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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 2.2.djvu/207

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CARDINAUX — CARÊME


cardinaux présents à Rome, se renouvelaient jadis deux ou trois fois par semaine, et l’on y traitait presque toutes les affaires importantes ; ils sont devenus beaucoup plus rares et ne se tiennent qu’à des intervalles irréguliers. Us sont publics ou secrets. Aux premiers assistent, outre les membres du sacré-collège, d’autres prélats et des représentants des princes séculiers ; le pape préside en personne. C’est dans ces assemblées très solennelles qu’on promulgue, s’il y a lieu, les décisions prises en consistoire secret ; elles ont aussi pour objet ou occasion, une canonisation, la réception d’un ambassadeur, le retour d’un légat a latere. Les cardinaux seuls sont admis aux autres consistoires, et en cas d’empêchement du pape, c’est le doyen du sacrécollège qui dirige les débats. On y discute la création de nouveaux cardinaux, les nominations, confirmations, translations, renonciations et dépositions d’évêques, la désignation de coadjuteurs, la concession du pallium ou d’autres faveurs importantes, l’érection, la délimitation, l’union et la division des diocèses, les approbations d’ordres religieux, en un mot, toutes les causes qui intéressent grandement l’Église et qu’on appelle consistoriales. Les cardinaux n’ont que voix consultative ; quel que soit du reste leur avis, ils ne peuvent en refuser la manifestation au Saint-Père.

Mais les affaires ecclésiastiques sont trop nombreuses et trop variées, pour qu’il soit possible de les régler toutes dans des consistoires. On a senti depuis longtemps la nécessité de diviser une tâche si ardue et si compliquée. Voilà pourquoi on a établi diverses congrégations à chacune desquelles on a assigné un département spécial. On en compte jusqu’à douze. Voir Congrégations romaines. Toutes, le Saint-Office excepté, sont présidées par un cardinal, et c’est aussi dans le sacré-collège que sont pris leurs membres proprement dits, j’entends ceux qui ont voix délibérative.

7° Utilité du cardinalat et de son apparat extérieur.

— On comprend suffisamment, par ce qui précède, le rôle capital des cardinaux dans l’Église et l’utilité de leur institution. Ajoutez que la création des cardinaux choisis parmi le clergé des différentes nations établit des liens plus étroits entre elles et le centre de la catholicité, et assure au pape un précieux et légitime moyen d’inlluence sur les gouvernements. Chacun de ceux-ci tient avec raison à être représenté au sein du sacré-collège par un ou plusieurs de ses’sujets, et nous avons vu que, régulièrement, les grandes puissances catholiques ont à Rome un cardinal chargé de leurs intérêts religieux.

Les cardinaux sont les princes de l’Église, sa plus haute noblesse. Le rang qu’ils tiennent dans la hiérarchie ecclésiastique, immédiatement au-dessous du pontife suprême, le respect de leur dignité dont l’éclat rejaillit sur le saint-siège, les relations nécessaires qu’ils ont ou peuvent avoir avec les princes séculiers, dont ils sont réputés les égaux, les mettent dans la nécessité de s’entourer d’un certain apparat ; il ne leur est pas loisible de se départir d’un train convenable. On aurait tort de considérer comme un luxe superflu ce qui est exigé par les bienséances sociales et concourt en définitive au prestige de la religion. Depuis l’usurpation de Rome par l’Italie, 1rs cardinaux romains paraissent beaucoup moins en public qu’auparavant ; force leur a été aussi de diminuer considérablement leur état ; mais cette diminution, qui prive le saint-siège d’un relief aussi légitime qu’utile, n’est qu’un des maux nombreux que l’invasion a causés à l’Kglise de Dieu.

r ir la partie historique, Thomassin, Vêtus et nova disciplina, part. 1 ; Phillips, Kirchenrecht, t. vi ; Hinschius, System des a Kirchenrecht*, Berlin, 1869, t. i ; Martlgny, Dictionnaire des antiquités chrétiennes, 2e édit., Paris, 1877, art. Titres, p. 758-760. — Pour la partie canonique, outre les ouvrages cités de Phillips et de Hinschius, Fcnuiis, Prompta bi bliotheca, art. Cardinales, Mont-Cassin, 1845, t. ii, p. 193-237 ; Bouix, Tractatus de curia romana, Paris, 1859, p. 5-141 ; J. Devoti, Institutiones canonicx, t. i ; Wernz, Jus decretalium, Rome, 1899, t. Il : Sâgmûller, Lehrbuch des katholischen Kirchenrechts, Fribourg-en-Brisgau, 1902, part. II ; Grimaldi, Les Congrégations romaines, Sienne, 1890 ; Bangen, Die rœmische Curie, Munster, 1854 ; Battandier, Annuaire pontifical catholique, 1898, p. 48-53 ; 1899, p. 88-92 ; G. A. Bouvier, Notes on cardinals and their insignia, dans Month, mai 1904. Cf. U. Chevallier, Répertoire. Topo-bibliographie, col. 581-583.

