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CLOTURE

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d’où dérive l’obligation de la clôture. Ils se sont demandé si elle naissait des vœux émis par les religieux ? On peut répondre à l’affirmative que d’ordinaire, à l’entrée en religion, on prononce seulement les trois vœux essentiels de chasteté, de pauvreté et d’obéissance. Quelques rares instituts seulement, les religieuses de Notre-Dame, les clarisses et quelques autres émettent le quatrième vœu : Je voue aussi, et promets garder perpétuelle clôture, etc. Et cependant les religieuses qui ne prononcent pas ce quatrième vœu sont pareillement astreintes à la clôture. Par ailleurs, si le vœu d’obéissance semble impliquer la clôture, ce n’est non plus que par voie de conséquence et indirectement. Le supérieur devrait stipuler ce précepte comme toute autre prescription particulière, qu’il impose en vertu de la sainte obéissance.

L’obligation de la clôture proviendrait-elle d’une prescription du droit commun ? Mais dans la Décrélale citée d’Eugène IV, on trouve une affirmation de fait, une direction ; on ne lit pas un précepte formel, une prescription catégorique imposant aux religieux la loi de clôture. On n’y rencontre, au plus, comme dans d’autres dispositions de ce genre, que la défense de sortir du couvent pour des motifs humains ; aucune prohibition absolue n’y est formulée.

Serait-ce la règle monastique [qui aurait établi la clôture ? Suarez, loc. cit., énumère les règles rédigées par les fondateurs d’ordre. Il résulte de l’examen des constitutions de saint Augustin, de saint Basile, de saint Benoît, de saint François d’Assise, de saint Pacôme, de l’ordre du Carmel, qu’aucun article n’impose formellement la clôture. Cette obligation serait-elle expressément imposée dans ces règles, qu’on n’en pourrait déduire une conclusion en faveur de l’opinion dont il s’agit. Ces règles n’obligent pas sous peine de péché ; par conséquent, la loi de clôture ne pourrait pas être plus rigoureuse que les autres prescriptions. Or, comme nous le verrons dans la suite de cet article, cette dernière conséquence ne saurait être admise ; la loi de la clôture constitue une obligation grave. Voilà pourquoi l’opinion commune, exposée par Suarez, attribue l’origine de l’obligation de la clôture à l’autorité des supérieurs qui ont le droit d’administration, de surveillance et de sauvegarde des monastères. Le supérieur possède certainement ces pouvoirs. L’inférieur est donc obligé de les’reconnaitre et de s’y soumettre. Les violations de la clôture par les religieux placeraient le prélat dans l’impossibilité d’exercer ses droits. Il en résulte qu’une fois la profession religieuse établie, le principe de la clôture repose en dernière analyse, non sur le droit positif, mais sur le droit naturel et divin, source de l’autorité ecclésiastique. On s’explique ainsi la gravité des paroles du concile de Trente, sess. XXV, De regularibus, c. V : « Le saint concile ordonne à tous les évoques, sous la menace du jugement de Dieu qu’il prend à témoin, et de la malédiction éternelle, que, par l’autorité ordinaire qu’ils ont sur tous les monastères qui leur sont soumis, et à l’égard des autres par autorité du siège apostolique, ils aient un soin tout particulier de faire rétablir la clôture des religieuses aux lieux où elle se trouvera avoir été violée, et qu’ils tiennent la main à la conserver en son entier dans les maisons où elle sera maintenue, réprimant par censures ecclésiastiques et par d’autres peines, sans égard à aucun appel, toutes personnes qui pourraient y apporter opposition ou contradiction, appelant même pour cela, s’il en est besoin, le secours du bras séculier ; en quoi le saint concile exhorte tous les princes chrétiens de leur prêter assistance et enjoint à tous magistrats séculiers de le faire sous peine d’excommunication. »

Mais l’Église applique la loi de la clôture de façon différenteaux religieux et aux religieuses. Les obligations résultant de cette prescription varient selon qu’elles visent les hommes et les femmes.

