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CONCUPISCENCE — CONDOBAUDITES

SU

Tout homme naît sujet à la concupiscence. Certaines natures confirmées en grâce, bien qu’en en gardant la possibilité, en éteignent en elles l’activité et tous les mouvements. Jésus, par le droit de son union hypostatique, Marie, par le privilège de son Immaculée-Conception (voir ce mot), ne connurent pas, ni ne purent connaître la concupiscence. — 1° En Jésus-Christ nous ne trouvons rien de ce trouble qui s’appelle la concupiscence. Sans doute, il a, comme nous, des sens extérieurs et des organes vivants, une sensibilité interne, une imagination vive, des désirs éveillés par les objets sensibles, des passions ; mais tout cela est ordonné, soumis à la raison et à la pensée surnaturelle, aucun de ces mouvements sensibles ne s’éveille sans la permission de l’esprit, tous suivent le cours qui leur est prescrit par la volonté surnaturalisée. Notre-Seigneur n’en est pas diminué, comme ne serait pas diminué un État dans lequel tous les sujets seraient parfaitement subordonnés et où il n’y aurait ni délits, ni répression. N’y a-t-il pas là au contraire un réel élément de grandeur ? Cf. S.Thomas, Sum. theol., III » , q. xv, a. 2.

2 « Le concile de Trente nous enseigne, sess. VI, eau. 23, que Marie, par un singulier privilège de Dieu, ne commit jamais aucune faute actuelle, ni mortelle, ni vénielle. Elle avait été préservée du péché originel lui-même. L’abondance des grâces lui avait été accordée, et elle y avait correspondu avec une fidélité parfaite. Nous pouvons conclure que de ces grâces et de cette conception immaculée résultait chez elle une parfaite subordination de ses sens à sa raison et de sa raison à la foi et à l’esprit surnaturel. Sa chair virginale ne connut jamais les mouvements désordonnés, même non coupables, qui assaillent les âmes les plus pures, et on peut considérer comme un des éléments propres à la psychologie de Marie l’heureuse préservation de la concupiscence. Cf. René-Marie de la Broise, La sainte Vierge, c. III, Paris, 1904, p. 57. Elle ignora toujours la concupiscence actuelle. Mais les théologiens se demandent si, en elle, il y eut ou non la concupiscence habituelle, utrum fomes in ea fuerit plane exlinctus an solum ligalus. Cf. Christ. Pesch, Prselect. theol., n. 59-1, Fribourg-en-Brisgau, 1896, t. iv, p. 286. Il importe de bien entendre la question, car les mots de fomes ligatus et de fomes exlinctus sont assez obscurs. L’homme ne naît pas d’ordinaire avec des facultés libres de toute détermination. L’hérédité lui transmet des dispositions, des inclinations natives, des aptitudes qui se feront jour ensuite dans le cours de son activité. Il y a d’heureuses âmes, héritières de traditions d’honneur et de vertu, qui naissent avec une inclination prononcée pour le bien et la droiture. On les voit ensuite suivre leurs pentes naturelles et devenir de grands saints. D’autres naissent sans prédisposition spéciale. En eux l’hérédité n’a pas gravé son empreinte, ou bien deux hérédités contraires se sont combattues et neutralisées. Cependant on en voit s’acheminer tout de suite dans les sentiers du bien et par leurs propres efforts acquérir une grande sainteté. Le résultat est le même de part et d’autre, le principe est différent : ici, le travail personnel seul ; là, le travail prévenu et aidé par l’hérédité. C’est une question pareille que celle de l’existence de la concupiscence en Marie. La grâce déposée en elle dans sa conception était elle accompagnée d’un don prélernaturel qui, à la façon d’une heureuse hérédité, l’inclinait positivement, la déterminait à soumettre tout son être, ses passions, ses appétits sensibles à la raison et à la loi ? flans ce cas, il y avait chez elle foyer de concupiscence éteint, fomes extinctut. Ou bien Dieu ne lui a-t-il donné que les dons surnaturels de la grâce, s.ms faveur prétern.iturelle de subordination des facultés inférieures aux supérieures, sans disposition native à suivre "n tout l’ordre du devoir ? Dans ce cas, il y aurait eu chez elle foyer de convoitise,

fomes, mais il aurait été ligatus, lié, paralysé par la fidélité actuelle de Marie aux moindres prescriptions de la loi morale.

