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1595 CANON DES LIVRES SAINTS 4596

étaient pour lui apocryphes et sans autorité. Reuss, op. cit., p. 351-356. Zwingle rejetait les uns et les autres. S. Berger, op. cit., p. 107-109. Le concile de Trente avait à se prononcer sur les erreurs des protagonistes de la Réforme. Or, quatre articles, extraits des œuvres de Luther, ont servi de base aux discussions préalables à la IVe session. Les deux premiers, concernant l’Ecriture, seule règle de la foi, et les livres deutérocanoniques, ont été condamnés par le décret De canunicis Scripturis. Sarpi, Hist. du concile ds Trente, 1. II, n. 43 ; Le Plat, Monumenta ad hist. conc. Tridents Louvain, t. iii, p. 386. Le concile avait donc à décider d’abord qu’elles étaient réellement les sources de la révélation, et il affirma que les vérités révélées se trouvent dans les traditions aussi bien que dans les Ecritures. Voir Tradition. Il devait déclarer quels livres rentraient dans le corps des Écritures et avaient une pleine autorité pour établir le dogme et la morale, et il adjoignit au décret un catalogue des Ecritures canoniques. Il avait enfin à définir que les traditions et les Écritures dans leur intégrité devaient être envisagées comme la règle objective de la foi et des mœurs, et il le fit en terminant son décret par une définition solennelle avec anathème contre les contradicteurs.

Nature et critérium de la canonicité des Écritures.

Dès le début de ses délibérations, le saint concile, légitimement assemblé sous la conduite du Saint-Esprit et présidé par trois légats du siège apostolique, résolut de déclarer sur quelles autorités il s’appuyerait pour affirmer les dogmes et condamner les hérésies. C’est pourquoi à la congrégation générale du 8 février 1546, on proposa de définir quels Livres saints étaient reçus dans l’Eglise. Theiner, Acta genuina ss. œcum. conc. Trident., in-4°, Agram, s. d. (1874), t. i, p. 49. Le concile entendait donc, en définissant la canonicité des Livres saints, déterminer le principe régulateur de la foi. Severolo, Diarium, dans Merkle, Concilium Tridenlinum, Fribourg-en-Brisgau, 1901, t. i, p. 28-29 ; Massarelli, Diarium II, III ibid., p. 434-473. D’ailleurs, le but, la teneur et la dernière clause du décret le montrent bien. Dans les congrégations particulières ou commissions, on examina, le 11 février, la manière dont on recevrait les Livres saints : serait-ce purement et simplement, ou en faisant étudier au préalable la question du canon par les théologiens en vue de résoudre les objections des adversaires ? Dans la 2e commission, présidée par le cardinal de Sainte-Croix, plus tard Marcel II, les avis furent partagés. Les uns voulaient qu’on étudiât les preuves de la canonicité des deutérocanoniques, non sans doute parce qu’on doutait de leur canonicité, mais plutôt parce qu’on voulait par là affermir la foi des simples et des ignorants. La majorité fut d’avis qu’on reçût les Livres saints purement et simplement. On ne revient pas sur les choses décidées et on peut renvoyer aux ouvrages des théologiens, de Jean Cochlée en particulier, pour justifier la canonicité des livres contestés. Theiner, op. cit., t. i, p. 49-51 ; Merkle, loc.cit., p. 30, 434, 478. A la congrégation générale du lendemain, le cardinal del Monte résuma les conclusions des congrégations particulières. Le concile reconnaissait deux sources de la révélation, l’Ecriture et les traditions, et admettait, comme le concile de Florence, tous les livres de l’Ancien et du Nouveau Testament. Après discussion, on fut unanimement d’avis de les recevoir purement et simplement, mais les divergences s’accentuèrent au sujet de savoir si on exposerait les preuves de la canonicité ; on ne put conclure et on renvoya la solution de cette question à la congrégation suivante. Elle eut lieu le 15 février. 16 Pères se prononcèrent pour l’indication des arguments favorables à la canonicité ; 24 furent pour leur omission. La majorité décida ainsi que les Livres saints seraient reçus sans examen ni discussion de preuves, mais par une simple énumération, comme avait fait le concile de Florence. Theiner, op. cit., t. I, p. 51-53 ; Merkle, loc. cit., p. 30-32, 434-435, 478-480. Les théologiens du concile, consultés à ce sujet le 28 février, émirent, eux aussi, des avis différents, qui n’influèrent pas sur la chose déjà jugée. Theiner, p. 54. Le concile se bornait donc à affirmer la foi de l’Église touchant l’autorité canonique des Livres saints ; il s’appuyait sur les décisions ecclésiastiques, rappelées par le cardinal de Sainte-Croix, et il suivait l’exemple des Pères orthodoxes ; aussi laissait-il aux théologiens le soin de justifier cette autorité contre les attaques des protestants.

