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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 2.2.djvu/291

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1891
1892
CATÉCHÈSE


Cyrille et Méthode, en Danemark avec saint Anschaire, et, à partir de la fin du Xe siècle, en Suède et en Norvège, en Pologne, en Hongrie et en Russie. Sans dépasser ici inutilement le règne de Charlemagne, il faut rechercher la méthode suivie par saint Patrice († 460) chez les Irlandais, par saint Colomban († 573) chez les Pietés et les Scots, par saint Augustin de Cantorbéry († 608) chez les Anglo-saxons, par saint Amand et saint Eloi (f658) chez les Francs austrasiens, par saint Gall (f vers 627) chez les Alémans de la Suisse, par saint Kilian (vers 689) en Thuringe, par saint Rupert en Bavière, par saint Wilfrid († 700) et saint Willihrord (f vers 739) dans la Frise, et par saint Boniface (f755) dans la Saxe et les pays environnants.

Malheureusement il ne nous est resté aucune catéchèse de cette époque, sans doute parce que, prêchant en langue vulgaire, les missionnaires d’alors ne prirent pas soin de rédiger en latin les discours qu’ils adressaient aux païens et aux catéchumènes, comme ils le firent pour quelques homélies, adressées à des chrétiens, dans le but de les mettre entre les mains du clergé, à titre de modèle ou de manuel de prédication. Nous en sommes donc réduits aux conjectures. Cependant, ce qui rend ces conjectures très vraisemblables, c’est que ces missionnaires ont dû naturellement s’inspirer de l’expérience déjà acquise ailleurs ainsi que des traditions introduites dans l’Église parle catéchuménat. Le milieu, il est vrai, différait, mais l’obstable à vaincre était toujours le paganisme et ses superstitions. De ce côté la catéchèse ne pouvait procéder tout d’abord que par la démonstration de l’erreur païenne, sauf à ne pas trop heurter de front ces natures farouches et susceptibles. Des ménagements s’imposaient. Et si trop souvent, contrairement aux sages prescriptions de l’Église, la force brutale intervint pour obliger les peuples vaincus à accepter le joug de la foi, il était facile de prévoir combien éphémères devaient être de pareilles conversions. Mieux valait incontestablement user d’une sage modération et ne recourir qu’aux procédés ordinaires de la persuasion évangélique, en appuyant l’enseignement donné sur l’autorité de l’exemple, la sainteté de la vie et l’efficacité du dévouement ; et c’est ce à quoi ne manquèrent pas, en général, la plupart des missionnaires. Mais ayant alfaire à des caractères droits, à des natures généreuses et enthousiastes, ils se hâtèrent parlois d’admettre les catéchumènes au baptême sans une préparation intellectuelle suffisante pour des esprits aussi peu cultivés. La catéchèse préparatoire devait contenir cependant le strict nécessaire des vérités à croire el îles devoirs à pratiquer pour devenir chrétien ; mais elle était si promptement oubliée que quelques-uns de ses éléments essentiels n’étaient plus connus après le baptême et que des ordres furent donnés en conséquence, à plusieurs reprises, pour enseigner, par exemple, aux nouveaux baptisés, l’objet du triple renoncement au démon, à ses pompes et à ses œuvres, et pour leur faire apprendre par ca’ur la formule du symbole des apôtres et de l’oraison dominicale.

Iiu reste, voici, d’après les documents contemporains,

les quelques indications sommaires qui permettent de

reconstituer à peu de ebose près la catéchèse d’alors, et

de constater que la plupart des éléments de la catéchèse

apostolique et patristique s’y retrouvent. C’est, en effet,

eu premier lieu, la condamnation de l’idolâtrie sous

toutes ses formi b, et l’on sait combien elle était profon dément enracinée dans ces races pietés, saxonnes, ger maniques. S ; jint Kloi énumère un grand nombre de

superstitions, Vita S. Eligii, II, xv, P. L., t. i.xxxvii,

col. 524-650 ; et le concile de Leptines, 743, en compte

une trentaine « fins son Indiculut superstitionum et

uni, P. L-, t. i.xxxix, col. 810 sq. ; Ilardouin,

concil., t. m. col. 92-2 ; Hefele, Histoire des coiv . t. iv, p. 107. Cf. Ralramne, P. /-., t. cxxi, col. 1153.

