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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 2.2.djvu/73

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CANADA (CATHOLICISME)


timait à 7000 en 1672) obligea le prélat à créer, en dehors de Québec, un certain nombre de cures ou missions avec un prêtre résidant. La visite pastorale de 1681 en compte 25 de ce genre. Il fallait pourvoir à la subsistance des pasteurs, non seulement pour le présent, mais pour l’avenir ; établir une organisation qui leur permît de compter sur des émoluments réguliers et suffisant à leur entretien. Jusque-là, en effet, les habitants avaient été desservis par des missionnaires et des religieux qui acceptaient ce qu’on leur offrait, mais sans rien exiger. Le prélat imposa la dime. Un acte de 1663 la fixa au 13e ; plus tard, elle fut réduite au 26e des récoltes (1679), le roi devant suppléer au reste. Cette dime, aux termes de l’acte de 1679, n’était payable qu’aux curés fixes et perpétuels. En fait, les curés ne furent qu’exceptionnellement inamovibles. Ajoutons qu’à cette époque, sans y être rigoureusement obligé, tout le clergé faisait partie du séminaire, qui constituait une sorte de corporation, et lui abandonnait ses revenus ecclésiastiques et souvent même ses biens de famille, à charge pour le séminaire de pourvoir à l’entretien de ses membres en santé et en maladie. Le séminaire, de concert avec l’évêque, choisissait parmi ses prêtres les desservants des paroisses et les missionnaires. Abbé Gosselin, Vie de M9 r de Laval, 2 vol., Québec, 1890 ; Id., Le Vénérable François de Montmorency-Laval, Québec, 1901.

Le mouvement des missions ne s’était pas ralenti entre 1660 et 1680. Tandis que le P. Ménard, jésuite, évangélise les Outaouais, le P. Allouez pénètre jusqu’au lac Supérieur et y fonde deux missions (1665), les PP. d’Ablon et Marquette plantent la croix au Sault-Sainte-Marie. D’autres jésuites, se joignant aux explorateurs Saint-Lusson et Cavelier de la Salle, prennent possession des rives du lac Huron, et deux ans après (1672), le P. Albanel s’enfonce, en passant par le lac Saint-Jean, jusqu’aux rives de la baie d’Hudson. Les missions chez les Iroquois, abandonnées pendant les expéditions de 1665-1666, furent reprises, mais sans grand succès. A la date de 1669 remonte la fondation de la mission sédentaire de la Prairie de la Madeleine, au sud de Montréal. Là fleurit, sous la direction des jésuites, une chrétienté qui donna des modèles de foi et de piété : là s’épanouit le lys du Canada, cette Catherine Tegakouita, morte à 23 ans et dont le IIIe concile de Baltimore a demandé que l’on introduisit la cause. Cette chrétienté, transférée au Sault-Saint-Louis (aujourd’hui Canghnawaga), est encore florissante (elle compte plus de 2000 âmes) et après bien des vicissitudes est revenue entre les mains des jésuites (1902). Notons aussi que c’est du Canada que partirent L. Jolliet et le P. Marquette pour la découverte du Mississipi (1673). Récit des voyages et découvertes du P.J. Marquette, NewYork, 1855 ; HeubenGold Thwaites, Father Marquette, in-12, New-York, 1902.

Lés sulpiciens n’avaient pas attendu jusqu’à cette époque pour s’adonner à l’apostolat des sauvages. Dès leur arrivée ils avaient évangélisé ceux que la chasse, le commerce ou un attrait pour la « prière » amenaient à Ville-Marie. Deux il leurs missionnaires, MM. Vignal et Lemaltre, étaient tombés sous les coups des Iroquois. Les missions sulpiciennes lointaines commencent avec MM. Trouvé el de Salignac-Fénelon, frère de l’illustre archevêque de Cambrai, qui fondèrent celle de la baie de Kenté (1668) au point où le lac Ontario se déverse dans le Saint-Laurent. Durant les quatorze années de son existence, elle lui un foyer d’où la foi rayonna dans toutes les contrées environnantes jusqu’à Niagara.

