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CRÉDIBILITÉ


traire auprès de9 hommes, el il est dan9 l’ordre île la providence de Dieu de gouverner les inférieurs par ceux qui leur sont supérieurs. S’il n’est pas nécessaire qu’une époque déterminée ail cette évidence, il est nécessaire que l’Église l’ait ou l’ail eue : autrement, dans son quant-àsoi, l’Église ne serait »a-<. humainement parlant, certaine des choses de la foi, ne possédant parmi ses membres aucun témoin oculaire. Si, au contraire, ceux qui n’ont pas vu peuvent s’appuyer sur ceux qui ont vii, les uns et les autres vivent en toute sécurité’dans la foi, en règle avec les garanties que suppose ce mot de saint Jean : Ce que nous avons vii, nous le témoignons et vous l’annonçons. » Cajelan, In Sum. Iheol., II a II æ, q.ci.xxi, a. 5, n. 5.

Les faits semblent appuyer cette manière de voir. 11 était bien difficile au prophète, que l’on nous présente recevant immédiatement la révélation, de ne pas percevoir évidemment, dans certains cas tout au moins, le fait de cette révélation. S. Thomas, Sum. t/ieol., II : ’II » , q. clxi, a. 5 ; q. clxxii, a. 4 ; De veritale, q. xii, a. 1, ad 4um. La bienheureuse Vierge n’a-t-elle pas eu, dans la conception miraculeuse du Christ, un motif de crédibilité évident de sa divinité ? De veritale, q. xiv, a. 9, ad 7° m. Saint Paul et Moïse, à entendre saint Thomas, ont eu des preuves directes dans des ravissements intellectuels, et salis congruenter nam si eut Moyses fuit primus doctor Judseorum, ita Paulus fuit primus doctor gentilium. Sum. iheol., II a II æ, q. clxxxv, a. 3, ad l ii, n. Enfin lecas typique d’un prophètequi ressuscite un mort en témoignage de sa parole n’a-t-il pas été le cas des apôtres en présence des miracles ? D’où cette constatation de saint Thomas que tous les moyens par lesquels la foi nous est parvenue sont au dessus de tout soupçon, suspicione eurent, car nous ne croyons aux prophètes et aux apôtres que d’après le témoignage que le Seigneur leur a donné de la vérité de sa doctrine par ses miracles, et à leurs successeurs qu’autant qu’ils nous redisent ce que les apôtres ont laissé dans leurs écrits. De veritate, q. xtv, a. 10, ad 11

Si la preuve démonstrative de la crédibilité n’est pas absolument nécessaire, même à la foi de l’Église, elle est cependant de la plus haute convenance du point de vue providentiel. Il ne faut pas d’ailleurs oublier que, selon le concile du Vatican, l’Eglise est par elle-inème une preuve permanente, vivante et convaincante de la crédibilité de son enseignement. Ne serait-ce pas. entre autres motifs plus personnels, parce que, point de convergence de tous les motifs de crédibilité, ad solam enim Ecclesiam catholicam ea pertinent omnia, quæ ad evidentem pdei christianse credibilitatem tani mnlta et tant mira divinitus sunt disposita, const. Dei Filius, c. iii, elle peut toujours rendre compte rationnellement à tous ceux qui le demandent, et donc d’une manière démonstrative, là où cela est exigé, de la divinité de ses origines et de ses droits. Ii semble bien que ce complément soit indispensable à la dignité de son divin magistère et à l’efficacité de son ministère universel.

Pour la première conclusion on pourra consulter les ouvrages indiqués col. 2213 ; Durand île Saint-Pourçain, lu IV Seul.. 1. III, dist. XXVI, q. iii, p. 22’i ; Salmanticenses, Curs. tkeol., de file. disp. I, dub. v, §3, n. 172 ; Suarez, De fldediv., disp. IV, sert, v, n.7 ; Wilmers, up. cit., I. II, c. i, prop. 21. coroll. — Pour la seconde conclusion : Cajetan, lue. cit. ; Salmanticenses, Curs. theol., île fuie. toc. cit., n. 169 ; Suarez, ibid.

