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CHARITE


diate du mérite, Sum. theol., I a, q. xii, a. 6 ; I a II 10, q. cxiv, a. 4 ; Il a II*, q. cxxiv, a.2, ad 2um ; q. CLXXXii, a. 2, Quæst. disp., Depotentia, q. vi, a. 9 ; De malo, q. il, a. 5, ad 7um, sens dès lors communément admis par les théologiens scolastisques.S.Bonaventure.7/i/FSe « t, t. II, dist. XLI, a. J, q.iu, Quaracchi, 1883, t.n, p.916 ; Denys le chartreux, In IV Sent., t. II, dist. XL, q. iii, Venise, 1584, p. 574 sq. ; Bellarmin, De juslificatione, t. V, c. xv ; Sylvius, In 7/ am ll x, q. cxiv, a. 4, q. ii, concl. 2, Anvers, 1714, t. ii, p. 801 sq. ; Gonet, tr. IX, De juslificatione impii, disp. II, a. 6, Anvers, 1744, t. iv, p. 169 sq. ; Salmanticenses, Cursus theologicus, tr. XVI, De merilo, disp. IV, n. 3 sq. ; Gotti, In 1™ 11* et 11™ 11*, tr. VIII, De merilo justi, q. ii, dub. 4, Venise, 1750, t. ii, p. 401’sq.

b. Les arguments théologiques communément invoqués sont l’interprétation des textes scripturaires et patristiqueset l’analyse du concept théologique de l’acte méritoire. Les textes scripturaires et patristiques ne peuvent s’entendre uniquement de la nécessité de la charité hahituelle ou du simple état de grâce. Sinon, tout acte moralement hon accompli en cet état devrait assurer la possession du mérite surnaturel. D’ailleurs plusieurs textes requièrent explicitement que l’acte couronné par le mérite soit vraiment accompli pour Dieu. Ce qui suppose une intention agissant au moins irtuellement sur l’acte lui-même et le dirigeant positivement vers Dieu comme fin dernière. Or Dieu n’est réellement voulu pour lui-même comme fin dernière que par l’acte de charité parfaite. Par eux-mêmes les actes des autres vertus tendent principalement à notre propre bien quoique dans les limites permises, comme [’acte d’espérance, ou à quelque autre bien aimé ou recherché suivant l’ordre divinement établi, comme les actes des vertus morales. Ce qui ne suffit point pour sauvegarder pleinement le sens du texte scripturaire propter Deuni. L’analyse théologique de l’acte méritoire conduit à la même conclusion. Principalement fondé sur l’ordre providentiel, le pouvoir de mériter doit en uiéiiie temps résider dans l’acte lui-même, par une véritable proportion intime avec la divine récompense qui doit être son couronnement. S. Thomas, Sum. theol., Ia-IIæ, q. exiv, a. 1, 3. Pour que se réalise celle intime proportion, l’acte doit procéder d’une volonté conforme à la volonté divine et voulant le même bien auquel Dieudirige tous les mérites. Ce que réalise seul l’acte de charité parfaite, par lequel on aime le souverain bien pour lui-même et par-dessus tout. S. Thomas, loc. cit., a. 4.

c. Ces principes théologiques conduisent aux conclusions suivantes. — a. Tout en maintenant à l’acte de charité parfaite l’exclusif privilège d’assurer la possession du strict mérite surnaturel, l’on doit attribuer aux actes produits par les autres vertus sous l’influence de la charité, un mérite propre et intrinsèque, distinct de celui que possède l’acte élicite ou immanent de charité. A une double activité de la charité doit correspondre une double perfection morale, conséquemment un double mérite. Cette double activité est réelle. L’une a pour terme l’acte immanent par lequel la volonté s’unit allectivement à Dieu aimé pour lui-même et par-dessus tout. La seconde activité, dont le but est de diriger vers le bien infini les autres actes de la volonté ou ceux des autres puissances, communique à ces mêmes actes une nouvelle perfection ou qualité morale, à laquelle doit,

