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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 2.djvu/96

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BAPTÊME DANS LA SAINTE ÉCRITURE

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le baptême conféré avec la formule trinitaire. La parole du Sauveur, rapportée Matth., xxviii, 19, n’est pas authentique ; elle représente une tradition postérieure au christianisme primitif et qui se fait jour au IIe siècle seulement. En effet, saint Paul ignore que Jésus ressuscité ait parlé aux apùtres et leur ait donné des ordres particuliers. D’autre part, la formule trinitaire est étrangère aux discours authentiques de Jésus, et si elle avait été prononcée par lui au sujet du baptême, elle n’aurait pas eu, au siècle apostolique, la valeur qu’elle devait avoir, puisqu’à cette époque le baptême a été conféré £Î ; açEdiv à^xpriaiv et eÎî to à’vofxa XptaTO’J. Act., II, 38 ; Harnack, Lehrbuch der Dogmengesc/iichte, 2 11 édit., Fribourg-en-Brisgau, 1888, t. i, p. 68, note 3 ; Holtzmann, Lehrbuch der Neutestamentlichen Théologie, Leipzig, 1897, t. i, p. 378-379. Les raisons de nier l’authenticité des paroles de Jésus, Matth., xxviii, 19, ne sont pas admissibles. Saint Paul, qui rappelle les apparitions de Jésus ressuscité, I Cor., xv, 5-9, mentionne en particulier celle qui tut faite aux apôtres réunis. Lui, à qui le Christ ressuscité a parlé, ne pouvait ignorer les communications faites aux autres apôtres. Lui-même a été baptisé par Ananie. S’il n’a pas reçu la mission de baptiser, mais d’évangéliser, il a cependant baptisé quelques chrétiens. S’il se réjouit de n’avoir conféré le baptême à aucun Corinthien, c’est pour que personne ne se flatte d’avoir été baptisé au nom de Paul. I Cor., I, 14-16. Le baptême était donc nécessaire aux yeux de saint Paul, quoiqu’il ne se crût pas obligé de l’administrer personnellement. Par ailleurs, la formule trinitaire a eu dès l’origine l’autorité qui lui revenait comme institution de Jésus-Christ. Jamais le baptême n’a été conféré eïç à’fsaiv à|j.apTicov. Cette expression indiquait un effet du baptême, la rémission des péchés ; elle n’était pas la formule employée. Cette formule exprimait au nom de qui le sacrement était administré. La formule : Au nom de Jésus, était narrative plutôt que liturgique, ainsi qu’il résulte des faits rapportés plus haut. Elle ne pouvait être insolite sur les lèvres de Jésus qui parle si souvent du Père, du Fils qui est un avec le Père, et du Saint-Esprit. Enlin, saint Paul, en mentionnant les trois personnes divines pour montrer l’efficacité du baptême, I Cor., vi, 11, la paraphrase au lieu de la transcrire littéralement. Il savait donc que le baptême s’administre au nom de la sainte Trinité. A. Michiels, L’origine de l’épiscopat, Louvain, 1900, p. 52, note 2 ; p. 78, note.

IV. Nécessité et conditions exigées. —

Le baptême est nécessaire pour être sauvé. C’est Jésus-Christ lui-même qui nous l’affirme, dans son entretien avec Nicodème : « En vérité, en vérité je te le dis : si quelqu’un ne naît de nouveau, il ne peut voir le royaume de Dieu. » Nicodème, étonné de cette parole et ne songeant guère à des réalités d’ordre surnaturel, fit ressortir l’impossibilité d’une renaissance physique. « Comment un homme peut-il naître quand il est vieux ? Peut-il rentrer dans le sein de sa mère et naître de nouveau ? » Jésus explique alors sa parole, mais sans en diminuer l’énergie, et proclame avec la même solennité la nécessité d’une régénération spirituelle, qui n’est pas autre chose, comme nous l’avons prouvé plus haut, que la régénération baptismale. « En vérité, en vérité je te le dis, si quelqu’un ne renaît de l’eau et du Saint-Esprit, il ne peut entrer dans le royaume de Dieu. » Le royaume de Dieu, dans l’Évangile, désigne toujours l’Église, tantôt sous la forme militante ici-bas, tantôt sous la forme triomphante au ciel, et quelquefois l’une et l’autre en même temps. La parole de Jésus, dans ce passage, a évidemment toute l’extension possible, et elle signifie que le baptême est nécessaire pour entrer, non seulement dans la société des chrétiens sur la terre, mais aussi dans la société des élus au ciel.

