Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 3.2.djvu/535

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théologique. On peut faire rentrer dans le même ordre d’idées la vérification des citations faites des Pères et des théologiens antérieurs par les théologiens postérieurs. Elle permet de constater de fausses attributions d’opinions, des citations tronquées et le recours à des ouvrages apocryphes. Les éditions critiques fournissent d’ordinaire le résultat de ces vérifications. Signalons en particulier la revision critique que les Pères Ballerini et Palmieri, Opus théologicum morale in Busembaum Medullam, ont faite de toutes les citations et références de saint Alphonse de Liguori et celle que le P. A. Walter a faite dans sa traduction latine des écrits dogniatiques du même saint docteur : S. Alphonsi Mariæ de Ligorio Ecclesiæ doctoris Opera dogmatica ex italico sermone in latinum, 2 in-4, Rome. 1903. Si ce travail de rectification se généralisait, bien des erreurs, qui ont cours dans le monde théologique, disparaitraient des manuels, où elles fourmillent et où elles persévérent, même après qu’elles ont été signalées, tant elles ont la vie dure. 2337 40 Hypercritique. — L’hypercritique peut se donner libre carrière soit au sujet de l’authenticité ou de l’interprétation des documents anciens. Bornons-nous rappeler les interprétations extravagantes données récemment à l’inscription d’Aberefus, voir t. I, col. 59-61, et les soupçons d’inauthenticité de la bulle Unam sanctam de Boniface VIII. Voir t. II, col. 999-1003. Citons encore les doutes soulevés contre les écrits de l’abbesse Hroswitha. Ces exemples sont non moins ridicules que ceux du P. Hardouin attribuant à des moines du moyen âge les œuvres de Virgile et d’Horace. En ces matières, l’extrême méfiance est aussi funeste que l’extrême crédulité.

E. MANGENOT.

CROCUS Corneille, humaniste et controversiste néerlandais, né à Amsterdam vers la fin du xve siècle, étudia les belles-lettres et l’éloquence à Louvain, sous Adrien van Baarlan. Ordonné prêtre après de solides études théologiques, il devint, dans sa ville natale, recteur d’une école latine qui acquit bientôt une juste célébrité. Il se proposait avant tout de défendre le cour et la foi des enfants contre la licence des sucreurs et l’invasion des erreurs nouvelles. Dans ce but, il composa une grammaire latine, « afin de pouvoir, disait-il, éloigner des mains de la jeunesse celle de l’impie Mélanchthon ; » il écrivit des dialogues familiers : Colloquiorum puerilium formulæ, Anvers, 1536, pour les opposer à ceux d’Érasme ; une comédie latine : Josephus castus, Anvers, 1548, afin de détruire dans les jeunes esprits l’influence exercée par la lecture de l’Eunuque de Terence. Comme ouvrages relevant de la pédagogie, on a encore de lui : Lima barbarici, sive farrago sordidorum verborum, Cologne, 1520 ; Silvula vocabulorumı, puerilis lectionis exercitationi accommodata, Solingen, 1539 ; Paraclesis ad capessendam sententiam Josephi casti, Anvers, 1548.

La controverse lui doit quelques œuvres remarquables par la vigueur de la pensée et l’élégance du style : Epistola de fide et operibus ad Joannem Sartorium fidei orthodoxe desertorem, Anvers, 1531 ; Disputatio contra anabaptistas de baptismo parvulorum, ibid., 1535 ; De vera Erclesia feu de nous et signas Ecclesiæ, Cologne, 1548. Sa réputation d’humaniste et de théologien s’étendait au loin. Le roi de Portugal, Jean III, jaloux de ménager d’illustres professeurs à l’université de Coimbre, qu’il fondait alors, lui fit des offres avantageuses pour une chaire de théologie. Le pieux recteur, qui nourrissait déjà le projet de quitter le monde et d’entrer dans la Compagnie de Jésus, refusa, et. à l’âge de cinquante ans, lorsqu’il eut rendu les derniers devoirs à sa vieille mère, se mit en roule pour Rome. C’était l’année du jubilé. Par esprit de pénitence, il voulut accomplir à pied ce long pélerinage et contracta une maladie d’épuisement, qui l’emporta bientôt, après qu’il eut été admis par saint Ignace à prononcer ses vœux de religion.