Identiel, correspondre un nouveau

m’ni’- proportionnel. Mérite foncièrement attribuable à la charité immanente qui en est la source première. Cependanl mérite immédiatement dû â la charité’dérivée ou participée, inhérente à l’acte lui-même, comme qualit’1 morale surajoutée et vraiment devenue sienne. Ainsi tout acte de vertu accompli sous l’influence de la charité suppose trois milites distincts : un premier mérite sur naturel strict, provenant de l’acte immanent de charité ; un second mérite également strict, provenant de la nouvelle qualité morale que donne à l’acte de vertu l’intime participation de charité ; un troisième mérite donnant à ceux qui obtiennent la gloire céleste un droit proportionnel à une augmentation de récompense accidentelle. Saint Thomas reconnaît explicitement le premier et le troisième mérite. Sum. theol., Ia-IIæ, q. exiv, a. 4 ; Quæst. disp., De potentia, q. vi, a. 9. Il affirme implicitement le second en attribuant aux actes vertueux commandés par la charité un mérite propre dû à l’inlluence de la charité. Et ideo merilum vilæ œternæ primo perlinet ad caritatem, ad alias au le ni virtutes secundario, secundum quod earum actus a carilale imperantur. Ia-IIæ, q. exiv, a. 4 ; IIa-IIæ, q. cxxiv, a. 2, ad 2° m ; Salmanticenses, Cursus theologicus, tr. XIX, De cari ta te theologica, disp. IV, n. 22 sq. — (3. Tout en affirmant que l’acte de charité parlaite est immédiatement ou médiatement l’unique cause du strict mérite surnaturel, l’on ne nie point que la perlection morale objective d’un acte particulier ne doive entrer en ligne de compte. Autre est la perfection objective du martyre ou d’un acte héroïque longtemps continué, autre celle d’un acte en lui-même de minime importance, bien qu’accompli avec une charité très intense. La charité peut sans doute croître en intensité à raison des obstacles à surmonter ou de la simple continuité d’un pénible ell’ort. Mais même sans accroissement intensif, l’acte de charité peut recevoir une nouvelle perfection morale, provenant de l’objet ou des circonstances, et à raison même de cette spéciale perfection à laquelle il communique sa propre dignité, mériter un accroissement de récompense. Dans l’une et l’autre hypothèse l’on doit affirmer avec saint Thomas : Opus aliquod potest esse laboriosum et difficile ex magnitudine operis et sic magnitudo laboris pertinet ad augmentant meriti et sic caritas non diminuit laborem, imo facit aggredi opéra niaxima. Sum. theol., I a IIe, q. exiv, a. 4, ad 2um ; Salmanticenses, loc. cit., tr. XVI, disp. IV, n. 27 sq.

— y. L’inlluence de la charité sur l’acte qu’elle rend méritoire doit être suffisamment agissante pour donner à l’acte lui-même une intime proportion avec la récompense surnaturelle. A cette fin, une intention purement habituelle ne peut suffire quand elle n’est que le résultat de la possession de la grâce sanctifiante ou d’une intention non révoquée, mais entièrement ineffective. D’aulre part, une intention immédiatement actuelle ne peut être requise, car elle n’est point toujours en notre pouvoir, et elle n’est point toujours nécessaire pour l’effective production d’un acte. Il suffit donc que la charité une fois produite par la volonté continue son inlluence virtuelle sur la direction de l’acte. La durée de celle inlluence est assez variable dans les cas particuliers, suivant l’intensité de l’acte initial, suivant la générosité des dispositions habituelles, la force des obstacles contraires, et la nature des secours divins. Il est

me’possible que l’influence de la charité ne s’exerce

point sur l’acte entier dans toutes ses circonstances et dans toute sa durée. Pratiquement, une âme soucieuse d’accroître sa récompense éternelle devra fréquemment renouveler et perfectionner cette intention de charité dans toute sa vie habituelle.

5 ?e opinion attribuant le pouvoir de mériter ù tout acte surnaturel accompli en état de grâce. — a) Elle prend sa base scripturaire principale dans les textes qui attribuent la récompense éternelle a des actes autres que la charité, comme l’humilité, Mat th., xiii.. la pauvreté volontaire, Maiih.. xix, 29, et les bonnes œuvres les plus variées. Matth., xxv, 35 si|. Textes qui doivent être cependant entendus en ce sens que ces actes sont airement surnaturels au moins dans leur motif, car un acte purement naturel n’aurait point avec l’éternelle récompense cette proportion qu’exige la notion