Le baptême ne peut être reçu comme il faut, quand il S’agit du moins des adulles, si l’on ne remplit deux conditions préalables. La première est la foi. « Celui qui croira et sera baptisé, dit Jésus-Christ à ses apôtres, celui-là sera sauvé. » Marc., xvi, 16. La foi d’abord, le baptême ensuite. La seconde partie du verset : Qui vero non crediderit condemnabitur, qui est l’antithèse de la première, ne prouve pas cependant que la foi seule, et non le baptême, est nécessaire au salut, car il va de soi que ceux qui ne croiront pas ne consentiront pas à être baptisés et ne seront pas sauvés. Les apôtres et les disciples tiennent le même langage. Les Samaritains et Simon le magicien lui-même ne sont baptisés que lorsqu’ils ont cru à la prédication de Philippe touchant le royaume de Dieu. Act., viii, 12, 13. Quand l’eunuque de la reine Candace dit au diacre Philippe : « Voilà de l’eau, qu’est-ce qui empêche que je sois baptisé ? » Philippe lui répondit : « Tu peux l’être, si tu crois de tout ton cœur. » Et aussitôt l’eunuque fit sa profession de foi : « Je crois que Jésus-Christ est le Fils de Dieu.) Philippe lui administra immédiatement le baptême. Act., VIII, 36-39. Le baptême de saint Paul a été précédé de sa conversion et de sa foi en Jésus. Act., ix, 18 ; xxii, 16. Corneille a cru avant d’être baptisé, Act., x, 33, ainsi que Lydie, Act., xi, 14, le geôlier de Paul, Act., XVI, 31, Crispus. Act., xviii, 8. La seconde condition est le repentir des péchés commis antérieurement. Saint Pierre indique cette condition dans le discours qu’il adressa au peuple le jour de la Pentecôte : « Faites pénitence, (jetavoviiTaTe, et que chacun de vous soit baptisé au nom de Jésus-Christ pour la rémission de ses péchés. » Act., M, 38. Il s’agit là clairement, comme l’indique le texte original, du repentir sincère du péché, qui doit précéder le baptême. Ces deux dispositions se rencontraient souvent et facilement réunies chez les Juifs ou les prosélytes pieux et fidèles. Aussi les Juifs de Jérusalem, l’eunuque de la reine Candace, Saul, le centurion Corneille n’ont pas besoin d’une longue préparation pour recevoir le baptême. La prédication les amenait vite à la foi et à la pénitence, auxquelles la grâce divine les sollicitait intérieurement. Ils ne devaient, d’ailleurs, éprouver aucune difficulté à passer par le bain baptismal pour être introduits dans la société chrétienne, puisque les païens étaient agrégés à la religion juive par un rite baptismal, qui n’avait toutefois d’autre effet que de leur conférer la pureté légale. Voir Schùrer, Geschichte des jùdischen Volkes ini Zeitalter Jesu Christi, 3e édit., Leipzig, 1898, t. iii, p. 129-132.

V. Effets. —

Mode d’action du baptême.


Des paroles de Jésus à Nicodème, on peut inférer quel est le mode d’action du rite baptismal. L’expression « renaître ex aqua et Spiritu Sancto » montre que cette régénération est l’œuvre de deux facteurs distincts, l’eau et le Saint-Esprit, que l’Écriture ne craint pas d’assimiler l’un à l’autre sous un certain rapport, celui d’une causalité véritable : ex aqua et… L’eau est cause du baptême, aussi bien que le Saint-Esprit ; mais, bien entendu, d’une manière différente. Chacun des deux agents doit avoir l’activité qui convient à sa propre nature. L’agent principal étant évidemment le Saint-Esprit, l’eau ne peut être qu’un agent secondaire, un instrument qu’il élève à la hauteur d’une cause, pour servir à la production de la régénération baptismale. C’est cette activité que les théologiens scolastiques exprimeront plus tard d’une façon technique, en employant la formule ex opère operato. Voir A. Loisy, Nicodème, dans la Bévue d’Iiistoire et de littérature religieuses, Paris, 1899, t. iv, p. 489497. Ajoutons que l’eau, matière du baptême, doit être unie à la forme dont nous avons parlé, pour être efficace. De là le mot de saint Paul : Mundans lavacro aquse inverbo vitse. Eph., v, 26.

Effets produits par le baptême.


Le premier effet du baptême, et celui que Jésus-Christ semble donner comme sa caractéristique spéciale, est une nouvelle naissance d’ordre spirituel, à laquelle correspond néces-