J. FORGET.

    1. CARÊME (Jeûne du)##


CARÊME (Jeûne du). Vu l’étendue et la complexité du sujet, nous suivrons en l’exposant l’ordre chronologique, combiné, autant que possible, avec l’ordre logique. Nous distinguerons, dans les observances du jeûne antépascal, cinq époques : I. La première comprendra les trois premiers siècles, où l’on n’aperçoit pas trace du carême proprement dit. IL La seconde va du IVe au VIIe siècle, pendant lesquels le jeûne quadragésimal n’a qu’une durée de trente-six jours. III. Le jeûne de quarante jours apparaît au VIIe siècle et va se répandant jusqu’au IXe, époque où il triomphe à peu près partout. IV. Puis vient la période du moyen âge avec ses adoucissements aux rigueurs du carême primitif. V. Enfin arrivent les temps modernes, remarquables surtout par le régime des dispenses qui devient général dans l’Eglise. Quant aux usages de l’Église grecque à partir du schisme, nous les laissons de côté ; il y aura lieu de les exposer ailleurs. Voir Constantinople [Eglise de).

I. Première période : i er -me siècles (jeune antépascal). — Le plus ancien document connu touchant le jeûne préparatoire à la fête de Pâques provient de la Gaule ; il date de la fin du IIe siècle et a pour auteur saint Irénée, évêque de Lyon. La controverse pascale, agitée entre le pape Victor et les évêques d’Asie, en fut l’occasion. Saint Irénée fait observer que la question concernait non seulement le jour de la célébration de la Pâque, mais encore le jeûne qui s’y rattachait. Sur ce dernier point les docteurs étaient aussi en désaccord. « Les uns pensaient qu’il fallait jeûner un jour, les autres deux, d’autres trois, d’autres enfin donnaient à leur jeûne une durée de quarante heures. » Eusèbe nous a transmis ce texte, H. E., v, 2, P. G., t. xx, col. 501, que Rufin, dans sa traduction, a dénaturé. Cf. ibid., col. 502, note 78. Le mot « quarante » lui a fait penser à un jeûne de quarante jours. C’est évidemment la discipline de son temps qui lui a suggéré ce contre-sens. Il n’y a pas lieu d’en tenir compte. Voir sur ce point EunJi, Die Enlwickelung des Osterfalsrns, dans Kirchengeschichtliche Abhandlungm und Untersuchungen, Paderborn, t. I, p. 243-248. Selon la remarque de M9 r Duchesne, Origines du culte chrétien, 2e édit., p. 231, le jeûne dont parle saint Irénée, qu’il soit d’un jour ou plus, doit s’entendre d’un jeûne unique et ininterrompu. Les textes qui vont suivre justifieront cette interprétation.

En combinant divers passages de Tertullien, De jejuniis, c. ii, xin-xv, P. L., t. ii, col. 956, 971, 973, 971, nous pouvons déterminer l’usage africain du commencement du iii c siècle. Les montanistes jeûnaient deux semaines par an, à la réserve du samedi et du dimanche, et Tertullien reproche aux catholiques, aux « psychiques >>, comme il parle, de ne pas les imiter. Dans les deux semaines il laut sans nul doute comprendre la semaine de Pâques. Les catholiques jeûnaient d’un seul trait le vendredi et le samedi saints, en raison du commandement du Seigneur, à cause de la disparition de l’Époux : dies quibia ablatus est sponsus. (".’est, si l’on en croit Tertullien, le seul jeûne proprement imposé par l’Eglise. Cependant les « psychiques » observaient aussi des espèces de demi-jetïnes, les jours de station, c’est-à-dire le mercredi et le vendredi en général, se contentant de pain et d’eau, au gré de chacun ; Citra illos dies qttibus ablatus est sponsus, el statto-