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BAPTÊME D’APRÈS LE CONCILE DE TRENTE


proprement dite. Le concile impose cette doctrine sous la menace de l’anathème. De ce que le texte porte : « chez les baptisés, la concupiscence n’est plus un péché, » quelques théologiens ont conclu qu’elle l’était, d’après le concile, chez ceux qui n’ont pas reçu le sacrement. Bossuet, Défe/ise de la tradifton, l.VIII, c.XXVH, Besançon, 1836, t. viii, p. 137-138. Cette interprétation n’est pas communément acceptée, et l’histoire de la rédaction du décret sur le péché originel prouve qu’elle ne peut pas l’être. Le canon 5e est consacré à décrire les effets du baptême, le concile ne s’occupe donc en le composant que de la concupiscence chez les baptisés, il n’a pas l’intention de dire ce qu’elle est chez l’infidèle. Voir Concupiscence et Péché originel.

b. Péchés actuels. — Le concile avait professé sa foi en un seul baptême pour la rémission des péchés. Sess. III. En parlant du pardon de la i„ute originelle, il avait employé des expressions qui laissaient entendre qu’avec elle disparait toute autre faute, chez les baptisés : Par ce sacrement l’homme revêt le Christ, sess. V, can. 3 ; tout ce qui a le caractère de péché est enlevé, can. 5. Sans doute, ici, il s’agit directement de la faute originelle, mais cette rémission complète paraît entraîner le pardon des autres fautes. D’ailleurs, voici qui est décisif : chez l’homme régénéré, Dieu ne hait rien, il n’y a en lui aucun sujet de condamnation, il est innocent, sans souillure, pur, irrépréhensible…, rien ne peut retarder son entrée au ciel. Sess. V, can. 5. Cet enseignement est encore répété à la session VIe : l’adulte pour être justifié doit haïr ses péchés ; ils seront donc remis. Sess. VI, c. vi. La cause instrumentale de la justification, c’est le baptême ; cette justification n’est pas seulement le pardon des péchés…, par elle, d’injuste l’homme devient juste, d’ennemi de Dieu, son ami. Sess. VI, c. vu. Enfin, la définition la plus claire est celle-ci : Dans le baptême, l’homme reçoit, pleine et entière rémission de tous ses péchés. Sess. XIV, c. ii. C’estlaconfirmation de l’enseignement d’Eugène III, Décret, pro Armenis, Denzinger, n. 591.

c. Peines dues au péché. — A plusieurs reprises, le concile, pour montrer la différence qui existe entre le sacrement de baptême et celui de pénitence, déclare que par la régénération spirituelle, l’homme obtient condonation de toutes les peines dues à ses péchés. Voulant légitimer la satisfaction requise de la part du chrétien qui reçoit l’absolution, le concile dit : « La justice divine paraît exiger que Dieu ne reçoive pas en grâce aux mêmes conditions l’infidèle et le pécheur baptisé. » Sess. XIV, c. VIII. Le baptême accorde pleine et entière rémission de tous les péchés : rénovation à laquelle on ne peut arriver par le laborieux baptême de la pénitence qu’au prix de larmes et d’efforts considérables. Sess. XIV, c. il. Mais ce ne sont là que des insinuations. A la session VIe, le concile répète l’affirmation d’Eugène III, Décret, pro Armenis, Denzinger, n. 591 : dans le baptême, toute la peine temporelle est remise. Sess. VI, c. xiv. Aussi rien ne peut retarder l’entrée au ciel du baptisé. Sans doute, cette dernière proposition est surtout dirigée contre l’erreur de Luther déjà condamnée par Léon X. Bulle Exsurge, Denzinger, n. 627 : ci La concupiscence retarde pour l’âme le moment de l’entrée au ciel, » mais, du même coup, elle laisse entendre que le sacrement remet toutes les peines dues au péché.

