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BENOIT XIII

BENOIT XIV

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devint cardinal en 1672 par la faveur de son parent Clément X, évoque de Manfredonia en 1675, de Césène en 1680, et archevêque de Bénévent en 1686. Il fut un évéque résidant, pieux, veillant à la discipline et à la réforme des mœurs, écrivant toute sorte d ouvrages de théologie et de piété. Publiés de son vivant, ils forment trois volumes in-fol., Opère tutte latine ed italiane, Ravenne, 1728. Son attachement à ses ouailles lui lit conserver le siège de liénévent après son élévation au trône et il retourna deux fois visiter le diocèse. Il prit part aux conclaves d’où sortirent cinq papes avant lui, et il se classait parmi les zelanli qui se proposaient dans leurs choix uniquement le bien religieux de l’Église.

Devenu pape sous le nom de Benoit XIV qu’il abandonna bientôt dans la pensée que Uenoit XIII d’Avignon était un antipape, il s’appela Benoit XIII et continua sur le saint-siège un vrai ministère d’évêque. Au jubilé de 1725 il remplit lui-même la charge de grand pénitencier. Plusieurs de ses nombreuses constitutions sont dirigées contre le luxe des cardinaux et la vie trop séculière des ecclésiastiques. Il encouragea la création de séminaires dans les diocèses par l’institution d’une Congrégation spéciale, la tenue des synodes diocésains et provinciaux qui tendaient à disparaître ; il attacha des indulgences à la récitation de l’Angelus, canonisa beaucoup de saints, notamment Jean de la Croix, Louis de Gonzague, Stanislas Kostka, Jean Népomucène, et Grégoire VII dont l’office ne fut pas accepté alors en France. Enfin au synode du Latran de 1725 il prescrivit instamment l’acceptation de la bulle Unigenitus qui, après de longues tergiversations, fut enfin reçue sans restriction par le cardinal de Noailles, archevêque de Paris, en 1728. Toutefois, en 1727, il publia la bulle Prctiosus in conspeclu Domirti qui renfermait des ménagements pour la doctrine de saint Augustin. Le 6 novembre 1721-, il avait adressé à l’ordre des frères prêcheurs un bref pour le défendre des attaques calomnieuses dont il était alors l’objet à propos de la grâce efficace et de la prédestination à la gloire sine ulla prævisiane meritoruni.

La diplomatie de Benoit XIII n’était pas aussi ferme ni aussi habile que son ministère religieux. Il avait donné sa confiance à un hypocrite. Il se conduisait dans les affaires par les conseils du cardinal Coscia, dont la vénalité fit perdre au pape le meilleur de sa popularité, et par ceux du secrétaire d’État cardinal Lercari. Il fut ainsi amené à rendre au roi de Naples le droit d’instituer dans son royaume un juge suprême pour les affaires ecclésiastiques, en ne se réservant que les causes les plus graves (1728). Victor-Amédée de Sardaigne reçut le droit de nommer aux sièges de son royaume. Toutefois le roi de Portugal, Jean V, ne put obtenir, même par l’expulsion des Italiens et par le rappel de ses sujets résidant en Italie, le chapeau de cardinal pour le nonce de Lisbonne, Bichi, à l’élévation duquel s’opposait le sacré collège.

La mort du pape ne fut pas pleurée. Coscia dut s’enfuir pour échapper à la fureur de la foule. Un procès qui lui fut intenté amena sa condamnation à dix années de prison, à la perte de ses dignités et à la restitution des sommes perçues indûment.

Quétif-Eehard, Script, ord. prsedicat., t. il, p. 814 ; G. M. Cavalicri, Galleria de’sommi pontifici, patriarchi, etc., doit’ordine de’predicato), Bénévent, 1696, t. i, p. (itiH ; G. B. Pittoni, Vita del somrno ponte/ire llenedelto XIII, Venise, 1730 ; Dos Rhum* und Wunderwùrdige Leben und Thaten Papst Benedicti des Dreyzehenden, 2 vol., Francfort, 1731 ; Hullarium romanum, Turin, 1871, l. xii ; leona et mentis et cardia llencdicti XII I, Francfort, 1725 ; Borgia, Benedicti XIII vita, Home, 17.72 ; Guarnacci, llist. pontif. roman., t. I, p. 39 ; t. ii, p, 409 ; Sandlni, Vitsz pontif. roman., Ferrare, 1703, t. ii, fj. 707 ; Petrucelli délia Gattina, Histoire iiiptomatiiiue des conclaves, Pari, 1866, t. iv, p. 21 ; Sentis, Die Monarchia Sicula, Fribourg, 1869, p. 159 ; Broscb, Geschichte des Kirchenstats, Gotha, 1882, t. ii, p.61. 11. Hemmer.

