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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 2.2.djvu/117

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CANON DE LA MESSE


cédait partout a peu près de la même manière et il y avait uniformité pour l’essentiel du sacrifice ; mais il est impossible d’admettre une complète identité de tous les détails, même dans les Églises fondées par les apôtres. « Ce n’est pas aux premiers jours que l’on peut attacher aux choses de cet ordre l’importance qui les consacre et les fixe. Peu à peu les habitudes devinrent des rites ; les rites s’épanouirent en cérémonies de plus en plus imposantes et compliquées ; en même temps, on arrêta le thème des prières et des exhortations : l’usage indiqua à l’officiant les idées qu’il devait développer et l’ordre dans lequel il devait les traiter. On fit plus tard un dernier pas en adoptant des formules fixes qui ne laissèrent plus rien à l’arbitraire individuel et aux hasards de l’improvisation. » L)uchesne, p. 54. Cf. Renaudot, Dissertatio de liturgiarum oriehtalium origine et auctorilate, dans Liturgiarum orientalium collectio, Francfort-sur-le-Main, 181-7, 1. 1, p. i-xx ; Le Brun, Explication littérale, historique et dogmatique des prières et des cérémonies de la messe, Paris, 1726, t. iii, p. 572-C 94 ; Probst, Liturgie der drei ersten christlichen Jahrhunderle, Tubingue, 1870.

2° Le canon de la messe dans les Églises occidentales. — Le canon occidental est donc en substance identique au canon oriental. Il n’en peut être autrement si, comme il est naturel, saint Pierre et saint Paul ont apporté à Rome la liturgie qu’ils avaient introduite à Jérusalem, Antioche, etc. Cf. S. Isidore de Séville, De of ficus, 1. I, c. xv, P. L., t. lxxxiii, col. 752. D’ailleurs ce n’est point là une simple hypothèse, car la première lettre de saint Clément de Rome aux Corinthiens, n. 59-61, Funk, Patres apostolici, 2e édit., Tubingue, 1901, p. 174180, et la première Apologie de saint Justin, n. 65, P. G., t. VI, col. 428, semblent bien établir que la liturgie primitive était, dans sa diposition générale, la même en Orient et en Occident. Toutefois, on n’en pourrait conclure que le canon romain, sauf quelques modifications introduites plus tard, est d’origine apostolique. Il faut descendre jusqu’à la fin du IVe siècle pour trouver des détails précis sur le canon de l’Église romaine. Les dernières modifications qu’il a subies ont été arrêtées par le pape saint Grégoire (590-604), Liber ponlificalis, édit. Duchesne, t. I, p. 312 ; au commencement du VIe siècle, l’auteur du Liber ponti/icalis en parle comme d’une formule fixe et de teneur connue. On pense généralement que dès le commencement du Ve siècle, l’ordre du canon romain était déjà ce qu’il est maintenant. Ainsi son histoire ne s’étend guère au delà de deux siècles. Elle peut se résumer comme il suit :

1. Le Liber ponlificalis, édit. Duchesne, t. I, p. 128, cf. p. 56-57, attribue à saint Xyste I er (117-126) l’insertion du Sanclus intra aclionem ; mais cet hymne, commun à toutes les liturgies, fait partie du noyau primitif de la messe. Dans la plupart des liturgies orientales, la préface et le Sanclus sont reliés à la consécration par une Courte transition destinée à amener le Qui pridie cjuam pateretur. Cf. Duchesne, op. cit., p. 61. A Rome, au contraire, comme à Alexandrie et à Milan, dès le ive siècle, le Mémento précédait la consécration. Duchesne, op. cit., p. 179 ; l’robst, Liturgie des IV Jahrhundertes, p. 249.

