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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 15.2.djvu/980

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    1. VULGATE##


VULGATE. AUTHENTICITE

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s’agit donc pas d’authenticité au sens critique. « Rien, ajoute le P. Lagrange, ni dans les termes du concile, ni dans les délibérations antérieures, n’indique qu’on a entendu certifier la conformité de la Vulgate avec les originaux authentiques. Cette fidélité était supposée par la nature des choses, elle est à la base du décret. Mais jusqu’où s’étend-elle ? Personne ne l’avait précisé, et le décret n’a rien changé en ce point. » R. P. Lagrange, op. cit., p. 305-306.

Cependant cette interprétation ne prévalut pas universellement, et une controverse s’éleva entre théologiens sur le sens des décrets du concile de Trente et l’autorité qu’ils conféraient à la Vulgate. Une lettre de Bellarmin d’avril 1575 (publiée par P. Battifîol dans La Vaticane de Paul III à Paul V, et citée dans J. Thomas, Mélanges d’histoire et de littérature religieuses, p. 312) précise nettement les deux tendances opposées :

Video de re tanta summorum virorum dissimilia esse judicia, cum alii palam affirment ipsam latinam et vulgatam editionem ita esse a concilio approbatam ut non liceat ullo pacto nunc asserere aliquam esse in hac editione sententiam qiue vel falsa sit vel mentem primi auctoris non contineat ; qui etiam malint hebraicorum grsecorumque codicum auctoritatem contemnere, quam ullam in antiqua interprète lapsum agnoscere ; ac demum verum et germanum Scripturæ sensum non minus in hac editione habcre nos doceant, quam si ipsa primorum scriptorum autographa haberemus ; alii vero contra, nihil unquam taie a concilio decretum esse contendant, sed illud solum, hanc veterem et vulgatam editionem ut omnium optimam esse retinendam, nec ulli fas esse aliam aliquam vel in gymnashs vel in concionibus tractare, vel in sacris publicisque oflïciis legendam aut canendam introducere, quin etiam nihil omnino in hac editione reperiri quod fidei puritati vel morum honestati sit adversum : ceterum negari non posse quin interpres latinus hujus editionis auctor, nonnunquam more ceterorum hominum dormitaverit et non seinel a vero Scriptura sensu aberraverit.

Ce second sentiment était partagé par la plupart des théologiens contemporains de la ive session du concile, où avait été tranchée la question de la Vulgate, tels que Laynez, Salmeron, Sirleto, et plus encore par ceux qui, comme Vega, avaient assisté aux délibérations du concile. Cependant l’opinion qui majorait l’autorité attribuée à la Vulgate par le concile, au point de mettre la version latine au-dessus des textes originaux eux-mêmes, tels qu’ils étaient en usage, allait gagner un nombre croissant de théologiens. Elle pouvait d’ailleurs s’appuyer sur une décision de la Sacrée Congrégation du Concile, du 17 janvier 1576, qui, répondant à une question posée sur l’interprétation à donner au cum omnibus suis partibus du décret Sacrosancta, déclarait qu’on ne pouvait rien contester dans la Vulgate : ni une période, ni un membre de phrase, ni une syllabe, ni un iota, et blâmait le théologien A. Vega, dont on traitait le langage d’audacieux. On a longtemps discuté de l’authenticité de cette riécision ou du moins de l’exactitude de son texte. Mais les documents publiés par P. Batiffol dans son ouvrage déjà cité, l’ont mise hors de doute (cf..). Thomas, op. cit., p. 308-310). C’est en Espagne surtout que l’opinion la plus stricte sur l’authenticité de la Vulgate prévalut, après avoir suscité de vives controverses, dont on trouve l’écho dans la préface d’une dissertation de Marlana, publiée en 1609 (cette dissertation Pro editione Vulgata a été reproduite par Migne, Gurtu » s. Scriptura, t. i, col. 590). Xrsrio un ullu dltpUtattO tiis siiprrioribus annis intrr theologos, in Hiêpania præserttm, majori nnimornm ardore ri molu agltata ttt, odioque partlum magl » implacablll. Elle y fui courante pendant longtemps, puisque, au milieu riu xvir siècle, Jean rie Saint-Thomas donnait encore comme conformes ; i l’opinion reçue ses propres conclusions au sujet rie la Vulgate, qu’il formulait ainsi : Habenda est pro légitima non solum quantum ad ea quæ pertinent ad fidem aut mores, sed etiam quoad omnes litteras et apices ; hoc enim necessc est fateri postquam hsec ipsa editio décréta est esse authentica : de ratione scriptura* authenticæ est ut omnes ejus clausulæ et apices certse et indubitatæ auctoritatis sint.