Outre les écrits précédents, Sotwel mentionne encore de lui divers discours et méditations : Meditationes piæ in passionem dominicam, Cologne, 1532 ; Oratio de Christi vita, Anvers, 1548 ; In Decalogum, publié dans Pia opuscula Cornelii Croci Batavi, Anvers, 1612.

Orlandant, Historia Soc. Jesu. part. I, I. X, n. 73, p. 236 ; Prat, Mémoires pour servir à l’histoire du P. Broët et des origines de la Compagnie de Jésus, Le Puy, 1885, p. 250 ; Sotwel, Bibliotheca scriptorum Soc. Jesu., Rome, 1676, p. 159 ; Foppens, Bibliotheca belgica, Bruxelles, 1739, t. I, p. 197 ; Sommervogel, Bibliothèque de la Ce de Jésus, t. II, col. 1660-1661 ; Hurter, Nomenclator, 3 édit., Inspruck, 1906, t. II, col. 1418-1449.

P. BERNARD.

CROISET Jean, écrivain ascétique très estimé, naquit à Marseille, le 28 août 1656, entra au noviciat de la Compagnie de Jésus, le 16 décembre 1677. En 1689, avant son sacerdoce, il fit la connaissance de la B. Marguerite-Marie, et devint bientôt son intime confident et son plus fidèle collaborateur. Nous possédons dix lettres de la sainte visitandine de Paray-le-Monial, adressées au P. Croiset, où elle l’appelle : « Mon Révérend Père et non frère très cher au Sacré-Cœur de Notre-Seigneur Jésus-Christ. » Après le P. de La Colombière, personne peut-être n’a autant fait pour répandre la dévotion au Sacré-Cœur. Stimulé par la B. MargueriteMarie, il traite à fond de la nature de la devotion et de sa pratique dans La dévotion au Sacré-Cœur de Notre-Seigneur Jésus-Christ, in-12, Lyon, 1691. Ce livre se répandit rapidement, il renfermait en germe quelques unes des pratiques de dévotion aujourd’hui en honneur. Mais la dévotion paraissait nouvelle et inquiétait les esprits. Les supérieurs éloignèrent le P. Croiset de Lyon où il enseignait la rhétorique et dirigeait des œeuvres florissantes, et l’envoyérent enseigner la philosophie à Arles, à Avignon, enfin la théologie à Marseille, jusqu’en 1704, où il devint supérieur dans cette dernière ville. Rome même, comme on le sait, se montra d’abord très réservée à l’égard des pratiques de la dévotion au Sacré-Cœur ; soit en raison de cette défiance, soit pour manque de formalités ou plutôt encore à cause de l’office qui était joint au livre et n’était pas approuvé, l’ouvrage du P. Croiset fut mis à l’Index, le Il mars 1704. Ce n’est que le 29 août 1887 qu’il a été retiré du catalogue des livres défendus, à la demande de Mar Stadler, archevêque de Serajewo. Le livre modifié et augmenté continua à se répandre en nombreuses éditions et traductions. Le P. Croiset a publié en outre : Retraite spirituelle pour un jour de chaque mois, in-12, Lyon, 1694 ; Réflexions chrétiennes sur divers sujets de morale utiles à toutes sortes de personnes et particulièrement à celles qui font la retraite spirituelle un jour par mois, in-12, Paris, 1707. Devenu recteur du collège des jésuites à Lyon, il fit paraitre de 1712 à 1720 ses Exercices de piété pour tous les jours de l’année, contenant l’EXPLICATION DES MYSTÈRES OU LA VIE DU SAINT DE CHAQUE jour, avec des réflexions sur l’Épitre, et une méditation sur l’Evangile de la messe, et quelques pratiques de piété propres à toutes sortes de personnes, 12 in-12, Lyon. Cet ouvrage, sous le titre d’Année chrétienne ou de Vies des saints, eut un très grand succès. Les Vies de Notre-Seigneur et de la Très Sainte Vierge qu’il renferme, ont aussi été publiées à part. On doit encore au P. Croiset Reglemens pour Messieurs les pensionnaires des Pères jésuites du collège de Lyon, qui peuvent leur servir de règle de conduite pour toute leur vie, in-8, Lyon, 1711, Parallèle des mœurs de ce siècle (et de la morale de Jésus-Christ), 2 in-12, Lyon et Paris, 1727 ; Le parfait modèle de la jeunesse chrétienne dans la vie de S. Louis de Gonzague, Avignon, 1735 ; Des illusions du cœur dans toutes sortes d’états