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BOSNIE-HERZEGOVINE

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vine détiennent la supériorité numérique sur les autres cultes. Le nombre des orthodoxes, de 47600O en 1872, est monté à 571000 en 1885, à 673000 en 1895, et à 675245 en 1897. Ils forment les 2/5 de la population totale. Des émigrés serbes de la Slavonie, de la Dalmatie et de la Hongrie ont grossi leurs rangs. Cela prouve qu’en dépit des jérémiades des orthodoxes, l’orthodoxie de la Bosnie-Herzégovine garde sa vitalité. Les monastères y sont très nombreux. Les candidats au clergé font leurs études au séminaire de Releva, érigé en 1883 près de Sarajevo. La presse religieuse est représentée par le Messager serbe (Srpski Vjestnnik), hebdomadaire, et par le Bosanskô-Hertzegovacki istocnik (Source de Bosnie-Herzégovine), mensuel, organe de la métropole de Sarajevo.

Le Phanar n’exerce plus qu’une autorité nominale sur la Bosnie-Herzégovine. Le patriarcat serbe de Carlovitz « (fondé en 1690 par Arsène Tsernojévic, patriarche d’Ipek, émigré en Autriche), se pose aujourd’hui en héritier de la juridiction inhérente aux anciens patriarches d’Ipek. Comme tel, il réclame le droit de primauté sur la Bosnie-Herzégovine. Les théologiens du Phanar et ceux de Belgrade (Nicéphore Ducic) contestent ses prétentions. Ces tiraillements nationalistes au sein de l’orthodoxie gréco-slave n’ont eu d’autre résultat que la démission forcée de Sava Kosavonic, métropolite de Sarajevo, champion de la suprématie du Phanar sur l’Église orthodoxe bosniaque. Markovic, t. il, p. 436-437. L’Église ruthène uniate de Galicie s’efforce de son côté d’attirer dans son sein les orthodoxes serbes de Bosnie-Herzégovine. Moskovskiia Viédomosli, 1901, n. 329.

Protestantisme.

Les protestants dans les deux

provinces annexées atteignent le chiffre de 4000. Sarajevo en compte 300. Il n’y a pas longtemps, ils ont élevé un temple dans cette dernière ville.

Mahométisme.

L’élément musulman constitue un

noyau important dans les deux provinces annexées à l’Autriche. Les musulmans bosniaques sont des Serbes islamisés, de fameux pillards, dit Elisée Reclus, qui se convertirent à l’islam pour continuer leur métier." Comme prix de leur apostasie, ils obtinrent sur leurs frères restés chrétiens cette suprématie que le Coran octroie à ses nouvelles recrues. Les nouveaux convertis ne se bornèrent pas à embrasser l’islamisme. Ils le pratiquèrent et le pratiquent encore avec une intransigeance féroce qui ne s’est jamais démentie. Leur haine religieuse à l’égard des chrétiens se doublait d’une haine de caste. En vertu de leur apostasie, ils avaient ccquis une situation et des privilèges exorbitants, et dans l’islam démocratique, au dire de Yriarte, ils formaient une classe aristocratique. L’histoire de la chrétienté bosniaque sous la domination musulmane est une longue série de persécutions sanglantes, d’abus effroyables, de violences sans nom, de caprices néroniens. Dans la première moitié du XIXe siècle, les quelques milliers de chrétiens de la Bosnie émigraient en masse. Les propriétaires du sol, presque tous musulmans, excités par les concessions libérales de Mahmoud II, le sultan réformateur, les avaient réduits à la famine. Toute tentative de les amadouer, faite par la Sublime Porte, aboutissait à un échec. L’anarchie régnant et se perpétuant dans le pays, la politique autrichienne en profita pour satisfaire ses convoitises. La suprématie de l’islam cessa après une lutte sanglante de plusieurs mois où les Autrichiens perdirent quelques milliers de soldats. Les Bosniaques musulmans tombèrent sous la loi commune. Le gouvernement autrichien s’appliqua à ne point exciter leur fanatisme soupçonneux. Il leur donna une organisation spéciale, et au commencement surtout ne les dépouilla point de leurs privilèges. Pour les soustraire à l’influence dangereuse d’Yldiz-Kiosk, il les plaça sous la dépendance d’un chef religieux (reis-el

