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CONFESSION DU I er AU XIIIe SIÈCLE
« L’habit de moine, » le c/r^a (j.ova-/ov, l’âyiov

cr/riua, conférait à ceux qui le revêtaient une espèce de sainteté qui, selon quelques-uns, pouvait équivaloir au pouvoir sacerdotal. Sur la puissance de ce saint haliit, voir Michaël Glykas, Epist., xxv, P. G., t. clviii, col. 937 sq. ; cf. K. Holl, op. cit., p. 208, 321. De là vint qu’on s’adressa parfois aux moines non prêtres, aussi bien qu’aux Upo^ova/oi, pour la confession sacramentelle.

Certains critiques font remonter cet abus à saint Basile et à sa Règle. Nous avons vu plus haut que Basile recommandait aux religieux coupables de quelque faute grave de s’adresser à des directeurs spéciaux, « à ceux qui avaient la dispensation des mystères de Dieu. » Ces dispensateurs « qui ont le pouvoir de lier et de délier » , liegulse brevius Iractatæ interrogat. 261, col. 1260, sont, d’après nous, revêtus du caractère sacerdotal. M. Holl, au contraire, estime qu’il s’agit simplement du supérieur, Tiposorw ;, ou de ceux qui, en son absence et avec son approbation, étaient chargés de « distribuer la nourriture spirituelle » aux cénobites et de « dispenser la doctrine avec discernement » , comme l’indique l’interrogat. 45 des Regulie brevius tractatse, col. 1032-1033. Il rapproche les mots : o’ixovoij.eî’v toÙ ; Xôyoy ; èv xp ; <7Ei (qui sont d’ailleurs empruntés au Ps. cxi, 5), des expressions semblables que saint Grégoire de Nysse emploie au début de son Epitre canonique, pour montrer la difficulté d’adresser aux pécheurs pénitents des paroles judicieuses et justes : ïaxi £à où mxpôv à’pyov tô to - j ; Ttept tojtwv (se. t<j5v (UTavooOvTCOv) Xôyovç oîxovojjLTjuac èv tï) ôpQyj te xai SeSoxijvaffpLÉvrj x ?i<7Ei xarà tô TrapâyyeXjJia toû 7tpoçY|Tou to xeXsvov Ssïv oîxovopiEÏv tou ; Xôyouç èv xpiasi. Epist. canon. , can. 1, P. G., t. xlv, col. 221. Cf. Holl, op. cit., p. 264-265, et note. Mais ce rapprochement irait plutôt à prouver que les dispensateurs de la parole sont revêtus du caractère sacerdotal, car, dans le système de saint Grégoire de Nysse, « l’économe de la pénitence » n’est autre que celui qui a la charge de gouverner l’Église, c’est-à-dire l’évéque. Epist. can., can. 5, 7, col. 231, 236. Pris en lui-même, le texte de saint Basile allégué par M. Holl n’est nullement démonstratif. Si dans l’interrogat. 45 les dispensateurs de la doctrine sont le supérieur et quelques subordonnés de son choix, il ne s’ensuit pas que les confesseurs indiqués dans les interrogat. 261 et 288 soient nécessairement les mêmes personnages. D’ailleurs, il suffisait que les premiers fussent prêtres, pour que toute difficulté fût levée ; ils auraient cumulé ainsi indistinctement les fonctions de directeurs de conscience et de confesseurs munis du pouvoir d’absoudre.

Ce qui reste vrai, c’est que la distinction entre ces divers oflices n’est pas clairement exprimée dans les ouvrages ascétiques de saint Basile, et qu’avec le temps la confusion des deux fonctions a dû se produire. La même équivoque se retrouve dans les écrits d’Anastase le Sinaitoi On peut toujours se demander si les ttveu(iXTiy.oi avîp ;  ; auxquels il renvoie les pécheurs sont nécessairement des prêtres. Il les appelle les « disciples du Christ » , les « thérapeutes de Dieu » , les « économes du salut » , mais il ne dit nulle part qu’ils doivent avoir le pouvoir d’ordre. Quæsliones et responsa, P. G., t. lxxxix, col. 369, 372, 373.

lu pratique, les fidèles arrivèrent aisément à se per uader que les moines, par le seul fait qu’ils prati quaient l’ascèse, étaient des nvevttaTixof et possédaient

uvoir de remettre les péchés. Théodoret raconte

qu’un Ismaélite alla trouver saint Siméon Stxlite pour

onfesser d’avoir, malgré son vœu, voulu manger de

la chair et pour obtenir le pardon de sa faute « par 1rs

pli’res toutes puissantes du saint » : m ; 5v ~aï ; tovto LOt( otvToO eùyaîc îcôv Se<7|A<j>v a-jTov tr, ; àjxaoTia ;

IxXvatce. fiist. relig., c. xxvi, P. G., t. i.xxxii, col. 1177.

DICT. DL TIltOL. CATIIOL.

