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COMMUNION EUCHARISTIQUE (FRÉQUENTE)


louable et fructueuse. Une seule concession est faite aux difficultés des temps. La communion quotidienne n’est point louée dans les personnes trop occupées par les affaires séculières et profanes qui les détournent trop des choses divines. Il est vrai que saint Ignace dans ses Exercices spirituels, en traçant les règles que l’on doit observer pour être en communauté de sentiment avec l’Eglise, se contente de celle-ci relativement à la communion : Secundo, régula convenit solitam fieri sacerdoli confessionem peccalorum et eucharisties sacras sumplionem annuam ut minimum, cum sit laudabilius oclavo quoque die aut semel sallem in mense quolibet, servalis intérim conditionibus debitis, sacramentum ipsum suscipere. Mais l’on peut ne voir en cette détermination pratique, qu’un accommodement prudent et, ce semble, temporaire, aux habitudes invétérées de négligence dans la communion parmi les laïques. Il est également vrai qu’Ignace ne permet habituellement aux scolastiques de son ordre qu’une communion par semaine. Mais il en donne lui-même cette raison spéciale que les études exigent l’homme tout entier et laissent moins de loisir pour les prières et méditations prolongées. D’ailleurs la coutume exista toujours de concéder sur ce point quelques dispenses sans que cependant l’on atteignit jamais la communion quotidienne.

Conclusion de toute cette période. — Malgré un refroidissement général, surtout chez les laïques, dans la fréquentation de l’eucharistie, l’enseignement théologique est à peu près unanime à louer, en principe, la communion fréquente ou quotidienne. Les réserves assez souvent faites dans l’application pratique proviennent non de la sévérité des théologiens en fait de dispositions pratiques, mais des déplorables habitudes de négligence alors régnantes parmi les laïques et de l’extrême difficulté de les vaincre. L’on doit particulièrement remarquer que l’exemption de toute allection habituelle au péché véniel n’est requise par aucun théologien pour le fruit de la communion fréquente ou quotidienne.

4° Depuis le concile de Trente jusqu’au décret de 1610. — 1. Enseignement du concile de Trente, sess. XIII, c. il, vin. En définissant le but du rédempteur dans l’institution de l’eucharistie, le concile déclare que, dans 1° plan divin, elle doit être la nourriture spirituelle de nos âmes destinée à entretenir et à tortiller en nous la vie chrétienne, et l’antidote surnaturel qui nous délivre des fautes quotidiennes et préserve des péchés graves, c. n. Ces expressions, d’après le sens qu’elles avaient unanimement et depuis longtemps chez les Pères et les théologiens, S. Thomas, Sum. theol., III » , q. lxxix, a. 4, 6 ; q. i.xxx, a. 10, entraînent quelque fréquentation de la communion, même sa fréquentation quotidienne au moins comme possible ou désirable moyennant les dispositions requises. Un peu plus loin, le concile, déterminant ce qui concerne l’usage de ce sacrement, avertit, exhorte et supplie tous les chrétiens d’avoir pour ces divins mystères une telle foi ferme et constante, une telle dévotion, une telle piété, une telle religion, qu’ils puissent fréquemment recevoir ce pain surnaturel, ut panent illum supcrsubstantialem fréquenter suscipere possint, pour qu’il soit la vie et la perpétuelle force de l’âme, les soutenant dans ce -tir pèlerinage jusqu’à la pairie céleste, c. viii. I. pressions qui. d’après le langage (biologique depuis longtemps fixé et unanimement adopté, signifiaientnécessairement l’excellence et la souveraine utilité d’une fréquente communion bien faite, quoique les conditions de cette fréquence ne soient point particularisées. Ces déclarations formelles de la session XIII nous autorisent à conclure qu’à la Bession XXII, c. vi, le concile est sincère (fins le désir qu’il exprime incidemment que les fidèle : soi< m ai sez bien disposés pour pouvoir communier à toutes les messes qu’ils entendent. D’ailleurs

le décret doctrinal de la S. C. du Concile, du 12 février 1679, explique en ce sens ce passage du concile. Denzinger, Enchiridion, n. 1086.