C’est ensuite la proclamation de l’existence d’un Dieu unique, créateur du ciel et de la terre, envoyant son fils pour sauver les hommes, avec un abrégé de l’histoire religieuse du monde et de l’économie de la rédemption. C’est aussi le rôle du baptême, les renoncements et les engagements qui précèdent sa collation, la liste plus ou moins détaillée des fautes à éviter et des devoirs à remplir. Et c’est enfin la question des fins dernières, du jugement général et de la sanction des récompenses ou des peines éternelles.

Saint Augustin, envoyé par saint Grégoire le Grand, prêche l’Évangile au roi anglo-saxon, Ethelbert, le convertit et le baptise avec une multitude des siens à Cantorbéry, le jour de Noël 597, comme saint Rémi avait baptisé Clovis et ses Francs, à pareille fête, un siècle auparavant. Bède, Hist. cccles., I, xxv, P. L., t. xcv, col. 55. Le pape, félicitant son missionnaire de ce que la nation des Angles, dégagée des ténèbres de l’erreur et éclairée des lumières de la foi, a embrassé le christianisme, laisse entendre quelle fut la méthode catéchétique de saint Augustin. Epist., t. XI, epist. xxvii, P. L., t. lxxvii, col. 1139.

Quelques années plus tard, en 624, Boniface V écrit à Edwin, roi saxon du Northumberland encore païen, pour l’engager à embrasser la foi de sa femme Edelburge et à se faire chrétien. Sa lettre est un programme de catéchèse. Inanité des idoles, importance de croire en un Dieu créateur, qui a envoyé son fils unique pour sauver le genre humain, nécessité d’embrasser l’Évangile et de renaître par le baptême, tels sont les principaux points qu’elle traite. Epist., iii, P. L., t. lxxx, col. 438. Le roi rassemble ses chefs et ses prêtres ; et le pontife des idoles, Coïf, constate franchement l’inutilité du culte païen et affirme qu’il serait sage d’accepter une religion qui enseigne d’où nous venons et où nous allons. Bède, Hist. eccles., II, xui, P. L., t. xcv, col. 104. La question de l’origine et de la destinée humaine devait donc faire partie de la catéchèse adressée aux Anglo-Saxons.

En 634, le roi Oswald, voulant convertir les provinces de son royaume restées idolâtres, s’adresse à des religieux scots. L’un de ceux-ci, Corman, avait rebuté les Angles par ses austérités. « Vous avez été trop sévère auprès de ces ignorants, lui fait remarquer un vieillard, Aedan ; vous auriez dû, selon la discipline apostolique, commencer par leur offrir le lait d’une doctrine plus douce jusqu’à ce que, nourris peu à peu du Verbe divin, ils eussent été à même de comprendre un enseignement plus parfait et de s’élever à la pratique des commandements du Seigneur. » Bède, Hist. eccles., III, v, P. L., t. xcv, col. 124. Ici, c’est la catéchèse apostolique qu’on invoque et dont on suppose l’emploi ordinaire.

Saint Eloi, au rapport de saint Ouen, touchait si bien le cœur des barbares que, chaque année, à Pâques, il donnait le baptême à des foules de catéchumènes. Vita Eligii, II, viii, P. L., t. i.xxxviii, col. 513. Or, parait-il, il détachait peu à peu le peuple bercé de fables de ses croyances païennes et de ses pratiques superstitieuses, lui parlait du seul vrai Dieu, créateur, lui inspirait la crainte des châtiments futurs et lui montrait les récompenses éternelles, dont il n’avait pas jusqu’alors le soupçon. Vita, II, xv, ibid., col. 524-550. Il utilisait trop bien les œuvres de saint Césaire pour avoir ignoré celles de saint Augustin ; son discours rappelle à la fois les Deux voies de la Didaché et la catéchèse du De catechizandis rudibus.

Saint Gall, dans un discours prononcé sur les bords du lac de Constance, semble également faire écho à la narratio de suint Augustin : c’est un résumé de l’histoire religieuse du monde depuis la chute jusqu’à la rédemption par la croix de Jésus-Christ, traitant de la mission des apôtres, de la vocation des gentils et de la constitution divine de l’Église, arche du salut. Scrm.,