II. Clôture des religieux.

Les règles de la clôturedes hommes concernent la sortie du religieux du monastère et l’introduction des étrangers dans l’intérieur du couvent. De là, la double dénomination : clôture active, pour la sortie du monastère ; clôture jiassive, pour l’introduction des étrangers.

I. SORTIE nu couvent.

1° Diversité d’application.

— Rappelons qu’il s’agit seulement de la sortie momentanée, de cette absence, qui, par ailleurs, serait licite, si le droit ne l’interdisait pas. Conformément à l’esprit de la législation ecclésiastique, et aussi, selon les exigences des situations, les règles de la clôture peuvent et doivent être interprétées et appliquées diversement. Il existe des corps religieux fondés en grande partie pour le ministère extérieur, pour la vie active, ou du moins, la vie mixte. Ce sont les bénédictins, les jésuites, les dominicains, les carmes, les capucins, etc., qui se consacrent aux travaux des missions, aux prédications des retraites, des carêmes. Le but même de ces ordres oblige les religieux à s’absenter parfois du couvent, afin d’exercer leur ministère. Pour eux, les exigences de la clôture se bornent à ne pas quitter le couvent sans autorisation. La durée de leur absence est proportionnée aux nécessités des cas particuliers. D’autres réguliers remplissent un rôle beaucoup plus circonscrit, renfermé dans les limites du monastère, par exemple, ceux qui sont chargés de l’enseignement, de la direction des novices, de la préparation des cours scientifiques, de l’administration intérieure. Les sorties qu’ils ont à faire sont plus rares, leurs absences moins prolongées et la règle de la clôture est, par conséquent, plus stricte en ce qui les concerne. Enfin, les ordres contemplatifs, comme ceux des chartreux, des trappistes, etc., ont conservé la clôture dans toute son austérité primitive. Le silence rigoureux, la prière, la méditation, le travail manuel, au sein d’une solitude absolue, se partagent leur existence. Des circonstances très rares, tout-à-fait exceptionnelles, leur permettent seulement de franchir le seuil du monastère.

En principe, le religieux ne peut quitter le monastère que pour un motif raisonnable. Il ne doit jamais le faire seul et sans l’assentiment de son supérieur ; et l’autorisation doit être renouvelée chaque fois.

2° Gravite de la violation de la clôture par les religieux. — On s’est demande si la sorlie du couvent, sans autorisation régulière, constituait une faute grave. Quelques auteurs ont soutenu la négative, pour le motif suivant. La clôture religieuse est imposée par la règle ; or la règle n’oblige pas sous peine de péché mortel. Par conséquent, une absence temporaire du couvent ne saurait entraîner une grave culpabilité. On répond à cette argumentation que les traditions générales des corps monastiques ont tellement confirmé l’usage de la clôture, que celle-ci fait partie aujourd’hui de la vie religieuse. L’observation de celle prescription générale est une obligation de conscience, ayant une portée considérable pour le maintien de la discipline régulière. Cette coutume s’est développée sous l’impulsion des décrets des souverains pontifes et des conciles. Ainsi Alexandre II, voulant réprimer la pérégrination des religieux, s’exprimait ainsi : Monachis quamvis religiosis ad iit/rmam sancti Benedicti intra claustruni niorari prœcipimus ; vicos, castella, civilates peragrare prohibemtut. Decr., c. II. Déjà, le concile de Chalcédoine (iôl) avait édicté le principe généra] suivant : lu loris in quibus se semel Deo dedicaverunl, permanentes, can. i. Mansi, t. vii, col. 385. Aussi, on conclut généralement de ces considérations, que le religieux qui quitte son couvent sans autorisation, pour un temps notable, pèche mortellement. Le concile de Trente interdit aux moines les exodes, même pour aller trouver leurs supérieurs généraux : Xmi licet regularibus a suis conventibus recedere, etiam prælexlu ad superiorcs suus accedendi,