A l’enseignement du concile de Trente, l’on doit joindre les vives exhortations du catéchisme du concile de Trente et du rituel romain. Le catéchisme du concile de Trente, promulgué par l’ordre de saint Pie V pour servir de guide à l’enseignement des pasteurs ecclésiastiques, propose comme règle très certaine à tous les fidèles la parole très vraie du pseudo-Ambroise : Sic vive ni quotidie possis suniere, qui résume fidèlement la doctrine commune des Pères et des théologiens. Le catéchisme romain demande que les pasteurs ecclésiastiques exhortent souvent les fidèles à avoir soin de nourrir chaque jour leur âme de ce divin sacrement, avec non moins de vigilance que leur corps, car l’âme n’a pas moins besoin de cet aliment surnaturel que le corps n’a besoin de la nourriture naturelle : Quarc parochi parali erunt fidèles crebro adhortariut queniadmodum corpori in singulos dies alimenta subministrare necessarium putent, ita eliam quotidie hoc sacramento alendx et nutriendæ animée, curam non abjiciant : neque enim minus spirituali cibo animam quam naturali corpus indigere perspicuuiu est. Part. II, c. iv, n. 63.

Le rituel romain publié par l’ordre du pape Paul V recommande aux curés d’employer tous leurs soins pour que les fidèles confiés à leur zèle honorent religieusement ce divin sacrement et le reçoivent saintement et fréquemment, surtout aux plus grandes létes de l’année, sancte frequenterque suscipiat, præserlim inmajoribus anm solemnitatibus. Rubricæ de sanctissimo eucharistise sacramento.

Mentionnons aussi la réponse de la S. C. du Concile du 21 janvier 1587. L’évêque de Brescia désirant remédier aux graves inconvénients qui lui paraissaient résulter de la communion quotidienne habituellement pratiquée par un assez grand nombre de laïques même peu instruits, très absorbés par les affaires séculières et engagés dans les liens du mariage, pratiquée aussi par plusieurs religieuses, tandis que d’autres ne communiaient que les dimanches et fêtes solennelles, sollicitait du saintsiège l’autorisation de permettre la distribution de la sainte eucharistie aux laïques et aux religieuses seulement les dimanches et fêtes et le mercredi et le vendredi de chaque semaine. La S. C. répond qu’une telle fixation n’est point conforme à la tradition ecclésiastique. Si l’usage quotidien de cet auguste sacrement a toujours été approuvé dans l’Eglise, celle-ci cependant n’a jamais fixé de jours auxquels on doive le recevoir plus fréquemment ou auxquels on doive s’en abstenir. Le concile de Trente, sans rien commander, s’est contenté de manifester le désir que les fidèles communient chaque jour à la messe. Rien de plus juste, car bien différentes sont les consciences particulières et les opérations de la grâce divine en chacune d’elles. Donc, pour les négociants, la fréquence de leurs communions doit être laissée au jugement de leurs confesseurs qui, connaissant l’intime de leurs coeurs, détermineront ce qui est utile à leur salut, suivant la pureté de leur conscience, le fruit de leurs fréquentes communions et leur progrès dans la piété. Que l’évêque se garde de détourner personne de] la communion fréquente ou quotidienne par un commandement uniforme ou de fixer universellement certains jours de communion. Mais qu’il indique ou laisse indiquer à chacun par les curés ou par les confesseurs ce qui lui convient et qu’il veille absolument à ce que personne ne soil écarté de la sainte table même s’il s’en approche fréquemment ou quotidiennement : illudque omnino provideat ut nemo a sacro ciinrivio seu fréquenter seu quotidie accesserit repellutur. Qu’il ait soin cependant que chacun communie dignement et plus ou moins souvent suivant sa dévotion et sa