PRINCIPALES ŒUVRES


eu aucune société ». P. 78-79. — 2. Nature partout la même, xxxvi, dans l’ordre moral comme dans l’ordre physique. Ceci contre Locke, xxxiv, xxxv, et Hobbes, xxxvii. « Chaque nation eut très souvent d’absurdes et de révoltantes opinions » en métaphysique, en théologie, « mais s’agit-il de savoir s’il faut être juste, tout l’univers est d’accord ». P. 87. « Puisque tous les philosophes avaient des dogmes différents, il est clair que le dogme et la vertu sont d’une nature entièrement hétérogène. » P. 91-92. La conséquence logique serait la tolérance : « Qu’on soit du parti d’un évêque d’Ypres, qu’on n’a point lii, ou d’un moine espagnol, qu’on a moins lu encore, n’est-il pas clair que tout cela doit être indifférent au véritable bonheur d’une nation ? » P. 92. Mais les hommes aveuglés par l’ignorance se sont « égorgés, pendus, roués et brûlés » et « pour quelles sottises inintelligibles ! » P. 95. En ce siècle, l’aurore de la raison, « … quelques têtes de cette hydre du fanatisme renaissent encore… Quiconque recherchera la vérité risquera d'être persécuté ». Néanmoins, « la vérité ne doit plus se cacher devant ces monstres ». Ibid.

23° Les questions de Zapata, traduites par le sieur Tamponet, docteur de Sorbonne, in-8°, Leipsick (Genève), 1766 (1767) (xxvi, 173). — Zapata est un licencié nommé professeur de théologie à Salamanque. En 1629, il présenta à la junte des docteurs soixantesept questions.

Quarante-neuf portaient sur l’Ancien Testament : 1. Comment les Juifs que nous faisons brûler par centaines furent-ils pendant quatre mille ans le peuple chéri de Dieu ? — 2. Pourquoi Dieu a-t-il pu abandonner pour la petite horde juive le reste de la terre et ensuite abandonner cette même horde pour une autre pendant deux cents ans beaucoup plus petite et plus méprisée ? — 3. Pourquoi tant de miracles en faveur de cette horde et plus un seul aujourd’hui alors que nous sommes le peuple élu ? — 4. Comment les chrétiens brûlent-ils les Juifs en récitant leurs prières et, adorant le livre de leur loi, les brûlent-ils pour avoir servi leur loi ? — Les questions 5 à 50 exposent des difficultés sur les textes mêmes.

Dix questions (50-59) portent sur les évangiles, leurs contradictions et leurs invraisemblances.

Les sept suivantes (60 à 66) concernent l’histoire de l'Église : (60) Peut-on prouver que Pierre est venu à Rome ? (61) Pourquoi appeler symbole des Apôtres une profession de foi composée quatre cents ans après eux ? Les Pères ne citant que les évangiles apocryphes, n’est-ce' pas que les canoniques n’existaient pas ? (62) « N’est-ce pas triste que notre vérité ne soit fondée que sur des mensonges » (des premiers chrétiens)? (63) Pourquoi sept sacrements et le dogme de la Trinité, alors que Jésus-Christ n’a rien dit de cela ? (64-65) L'Église est infaillible, mais laquelle ? la latine ? la grecque ?… Le pape est-il infaillible, même un Alexandre Vf dans ses désordres ?

Les questions 66 et 67 sont des conclusions : Ne rendrais-je pas service en n’annonçant que la morale, c’est-à-dire l'Être suprême, principe de toute morale ? Ou dois-je annoncer les extravagances et les turpitudes du christianisme ?

Zapata n’eut pas de réponse. II se mit à prêcher Dieu simplement, séparant la vérité du fanatisme, enseignant et pratiquant la vertu. Il fut donc bienfaisant, modéré et … rôti à Valladolid, l’an de grâce 1631.

24° L’examen important de milord Bolingbroke, écrit sur la fin de 1736. Paru d’abord dans le Recueil nécessaire, in-8°, Leipsick (Genève), 1765. Paru à part, s. 1. (Genève), 1767 (xxiv, 195). Évidemment, le nom de l’auteur et la date sont supposés. — L’univers est partagé autour de la question religieuse, t À qui

croire ? » Il faut examiner. Un homme qui reçoit sa religion sans examen ne diffère pas d’un bœuf qu’on attelle. P. 197. En fait, Voltaire ne fait le procès que du christianisme.