2. Dans sa lettre xxv à l’évêque Deccntius, P. L., t. xx, col. 553, qui l’avait consulté sur la coutume, suivie en certains endroits, de faire le Mémento avant le commencement du canon, ante preeem, Innocent 1 er (401-417) répondait qu’il fallait d’abord recommander à bieu les dons du sacrifice, puis désigner ceux pour qui il était offert, de façon qu’ils fussent nommés pendant le canon. Par conséquent, au temps d’Innocent [ « , la prière Te igitur, où se fait la recommandation des dons du sacrifice, rogamus ut accepta habeas hsecdona, etc., fais.iit déjà partie du canon de la messe et y précédait le Mémento. Du même, les mots : pro Ecclesia, quant

adunare, regere, custodire digneris, sont cités par le pape Vigile (537-555), Epist. ad Justinianum, P. L., t. lxix, col. 22, comme appartenant de date ancienne au canon. Quant à la mention : una cum famulo tuo papa et antislite noslro, son antiquité résulte, semblet-il, avec toute la certitude désirable, de la coutume attestée par le pape Léon I er, Epist., lxxx, P. L., t. liv, col. 914, de réciter à l’autel, pendant l’offrande, les noms des évêques.

Dans les liturgies orientales du IV siècle, cf. Duchesne, op. cit., p. 62, on recommandait également à Dieu les malades, les nécessiteux, les prisonniers, les voyageurs, les absents, et encore les vierges, les veuves et en général toutes les classes de fidèles ; le canon grégorien s’est contenté de les comprendre dans la formule générale : Et omnibus ortliodoxis, etc.

3. C’était autrefois le diacre qui lisait, au moment du Mémento, après et omnium circumstantium, les noms de ceux dont les dons étaient offerts à l’autel. Puis le prêtre continuait par les mots : quorum /ides libi cognila est, qui se rapportaient à la fois aux donateurs et aux assistants. Il est à remarquer que dans le missel romain, après les mots : pro quibus libi ofjerimus, on lit la formule primitive : vel qui tibi ofjerunt. Sans doute, le premier de ces deux textes a été inséré à l’époque où les fidèles ont cessé d’offrir la matière du sacrifice.

4. L’existence du Communicantes dans le canon romain avant l’époque grégorienne devient hors de doute si l’on observe de quelle façon les sacramentaires léonien et gélasien présentent l’intercalation relative à la fêle du jour qui se faisait plusieurs fois dans l’année à cet endroit du canon. Ainsi, le gélasien, P. L., t. lxxv, col. 1113, porte à la veille de Pâques : Communicantes et noctem sacratissimam célébrantes… resurreclioneni D. N. J. C. secundum carnem, sed et memoriam, et à cinq autres fêtes il indique de la même manière que les mots à insérer doivent se placer entre Communicantes et Sed et memoriam vénérantes. Or ces derniers mots appellent évidemment la suite qui se lit dans le grégorien : Sed et memoriam vénérantes inprimis, etc. Quant à l’auteur de ces intercalations, il est rationnel de désigner le pape Léon I er (440-461), car le texte de plusieurs d’entre elles, du moins tel qu’il existe dans le sacramentaire léonien, P. L., t. î.v, col. 38, 40, se trouve presque littéralement dans les écrits de ce pape. P. L., t. liv, col. 395, 419.

Sous le pape A’igile (537-555), le canon recevait des insertions de ce genre, capitula, même aux fêtes des saints, Epist. ad Eut/i., P. L., t. lxix, col. 18, niais le pape Grégoire I er coupa court à cette invasion du propre du temps dans le canon de la messe en limitant, comme elles l’ont été depuis, ces insertions aux fêles principales de l’année, Noël, Epiphanie, jeudi saint, Pâques et sa vigile, Ascension, Pentecôte et sa vigile.

En tête des saints dont l’intercession est demandée, vient la R. V. Marie, toujours vierge et mère de Dieu. Ces derniers mots visent l’hérésie de Nestorius (431), comme ceux de « toujours vierge » sont opposés à celle de Jovinien. Il est vraisemblable que ces additions datent du milieu du Ve siècle.

Viennent ensuite les noms des douze apôtres et l’on a remarqué qu’ils sont rangés dans un ordre qui n’est point celui de l’édition Vulgate des Évangiles. On en tire cette conclusion que cette partie du canon est antérieure au travail de saint Jérôme qui a remis en ordre le texte des Evangiles en le corrigeant sur les exemplaires grecs. Cf. Martigny, Dictionnaire des antiquités chrétiennes, art. Canon de la messe.

Suivent les noms de douze martyrs, dont six pontifes, tous évéques de Rome, excepte saint Cyprien. La suite des trois premiers successeurs de saint Pierre est conforme au catalogue d’Hégésippe : le pape Clet y est donné