Cependant, au milieu du xviie siècle, la publication de l’Histoire du concile de Trente de Pallavicini (bien qu’incomplète, les documents concernant la ive session n’ayant été publiés intégralement que dans l’édition du concile de Trente entreprise par la Gôrresgesellschaft, spécialement dans le t. i paru en 1901 et le t. v paru en 1911) fit la lumière sur les intentions des Pères du concile lorsqu’ils rédigèrent les décrets concernant la Vulgate, et l’interprétation modérée de ces décrets devint de plus en plus dominante. Aujourd’hui, on est unanime à reconnaître les nombreuses imperfections de la Vulgate, et à juger que le recours aux textes originaux non seulement est légitime, mais s’impose quand il s’agit de déterminer dans le détail le véritable sens des Écritures. Il y a longtemps que la décision de la S. Congr. du Concile de 1576 a été interprétée simplement comme une défense de rien avancer, en matière de foi ou de mœurs, qui soit contraire à la lettre de la Vulgate, le droit de s’en écarter restant sauf, toutes les fois qu’est établie sa non-conformité avec le texte original certain. « Nous somme loin du temps où un théologien illustre se représentait la Vulgate, entre le grec et l’hébreu, comme le Sauveur entre les deux larrons. » R. P. Lagrange, op. cit., p. 307.

Si l’accord est établi entre les théologiens sur le fait que, en vertu des décrets du concile de Trente, la Vulgate doit être considérée comme ne contenant aucune erreur en matière dogmatique ou morale, et comme devant faire foi, en tant qu’autorité théologique, dans toutes les discussions de cet ordre, les opinions des théologiens restent divergentes quant à la conformité plus ou moins parfaite de la Vulgate avec l’original inspiré dans les passages qui touchent à la foi ou aux mœurs. Tout le monde admet que l’authenticité de la Vulgate, telle que l’a entendue le concile de Trente, suppose et entraîne sa conformité substantielle avec les textes originaux, ad summam rei quod spécial, selon l’expression employée par Léon XIII dans l’encyclique Providentissimus Drus. Mais l’autorité théologique du cardinal Franzelin, qui d’ailleurs, parce qu’il ne connaissait pas le détail des délibérations du concile de Trente dans sa ive session, inclinait à attribuer au décret Insuper une valeur non seulement disciplinaire, mais dogmatique, a conduit beaucoup de théologiens à supposer que, dans les passages dogmatiques concernant la foi ouïes mœurs, la conformité de la Vulgate à l’original non seulement exclut toute contradiction entre la version et le texte primitif, mais doit être entendue comme une conformité positivi, en ce sens que tout dogme énoncé dans un texte de la Vulgate devait être formulé aussi au même endroit dans l’original. Tout ce que concédait Franzelin, c’est qu’il pouvait exister entre la Vulgate et l’original une différence modale, c’est-à-riire que le dogme pouvait ne pas être exprimé tout à fait de la même façon dans la version que dans l’original, et que par exemple le traducteur pouvait avoir donné à l’énoncé dogmatique une clarté et une précision qui n’existait pas au même degré dans le texte primitif : ainsi, dans la cas de.lob, xix, 25, OÙ le dogme de la résurrection de la chair serait exprimé de façon plus obscure dans l’original hébreu quc dans la version hiéronymienne ; ainsi également dans le cas de Gen., iii, 15, où le texte de la Vulgate : les rnnlrrrl riipul luutn, exprimant le triomphe de la femme sur le