En 1669, M. Dollier de Casson et M. Bréhan de Galli-Qée partirent de Ville-Marie avec Cavelier de la Salle, résolus a pousser à l’ouest jusqu’au Mississipi. Bientôt abandonnés du découvreur, les sulpiciens traversent les lacs Ontario, Érié, Huron, visitent les contrées avoi sinantes, remontent jusqu’au Sault-Sainte-Marie et rentrent à Montréal après avoir pris possession au nom du roi des pays parcourus. M. de Gallinée a écrit une relation et tracé une carte de cette expédition. Cf. Paillon, Hist. de la colonie française en Canada, t. iii, p. 284 sq. ; Margry, Découvertes et établissements des Français dans l’Amérique septentrionale, Paris, 1879-1881, t. i ; Harris, History of the early Missions in Western Canada, Toronto, 1893.

Signalons encore les missions sulpiciennes de la « Montagne », de Gentilly et de l’Ile-aux-Tourtes, situées dans les environs de Montréal. La première, qui s’élevait sur l’emplacement actuel du grand séminaire, fut transportée au Sault-au-Récollet, puis, au xviiie siècle, sur les bords de l’Ottawa, au lac des Deux-Montagnes, à dix lieues à l’ouest de Montréal où elle existe encore aujourd’hui desservie par les sulpiciens.

Pour subvenir aux dépenses des missions et des paroisses fondées autour de Montréal, les supérieurs de Saint-Sulpice n’envoyaient au Canada que ceux de leurs sujets dont les revenus patrimoniaux suffisaient à leurs voyages et à leur entretien. Cette règle fut observée jusqu’en 1760.

Les récollets, de retour au Canada, depuis 1670, s’établirent à Québec et eurent quatre missions : Trois-Rivières, l’île Percée (Gaspésie), la rivière Saint-Jean et le fort Frontenac, sur le lac Ontario. En 1682, M. Dollier de Casson les appela à Montréal. Plus tard, M9 r de SaintVallier leur confia les missions du Cap-Breton et de Plaisance à Terreneuve.

Tandis que les missions se poursuivaient ainsi, M3 r de Laval avait obtenu (1 er octobre 1674) de Clément X l’érection de Québec en évèché, confirmé l’union du séminaire de Québec avec celui des Missions étrangères de Paris (1676), lutté avec énergie contre le gouverneur de Frontenac et l’intendant Talon pour le maintien des droits de son Église et pour l’extirpation du trafic de l’eau-de-vie, érigé un chapitre de chanoines, organisé le système des cures et des dessertes. Cl. Le Vénérable François de Montmorency-Laval, par l’abbé Casgrain, Québec, 1901 ; Le comte de Frontenac, par H. Lorin, Paris, 1895 ; Jean Talon, intendant de la Nouvelle-France (1665-1672), par Th. Chapais, Québec, 1904. Ses dissensions avec Frontenac avaient engagé Louis XIV à rappeler celui-ci (1682) et à le remplacer par de la Barre. Le nouveau gouverneur, au lieu de gagner les Iroquois par de bons procédés, comme avait fait son prédécesseur, fit contre eux une expédition malheureuse (1684) qui devait peu après amener la ruine des missions ".hei les Cinq-Nations. En 1684, Mo r de Laval porta sa démission au roi. Son séjour en France se prolongea jusqu’en 1688. Quand il revint, son successeur, Mur j e Saint-Vallier, avait déjà pris la direction de son Eglise. Le vieil évéque vécut encore vingt ans (1688-1708) et mourut avec la réputation d’un saint. Deux siècles plus tard (23 mai 1878) son corps fut transféré de la cathédrale dans la chapetie du séminaire où il avait souhaité reposer. A la suite de cette fête, une supplique fut adresée aux évoques du Canada en vue d’obtenir du saint-siège l’autorisation d’introduire la cause de M9 r de Laval. Tous y consentirent et un premier procès fut soumis à l’approbation de Léon XIII. M’.i r H. Têtu, Les évoques de Québec, Québec, 1889.

Avant de passer à la période qui s’ouvre avec Ms » de Saint-Vallier, rappelons que Colbert et l’intendant Talon rendirent d’immenses services à la colonie el à l’Eglise naissantes en provoquant un vigoureux courant

d’émigration vers le Canada. Entre 1665 el 1680 il vint au Canada plus de colons que n’en avait amené le demisiècle précédent. Ce qui est mieux, on lui sévère dans le choix des jeunes filles à envoyer, tant au point de vue moral qu’au point de vue physique. On écarta merci les personnes dont les mœurs eussent pu devenir