Nous lisons dans Jean Moschus qu’un moine, recevant la confession d’un étranger, lui fait détailler ses fautes afin de pouvoir lui donner une pénitence appropriée, Ta èmTqjua selon le langage canonique : El 8é).siç iarpsia ; TUysîv, Elite (1.01 elç à).T|f)scav xàç Ttpàijsii ; 0°0’j, 07ta> ; y.àyù) raytatç àpfxoïovTa îrpoo-âyu) Ta èirtT : |iia. Pratum spirituale, c. lxxviii, P. G., t. lxxxvii, col. 2933. C’est qu’en effet, ajoute-t-il, la fornication ne se traite pas comme l’homicide, et ainsi des autres péchés : "AXXioç yàp ÔEpaTtEVETai 6 irôpvo ; xai ETÉptoç ô çovsùç xai à’H.oiç o <papf*axôç xa É’tEpov tô toû 7t), eov£xto’J por, 8r, ixa. La vie de Paul le Jeune fournit des exemples du même genre. Nombre de personnes, 710X).oi, s’adressaient au saint moine qui avait la réputation d’être un excellent médecin des âmes ; il avait d’ailleurs la plénitude des « charismes » et possédait notamment le pouvoir « de lier et délier » : |ierà yàp tc5v aXXcav v E|LitXe(oç ûuripxô -/ a P’o-, u-aT<ov à n=yaç, ovSs àirooroXixtov ète’Xei jrapiTeov xai toù Ssup.EÎv te xai X-Jeiv aixoipo ;. Vita Pauli Junioris, c. xxxii, dans Analecta bollandiana, t. xi, p. 142, cf. p. 66.

Le fait suivant témoigne que parfois les pécheurs ne s’enquéraient guère de savoir si le moine auquel ils s’adressaient était prêtre ou non. Au synode de 869 (IXe session), le protospathaire Théodore comparut devant les légats du pape pour répondre à une accusation portée contre lui. Nous transcrivons le dialogue qui s’établit entre le coupable et ses juges : « Vous ètes-vous confessé et avez-vous reçu une pénitence pour votre péché ? » Théodore répondit : « Oui. » Les très saints légats (vicarii) dirent : « A qui vous êtes-vous confessé et de qui avez-vous reçu votre pénitence, epitimium ? » Théodore dit : « Celui qui m’a donné une pénitence est mort. » Les très saints légats de la vieille Rome dirent : « Comment s’appelait-il ? « Théodore dit : « Je ne sais pas, je sais seulement qu’il était cartophylax, qu’il avait la tonsure et qu’il a passé quarante ans sur une colonne. » Les très saints légats dirent : « Etait-il prêtre ? » Théodore dit : « Je ne sais pas ; il était abbé, et j’avais foi en cet homme, et je nie suis confessé à lui. » Les très saints légats dirent : « . Et avez-vous fait votre pénitence ? » Théodore dit : « Grâces à Dieu, je l’ai faite, parce que je suis chrétien. » Les très saints légats de la vieille Borne dirent : « L’avez-vous achevée ou non ? « Théodore dit : « Me voici, je l’achève, ecce homo, compleo ea. » Mansi, Concil., t. xvi, col. 150151. Ce dialogue n’a-t-il pas son éloquence ?

Il serait aisé de glaner dans l’histoire du monachisme grec d’autres faits non moins significatifs. Cf. Karl Holl, op. cit., p. 312-323. Mais il importe davantage de montrer que cette pratique correspondait à un droit ou prétendu droit que s’arrogeaient les moines. Un historien moderne fait observer, pour la période qui nous occupe, o que certains milieux monastiques peu éclairés n’attachaient pas toujours une suffisante importance au pouvoir d’ordre… En ce qui regarde la pénitence, ajoute-t-il, ils prétendaient que -le pouvoir de remettre les péchés constitue moins une prérogative du sacerdoce qu’un charisme de la sainteté. » Et l’auteur justifie sa remarque par l’autorité de Barsanuphe., 1. Pargoire, L’Église byzantine de 527 à 8-17, Paris, 1905, p. 96 ; Barsanuphe, Bt’6).o ; <>My_(i>^O.t<r : itr t 7T£piÉv_ov<7a à^oxpiaEi ; Bao-pavouçiou xai’Iuâvvou, (dit. posthume de N’icomède l’hagiorite, Venise, 1816, p. 72, 113, 307, cf. p. 7 de la préface.

La responsabilité de cette théorie remonterait beaucoup plus haut. Le patriarche Nicéphore (si les canons qu’on lui attribue sont bien de lui) se pose nettement la question de savoir si un moine dépourvu du caractère sacerdotal peut exercer le ministère pénitenliel, et il répond par l’affirmative : si Sa xa tôv lt ïyovTa Upw<rjVY)v Biô’o’vai xaTa à-opiav TtpE<76uTÉpo’j xai -ittiv ïtfiOOidvTo ;, o’Jx ï^m toO eixÔTo ; xai tôv aTtXô) ; |j.ova/ôv

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