15. BENOIT XIV. A la suite de la biographie de ce pape, nous indiquerons les articles dans lesquels on expliquera trois de ses constitutions.

I. BENOIT XIV. Biographie. — Successeur de Clément XII, élu le 16 août 1740, mort le 3 mai 1758.

Prosper-Laurent Lambertini naquit à Bologne le 31 mars 1675. Il fit à Rome une laborieuse carrière dans les Congrégations et occupa notamment les fonctions d’avocat du consistoire, de promoteur de la foi, de secrétaire de la S. C. du Concile, de canoniste de la IVnitencerie. Archevêque in parlibus de Théodosie, puis d’Ancone en 1727, il devint cardinal en 1728 et archevêque de Bologne en 1731. Gardien vigilant de la discipline qu’il maintenait par les visites et par les synodes, aimé du peuple pour sa bonté et sa générosité, il conserva son diocèse après son élection au saint-siège jusqu’au complet achèvement du séminaire. Il fut toute sa vie un homme d’étude. On a de lui, entre autres ouvrages, une collection de lettres pastorales et autres actes épiscopaux, formant les Institutiones ecclesiasticse qui furent souvent réimprimées et se répandirent dans les diocèses ; un ouvrage classique en la matière sur la canonisation des saints : De servorum Dei beati/icatione et canonizatione, 4 vol. ; des travaux sur les fêtes et sur la messe : De sacrifteio missse ; De festis D.N.J. Cliristi, beatse M. Virgittis, et quoramdani sanctorum ; des Qusestiones canoniese, qui témoignent de son labeur. Plus tard, il donna comme pape son important ouvrage De synodu diœcesana, et fit publier par le jésuite Emmanuel de Azevedo une édition de ses œuvres. On lui dut aussi des éditions correctes de livres liturgiques : rituel, cérémonial, pontifical, martyrologe romain.

Benoit XIV se reposait de son travail par la fréquentation des savants, des hommes instruits ; expansif et gai en conversation, il aimait les bons mots, les traits d’esprit. Dans le conclave de plus de cinq mois qui l’élut pape le 16 août 1740, il disait : « Voulez-vous un saint, prenez Gotti ; un politique, prenez Aldobrandi ; un brave homme, prenez-moi. » Devenu pape, il continua la même vie de travail, de ministère, de délassement ; il fonda des sociétés pour étudier les antiquités romaines et chrétiennes, l’histoire de l’Église, la liturgie, et prit une part personnelle à leurs travaux ; il enrichit la bibliothèque Vaticane, fit dresser le catalogue des manuscrits, lia et entretint une correspondance avec nombre de savants et d’hommes d’État. Voltaire lui adressa sa tragédie de Mahomet avec une dédicace et reçut de lui une lettre aimable et réservée qui n’eut point de suite.

Prince temporel, il diminua les impôts, fil une nouvelle circonscription des régions, rétorma la noblesse romaine, poursuivit l’usure contre laquelle il publia l’encyclique Vix pervenit (1745), favorisa la liberté du commerce. Elevé dans la tradition absolutiste des princes du xvine siècle, il fit un usage assez libéral d’un pouvoir dont il ne songeait pas à modifier les conditions d’exercice : « Le pape ordonne, disait-il en plaisantant, les cardinaux n’obéissent pas, et le peuple l’ail ce qu’il veut. »

Ses rapports avec les cours furent empreints d’un esprit de bienveillance allant presque jusqu’à la laiblesse. Il poursuivit la politique de concessions de Benoit XIII ; le roi de Portugal reçut un droit de patronat tics (’tendu (1740) et le titre de /.v.r fidelissintus (1748) ; dans les Deux-Siciles une convention régla l’institution d’une cour de justice, où siégeaient des laïques et qui jugeait en dernière instance les causes ecclésiastiques (1741) ; l’habile diplomatie du roi de Sardaigne lui obtint la nomination à tous les bénéfices, et, avec la qualité de « vicaire du saint-siège » , la jouissance des liels pontificaux contre un dédommagement annuel de mille ducats ; l’Espagne à son tour obtint un droit presque universel de patronat, impliquant le droit de nomination,