Saint Thomas, Sum. theol., III a, q. xxvii, a. 3, moins pénétré que les théologiens postérieurs du privilège de l’Immaculée-Conception, crut, pour sauvegarder la situation spéciale du Christ, devoir lui réserver le privilège exclusif du fomes exlinctus et accorder à Marie, seulement l’honneur du fomes ligatus. D’autre part, Marie n’a pas participé aux autres dons préternaturels accordés à Adam, puisqu’elle a souffert et qu’elle est morte. Il n’y a donc pas eu en elle restitution complète de l’état primitif d’Adam et d’Eve. Mais il semble que ces raisons ne soient plus convaincantes, surtout depuis la mise en lumière et la définition du dogme de l’Immaculée-Conception. La prépondérance du Christ est suffisamment établie par le fait qu’il est au-dessus de toute concupiscence habituelle et actuelle par droit personnel, tandis que Marie en est préservée par pure grâce, venue des mérites de Notre-Seigneur. Ainsi est-elle immaculée sans pour cela être égalée à Jésus, puisque cette faveur ne lui a été octroyée qu’en vue et en vertu des mérites de son Fils. De plus, si elle a été destinée à souffrir et à mourir, tandis que nos premiers parents avaient été primitivement exempts de douleur et voués à l’immortalité, la raison en est dans le noble dessein de Jésus de l’associer à sa passion et à sa rédemption. Il paraît, au contraire, convenir à la générosité de Dieu, à l’amour de Jésus et à la virginale pureté de Marie que tout foyer même inefficace de mal ne soit pas en elle. N’était-il pas plus digne d’elle d’avoir une âme non seulement très sainte par le surnaturel, mais encore inclinée positivement par une sorte d’hérédité divine et de don préternaturel aux actions bonnes et à la fidélité à la raison et à la grâce ? Nous pensons dès lors qu’elle fut conçue préservée de toute concupiscence habituelle et en simple germe. Cf. A. -M. Lépicier, Tractatus de beatissima Virgine Maria matre Dei, part. II, c. i, a. 2, Paris, 1901, p. 145.

A. Chollet.

    1. CONCUPISCIBLE##


CONCUPISCIBLE. Voir Appétit, t. i, col. 1695.

    1. CONDIGNO (A)##


CONDIGNO (A). Voir Congruo (A).

    1. CONDOBAUDITES##


CONDOBAUDITES, hérétiques monophysites du VIe siècle, ainsi dénommés du quartier de Constantinople, xà KtovôoëaûSo’j, où leurs principaux chefs avaient l’habitude de se réunir. Du Cange, Constanlinopolis christiana, t. ii, p. 132. D’après le prêtre Timolhée, De Us qui ad Ecclesiam accedunt, P. G., t. lxxxvi a, col. 53, les condobaudites formaient la sixième secte des monophysites ; ils étaient sévériens et même agnoètes, voir t. I, col. 586 sq., et ne différaient de ces derniers que pour des questions de personnes, les agnoètes admettant dans leur communion Dioscore, Pierre Monge, Sévère et le diacre Thémistiiis d’Alexandrie, les condobaudites, au contraire, rejetant ce dernier. Agnoètes et condobaudites s’appelaient d’abord théodosiens, du nom du patriarche d’Alexandrie, qui était leur chef de file, mais ce Théodose se brouilla avec les premiers, à cause de l’ignorance du jour du jugement qu’ils prêtaient au Christ, avec les seconds, parce qu’ils ne voulaient pas admettre sa propre doctrine sur la Trinité. Les uns comme les autres furent exilés par Théodose, et les condobaudites se réfugièrent à Constantinople, qui devint leur quartier principal. Timothée, op. cit., P. <’., t. LXXXVI a, col. 57 ; Nicéphore Calliste, II. E., . XVIII, 19, /’. <’-, t. cxlvii, col. 429. Le même Timothée, lor. cit., assure que les condobaudites reconnaissaient un Dieu unique par le nombre, mais non quant à la parfaite égalité ; ils appelaient, de plus, saints le Père, le Fils et le Saint-Esprit. Pour le reste, leur doctrine se confondait avec celles des agnoètes. S. VailhiÏ.