Égale autorité reconnue à tous les livres canoniques.

Cependant, au cours des discussions, quelques Pères proposèrent d’établir une distinction entre les Livres saints. Le 11 février, à la seconde commission, l’évêque de Fano et le général des augustins opinèrent qu’il fallait distinguer les livres authentiques et canoniques, dont notre foi dépend, des livres simplement canoniques, bons pour l’enseignement et utiles à lire dans les églises. Cette distinction avait été faite autrefois par les Pères de l’Église, entre autres par saint Jérôme dans le Prologus galeatus. Mais cette distinction ne fut approuvée par aucun autre membre. A la congrégation générale du lendemain, le cardinal de Sainte-Croix exposa la distinction proposée dans la commission qu’il présidait. Il plaçait les Proverbes dans la seconde catégorie, La distinction résulterait du contenu des livres ; elle serait d’ailleurs très difficile à établir, n’ayant pas encore été fixée par l’Église, quoique saint Jérôme et saint Augustin en aient parlé. Le cardinal de Jæn s’y opposa. L’évêque de Fano concéda que, si elle était utile, elle n’était pas nécessaire. La majorité fut d’avis qu’il fallait l’omettre. La question ne serait pas tranchée ; elle serait laissée en l’état où les Pères l’avaient laissée. On approuverait les Livres saints sans distinction comme la tradition l’avait fait, et le général des servîtes ajoutait cette raison, que le concile ne voulait pas juger des choses sur lesquelles saint Jérôme et saint Augustin avaient été en désaccord. Theiner, op. cit., 1. 1, p. 51-52 ; Merkle, loc. cit., p. 30, 31, 32. Cette distinction, dans la pensée de beaucoup, portait non pas sur l’autorité canonique des Livres saints, mais plutôt sur la diversité de leur contenu. C’est pourquoi le livre des Proverbes était placé par le cardinal de Sainte-Croix dans la seconde catégorie. La diversité d’autorité canonique vint bientôt se greffer sur cette différence intrinsèque. A la congrégation générale du 15 février, on eut à examiner an aequaliter et pari reverentia omnes libri sacri recipiendi essent cum inter alios magna sit différentia. La majorité approuva leur réception pari pietatis affectu ; mais aucune décision ne fut prise. Theiner, p. 53 ; Merkle, p. 481. Aux congrégations particulières du 18 et du 23 février, on s’occupa spécialement des traditions, et on résolut de ne porter qu’un seul décret pour elles et pour les Ecritures. A la congrégation générale du 20 février, on désigna les députés qui rédigeraient ce décret. Le 22 mars, le projet de rédaction fut remis aux Pères du concile pour être examiné le lendemain dans les commissions. Theiner, p. 66 ; Merkle, p. 33-35, 435, 483-485, 490-493, 496-497. Le procès-verbal nous renseigne sur les discussions de la seconde commission. L’évoque de Castellamare voudrait faire quelque différence entre les livres reçus et les livres canoniques. L’évêque de Feltre lui oppose le canon du concile de Laodicée, qui nomme canoniques tous les livres de la Bible : De son côté, le général des augustins réclame la distinction des livres sacrés et des livres canoniques. Theiner, p. 68-69 ; Merkle, p. 522, 523, 534. A la congrégation générale du 27 mars, l’évêque de Fano renouvela sa critique des expressions : pari pietatis affectu, qui furent défendues et maintenues par les autres Pères. Le cardinal de Sainte-Croix réitéra son désir de voir établir la distinction des livres dogmatiques, édifiants ou simplement historiques. L’archevêque de