b) Par le baptême l’homme est sanctifié. — Dans un même développement, le concile définit que le baptcrne est cause instrumentale de la justification et que cette justification comprend non seulement la rémission des péchés, mais le renouvellement de l’homme intérieur par l’acceptation volontaire de la grâce et des dons. Sess. VI, c. vu. Cette phrase ne peut s’appliquer qu’aux adultes, mais il en est d’autres qui expriment la même idée et peuvent convenir à tous les baptisés. Ainsi, ’il est enseigné que les catéchumènes, et ici la phrase est absolument générale, revêtent l’homme nouveau, créé à l’image de Dieu, sont devenus non seulement innocents, etc., mais chers à Dieu. Sess. V, can. 5. De même, après avoir défini la justification, « un passage de la condition de fils d’Adam « l’état de grâce et à celui de fils adoptif de Dieu, » le concile ajoute, et ici encore le texte est général : ce changement ne peut se {aire que par le baptême. Sess. VI, c. iv. Ailleurs on lit : »i les hommes ne renaissent, ils ne seront pas justifiés : cette renaissance leur accorde la grâce qui les rend justes. Sess. VI, c. ni. Enfin, le concile parle de la grâce de justification reçue dans le baptême, sess. VI, c. xiv, de la justice obtenue dans ce sacrement. Sess. XIV, c. i.

Ce n’est pas le lieu de dire en quoi consiste cette sanctification positive. Voir Justification. Ici nous ne ferons que citer, sans les approfondir, les déclarations du concile sur l’état du baptisé. Il reçoit la grâce, sess. VI, c. iii, xiv ; passe à l’état de grâce. Sess. VI, c. iv. Il est sanctifié, sess. VI, c. vu ; juste, c. m ; reçoit la justice vraie et chrétienne, la justice par laquelle Dieu le renouvelle et le rend vraiment juste. Sess. VI, c. vu. Aussi est-il devenu l’ami de Dieu, sess. V, can. 5 ; son fils adoptil, sess. VI, c. iv ; son temple. Sess. VI, c. xiv ; sess. XIV, c. vin. Enfin, il obtient les dons, sess. VI, c. vu ; le don du Saint-Esprit, sess. XIV, c. vin ; les vertus infuses de foi, d’espérance, de charité. Sess. VI, c. vu.

Est-il défini que ces vertus infuses de foi, d’espérance et de charité sont accordées à tous, même aux enfants ? On pourrait hésiter un instant à le dire, sous prétexte que le chapitre dans lequel est affirmée la collation de ces dons parle de leur réception volontaire, et par conséquent ne peut s’appliquer qu’aux adulles. La difficulté n’est qu’apparente. Le concile, pour prouver que ces vertus sont accordées, constate que le rituel fait demander par le catéchumène la foi qui accorde la vie éternelle : or, ce désir est exprimé aussi bien au baptême des enfants qu’à celui des adultes. De plus, le chapitre dans lequel le concile parle de la collation de ces vertus est intitulé : de la justification de l’infidèle et de ses causes ; il est donc très général. On peut s’en convaincre d’ailleurs en lisant ce qui précède la déclaration sur les vertus. Il est traité des causes efficientes, méritoire, instrumentale, formelle de la justification ; or elles sont les mêmes, qu’il s’agisse d’enfants ou d’adultes. Sans doute, dans la première phrase du chapitre, les mots acceptation volontaire des dons ne peuvent convenir qu’aux adultes ; mais il faut se souvenir que cette proposition sert de transition entre le c. vi et le c. vilj elle continue le développement qui précède sur les dispositions requises de la part des adultes pour la justification. Le concile de Trente a donc défini que tous les hommes recevaient dans la justification les vertus infuses de foi, d’espérance, de charité. D. Soto, De natura et gratia, 1. II, c. xviii, Lyon, 1581, p. 108 ; Bellarmin, Controv., de sacr. bapt., c. xi, Paris, 1620, t. iii, p. 257258 ; Suarez, De sacr., disp. XXVI, sect. ii, n. 5, Opéra, Paris, 1860, t. xx, p. 462 sq. ; et les théologiens contemporains. D’ailleurs le concile affirme que les enfants doivent être mis au nombre des fidèles, des croyants. Or ils ne font pas acte de foi. S’il est nécessaire de prendre le mot fidèle au sens étymologique, il faut, pour l’expliquer, admettre que du moins ces enfants ont la vertu de foi.

C. Par le baptême, Dieu imprime dans l’âme un caractère. — Il est de foi que le baptême est un des trois sacrements qui marquent l’âme d’un caractère, c’est-à-dire d’un signe spirituel et indélébile. Sess. VII, De sacr., can. 9. Il était nécessaire d’affirmer l’existence de cet effet méconnu par les protestants. Le concile ne dit pas ce qu’a de particulier le caractère baptismal. Sur la notion générale, voir Caractère.