Contre le christianisme, deux préjugés d’abord. Il est divisé en de multiples sectes. Or, l’humanité ne se divise pas autour des notions qui lui sont nécessaires, donc vraies. Dans le domaine religieux, elle ne se divise pas autour de la notion de Dieu : cette notion est donc vraie. Mais tout ce qui dépasse cette notion est source de division, donc erreur. P. 197-198. « La défiance augmente quand on voit que le but de tous ceux qui sont à la tête des sectes est de dominer et de s’enrichir. » P. 198. Sans s’arrêter à ces faits Voltaire examinera par lui-même le christianisme. Ibid. Avant-propos.

1. Examen du judaïsme, fondement du christianisme. — Le judaïsme vient-il de Dieu ? Mais comment Dieu aurait-il fait « son peuple chéri » d’une « horde d’Arabes voleurs », à qui il n’aurait même pas enseigné l’immortalité de l'âme. Les Grotius, Abbadie, Houteville ont beau affirmer le contraire : ni le Pentateuque n’est de Moïse, ni Moïse n’a existé ; si, par impossible, le Pentateuque était de lui, cela prouverait simplement que « Moïse était un fou ». C. ivi. Et les mœurs de ce peuple « ne sont-elles pas aussi abominables que les fables sont absurdes ? » C. vu et vin. « Toute l’histoire juive, dites-vous, ô Abbadie, est la prédiction de l'Église ; tous les prophètes ont prédit Jésus. » P. 216. Or, les prophéties ont deux sources : 1. la fraude : « Le premier prophète fut le premier fripon qui rencontra un imbécile » ; 2. le fanatisme. Ajoutez que l’histoire et les livres des prophètes sont « les monuments de la plus outrée et de la plus infâme débauche. » C. ix.

2. Examen du christianisme.

a) Son fondateur. — Il naquit en un temps où personne ne parlait de l’attente du Messie. Mais, paysan grossier, illettré, il voulut, par un fanatisme fréquent dans la populace, fonder une secte pour l’opposer à d’autres — tel, Fox — et se fit pendre. Ses disciples, comme les quakers à Fox pilorisé, demeurèrent fidèles à leur maître pendu et dans leur attachement le dirent ressuscité. C. x et xi.

b) La primitive Église et ses croyances. — « Les premiers Galiléens…, la canaille juive », gagnèrent « la canaille païenne », qui aimait les fables et la nouveauté. Ce fut l'œuvre surtout « de ce Paul au grand nez et au front chauve », qu’animait « la fureur de la domination… dans toute son insolence ». C. xii. Ici l’on entre dans la voie des faux. Chaque communauté « de ces demi-juifs, demi-chrétiens, voulut avoir son évangile. On en compta cinquante-quatre, mais il y en eut beaucoup plus », tous apocryphes, tous inventés, tous se contredisant, à ce point que la concordance que l’on tenta entre eux « est encore moins concordante que ce qu’on a voulu concorder ». C. xiii. Faux aussi ces vers sybillins qu’inventèrent les premiers chrétiens pour gagner la populace juive. C. xiv. Fausse et ridicule leur explication des prophéties pour gagner les Juifs. C. xv. Pour mieux réussir, on en ajouta aux anciennes, c. xvi, l’on fit prédire à Jésus la fin de ce monde et la Jérusalem nouvelle pour les temps présents, c. xvii ; l’on interpréta l’Ancien Testament comme une allégorie du Nouveau. C. xviii. Enfin l’on imagina des lettres de Pilate ; un décret de Tibère pour faire du Christ un Dieu ; l’on supposa le testament de Moïse et d’Enoch… C. xix et xx. Mais le platonisme fort en vogue fournit bientôt un aliment à la nouvelle secte et l’on eut Justin, Tertullien, Clément d’Alexandrie, Irénée avec des mystères et des dogmes absurdes, « l'édifie le plus monstrueux qui ait jamais déshonoré la raison ». P. 263. C. xxi-xxvi.