11. POSSIBILITÉ D’UNE DÉMONSTRATION HE LA CRÉDI-BILITÉ, — La crédibilité rationnelle est, connue nous l’avons dit, située entre la preuve du témoignage divin qui la fonde et l’assentiment surnaturel et libre de la foi dont elle est la condition. L’impossibilité d’une démonstration de la crédibilité ne pourra provenir que du côté de ces antécédent et conséquent, auxquels elle est essentiellement relative. Si la preuve du témoignage

divin ne peut avoir de vertu démonstrative, a l’endroit de la crédibilité, ou si la liberté el le surnaturel de

l’acte de foi sont incompatibles avec une crédibilité démontrée, il ne peut plus être question de cette démonstration.

1° Possibilité d’une démonstration de la crédibilité

du côté du témoignage du, n. — Toujours, la théol a reconnu que le plus grand nombre des motifde Crédibilité n’ont qu’une valeur probable, suffisante pour mettre le commun des esprits dans l’état de cerlitude pratique qui légitime prudentiellement la foi, incapable de causer l’assentiment scientifique, ou d’offenser en quoi que ce soit le caractère spécifique du vrai de crédibilité. Toujours, cependant, elle a réservé et mis à part, comme étant doués d’une efficacité plus grande en soi, les miracles et les prophéties. Dieu a voulu joindre aux secours intérieurs de l’Esprit-Saint des preuves extérieures de sa révélation, dit le concile de Vatican, à savoir les effets divins, principalement des miracles et des prophéties, qui, en montrant clairement l’inlervention de la toute-puissance et de la sagesse infinie de Dieu, sont des marques de la divine révélation lus certaines et adaptées aux exigences de tous les esprits. Const. Dei Filius, c. ni, Denzinger, Enchiridion, n. 1639. C’est donc sur l’un de ces motifs principaux que nous devons faire porter l’épreuve de la possibilité d’une démonstration évidente du fait divin de l’attestation. Pour fixer les idées, puisque aussi bien il est nécessaire de faire un choix, nous choisirons le miracle.

La preuve par le miracle soulève deux difficultés : la première, qui n’est pas de notre ressort, a trait à sa possibilité ontologique, à la possibilité de son discernement d’avec les phénomènes analogues, à la possibilité de sa constatation par l’histoire ; la seconde concerne sa force probante en matière de doctrine, nous nous attacherons à la seconde, nous contentant de donner, relativement à la première, quelques indications de solution. Voir Miracle.

1. Première difficulté.

a) Le déterminisme nie la possibilité du miracle au nom de la nécessité des lois naturelles. — Solution. — Le déterminisme des lois naturelles est l’œuvre de la sagesse et de la libellé divines, et Dieu, pour un but supérieur, peut déroger aux lois qu’il a établies ; le déterminisme absolu est convaincu d’erreur par le contingentisme que les derniers progrès de la méthode scientifique regardent justement comme la condition naturelle des lois physiques. Cf. Poincaré, La valeur de la science, Paris, 1905 ; Duheni, La théorie physique, Paris, 1907, etc. Une fois dégaçi e du déterminisme absolu, la question du miracle demeure avant tout une question de fait : contra factinn non valet ratio.

b) Le contingentisme scientifique professe que les lois de la nature, telles que la science les formule, ne sont jamais qu’approchées. Elles sont donc toujours ouvertes à des exceptions. Sur cette base le contingentisme philosophique contemporain établit une théorie de l’indiscernabilité du miracle, lequel peut toujours être, à l’entendre, une des exceptions prévues par l’idée de la loi naturelle. Cette conception est appuu’-e par quelques philosophes appartenant à la religion catholique, sur certains textes des Pères de l’Eglise, particulièrement de saint Augustin. InJoa. Evang., ir. IX, n. 1, P. L., t. xxv. col. I 458. — Solutions. — Le contingentisme scientifique n’est ouvert aux exceptions que dans certaines limites conditionnées par le point de vue de chaque science, par sis hypothèses, par ses emprunta conscients ou inconscients à d’autres sciences ou théories, elles-mêmes relatives et hypothétiques : il n’a aucun rapport avec des exceptions qui sont en dehors de son point de vue et en dehors des hypothèses que suggère la science. Certains miracles pourront être critiqués par lui, mais non tous. Par exemple, la