ouléma), et d’un conseil de quatre membres (medchlis el ouléma). Il affecta’des sommes importantes au maintien des écoles, à la restauration des mosquées. Des juges musulmans furent appelés à siéger dans les tribunaux pour juger leurs coreligionnaires d’après la loi coranique. On espérait une réconciliation avec l’élément chrétien, d’autant plus que les traces du christianisme et du bogomilisme n’ont pas tout à fait disparu chez les Bosniaques musulmans. L’avenir dira si les méthodes suivies par l’Autriche obtiendront des résultats heureux. Un certain apaisement s’est produit dans l’esprit des musulmans bosniaques, qui ont Uni par se soumettre à la loi du recrutement militaire. Mais les signes précurseurs de la réconciliation rêvée ne paraissent pas encore à l’horizon. Il y a toujours en Bosnie un parti très fort qui du fond du cœur maudit la domination autrichienne, et tourne ses regards vers Constantinople, le foyer du panislamisme. L’émigration des musulmans en Turquie est considérable. Depuis 1883 jusqu’à 1899, 16 692 musulmans ont passé les frontières de la Bosnie pour ne plus y retourner, et ce mouvement d’émigration ne fait que s’accentuer. Ceux qui croient à une réforme possible de l’islam, à son adaptation aux exigences de la civilisation moderne, nourrissent l’espoir du retour des musulmans bosniaques à leur ancienne religion, du rétablissement de liens amicaux entre eux et leurs lrères orthodoxes et catholiques. Mais il ne faut pas oublier que la Bosnie musulmane conserve l’élément le plus rétrograde de la vieille Turquie, et qu’une longue expérience historique autorise à douler de la future conversion des musulmans, fussent-ils des renégats, à la religion chrétienne.

Pour l’état actuel du catholicisme, voir Die katholische Kirche unserer Zeit, etc., p. G40 ; Missiones catholicse cura S. C. de Propaganda flde descriptx, Rome, 1897, p. 92-103. — Pour l’état actuel de l’orthodoxie, on peut consulter les collections des journaux et revues serbes, par exemple : La voix de la Serbie irrédenta (Glas ne oslobodjenog srpstvà), Belgrade ; la Vie slave (Slavianskiy Vick), en russe, Vienne ; la Zastava de Novi Sad (Neusatz) ; le Srbobran (Nation serbe), Agram ; Djelo, Belgrade ; le Messager de la Bosnie-Herzégovine (Bosansko-Hertzegovachi Glasnik), Belgrade ; le Messager serbe (Srpski Vjestnik), Mostar ; Source de Bosnie-Herzégovine (Bosansko-Hertzegovacki istocnik). Sarajevo. Nos renseignements ont été puisés surtout dans les travaux de Voskréchensky sur la situation actuelle de l’Église orthodoxe en Bosnie-Herzégovine, Bulletin théologique de Sergiev Posad (Bogoslovsky Viestnik), février 1895, p. 239200 ; avril, p. 72-95 ; septembre 1901, p. 101-107. Citons encore les brochures et ouvrages suivants : Kanonsko naselo pravoslavne tzrkve pri razredjenju tzrkvenikh vlasti. K titanju o ierarkhickom pololojaju sarajevske mitropolje, Zara, 1884 ; Odjek srpskog pravoslavnog svesentotva iz Bosne i Hertzégovine (Écho du clergé serbo-orthodoxe en Bosnie-Herzégovine), Novi Sad, 1899 ; Pokori i lojna izmotavana Hertzeg-Bosanske uprave, Novi Sad, 1899.

Des données intéressantes sur le christianisme ancien et moderne en Bosnie-Herzégovine ont été fournies dans les Échos d’Orient : Théarvic, L’Église serbe en Turquie, Chronique, 1899, n. 1 ; 1900, n. 0 ; Séraphim Pérovic, métropolite de Mostar, a donné un bon résumé historique sur l’Église orthodoxe en Herzégovine, dans le Srpska pravoslavna Khertzegovatchko-Zakhumska mitropolijia pri kraju 1900 god. Mostar, 1901, p. 2551 (écrit par Hilarion Rouvaratz) ; Batinic, Bessarione, 2’série, 7= année, t. IV, p. 292-298, 429-434 ; Schematismus cleri dioscesurn Bosnicnsis seu Diakovensis et Sirmiensis pro anno 1900, Djakova, 1900 ; Pisani, A travers l’Orient, p. 184, 191-192.

— Pour l’histoire des musulmans de Bosnie, cf. Die Christen in Bosnien, Vienne, 1853 ; Hirgas, Les droits des chrétiens en Orient d’après les lois musulmanes (en russe), Saint-Pétersbourg, 1805 ; Popov, Les conditions des rajahs dans la Bosnie actuelle (en russe), Slav.iansky Sbornik, 1875, n. 1 ; Vambéry, Bosnien und Hercegowina oder die slavischen Unterthanen der P forte, dans Deutsche Rundschau, novembre 1875 ; Kinkel, Die christlichen Unterthanen der Turkei in Bosnien und Hercegowina, Bàle, 1870 ; Charles Yriarte, La Bosntue l’Erzegovina durante l’insurrezione, Milan, 1890 ; Charmes, La question religieuse en Bosnie et en Herzégovine, dans la Revue des Deux Mondes, juin 1885 ; Kin Ungarn, Die Lage der Moliam-