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CONFIRMATION DANS LA SAINTE ÉCRITURE


core qu’il descend, 13. Ils imposent les mains : les Samaritains le reçoivent, 17. Les Éphésiens sont baptisés, Act., xix, 5, et quand Paul leur a imposé les mains, l’Esprit-Saint vient sur eux, 6. Évidemment tout antécédent n’est pas cause, mais celui-là seul qui est nécessaire et suffisant. Or, précisément, l’imposition des mains n’est-elle pas présentée dans ces deux récits comme la condition sine qua non de la venue de l’Esprit, condition que ne supplée aucune autre : foi du sujet, baptême, miracle, prière de Pierre, de Jean et de Paul. Et, d’autre part, Luc ne montre-t-il pas qu’aussitôt posée, elle est suivie d’effets, non pas évidemment parce que ce simple geste peut par lui-même contraindre l’Esprit à venir, mais parce que Dieu a décidé de donner sa grâce quand ce rite s’accomplira et parce qu’il s’accomplit. La formule des Actes, xix, 6, est très heureuse : « Quand Paul eut imposé les mains, l’Esprit vint sur eux. » Et cette explication admise, on comprend mieux pourquoi Pierre et Jean ont dû se déplacer, pourquoi leur prière n’a pas suffi, pourquoi seuls ils imposent les mains.

Non seulement le texte suggère cette interprétation, il l’exprime. Sans doute, c’est en exposant la pensée d’un magicien qui a pu comprendre la collation de l’Esprit comme il expliquait ses propres sortilèges. « Lorsque Simon vit que c’était par l’imposition des mains des apôtres que l’Esprit était donné, il leur offrit de l’argent, disant : Donnez-moi ce pouvoir afin que celui à qui j’imposerai les mains reçoive le Saint-Esprit. » Act., viii, 18, 19. Mais il faut noter que la croyance à l’efficacité du rite ne s’accuse pas seulement dans les paroles prêtées au magicien, 19* ; mais dans la réflexion du rédacteur. 18. Elle est même plus fortement affirmée par l’écrivain chrétien que par le Samaritain. Puis, le récit ne porte pas : Simon s’imagina, mais Simon vit que par l’imposition des mains l’Esprit était donné. Enfin, Pierre ne dit pas au magicien que sa demande est inspirée par une grossière croyance ou par une conception erronée, mais que ses intentions ne sont pas droites et que le don de Dieu ne s’acquiert pas à prix d’argent. Act., viii, 20, 21. En présence de textes aussi formels, des critiques n’hésitent pas à reconnaître que les Actes attribuent une efficacité, instrumentale sans doute, mais réelle, aux gestes de Pierre, de Jean et de Paul. « Les apôtres demeurés à Jérusalem, écrit 1I.-J. Holtzmann, envoient les deux principaux d’entre eux communiquer le Saint-Esprit ; ce qui se fait ensuite sacramentaliler, de telle sorte que l’imposition des mains est considérée comme un sijmbidum ef/icax. » Die Aposlelgescliichte, 2e éflit., Eribourg et Leipzig, 1901, t. I, p. 64. Et B. Weiss commente ainsi la parole d’Ananie à Paul, Act., ix, 17 (qui confirme, en effet, les récits de l’initiation des Samaritains et des Éphésiens, mais à laquelle nous n’avons pourtant pas voulu recourir, à cause des points d’interrogation, dont il faut la faire suivre, voir col. 985) : « Ici il est clair que les deux effets guérison de la cécité, don de l’Esprit] sont sans dout2 communiqués par l’imposition des mains, mais opérés par le Christ et par son envoyé. » Die Apostelgeschichle, dans Texte und Untersuchungen, Leipzig, 1893, t. ix, p. 197. On ne saurait mieux dire.

Ceux qui se dérobent à ces conclusions font-ils valoir quelques preuves.’1 Pas toujours : certains se contentent d’affirmer. Plusieurs ont recours à des théories philosophiques et prétendent que l’efficacité, décrite plus haut, est trop matérielle, trop grossière, Irop magique, pour qu’on puisse la découvrir dans le Nouveau Testament ; il ne convient pas que les apôtres et Jésus aient ainsi compris l’imposition des mains. — Ce n’est pas le lieu de discuter des principes purement rationnels ; d’ailleurs, ces raisonnements et d’autres semblables peuvent être reproduits à propos du baptême et de plusieurs cérémonies. Voir Sacrements en général.

Ces’, là aussi que trouvera place une autre objection :

l’attribution d’une pareille efficacité à un rite est contraire à l’esprit de la chrétienté primitive…Au reste, ceux qui hasardent cette affirmation ne prennent pas toujours la peine de la démontrer. Voir par exemple, un des derniers qui l’ait lancée, A. Seeberg, Ber Katechismus der Urchristenheit, Leipzig, 1903, p. 225. Ce théologien présente, il est vrai, une deuxième objection qui semble d’abord mieux appuyée. D’après les Épitres de saint Paul, c’est Dieu lui-même qui envoie l’Esprit dans le cœur de l’homme. — Soit, mais l’envoie-t-il directement, sans recourir à un intermédiaire humain, à un rite extérieur ? Là est toute la question : Seeberg ne la touche pas. Si l’on suppose que Paul la résout par l’affirmative, il faudra conclure seulement que sa pensée n’est pas celle de l’auteur des Actes : le problème sera posé et discuté plus loin. Mais si on étudie Luc dans Luc, on est obligé de convenir qu’aucun texte ne contredit les conclusions suggérées par les récits de l’initiation des Samaritains et des Éphésiens. On serait plutôt tenté de relever des traits qui confirment cette conception : parlant du baptême, l’écrivain dit qu’on le reçoit, « au nom du Christ, pour la rémission des péchés. » Act., ii, 38. Et il semble affirmer que par l’imposition des mains, Jésus et Paul ont opéré desguérisons. Luc, iv, 40 ; xiii, 13 ; Act., xxviii, 8.

Fallait-il prononcer quelque formule pour donner au rite sa vertu ? Luc ne l’affirme pas clairement. Sans doute, il observe que Pierre et Jean ont prié avant d’imposer les mains. Act., viii, 15. Mais était-ce pour attirer l’Esprit ou pour le communiquer ? Les Actes ne le disent pas. Et l’intervalle qui, dans le récit, sépare le geste, }. 17, de la prière, ꝟ. 15, porte plutôt le lecteur à nier que la demande des apôtres ait composé avec l’imposition des mains un seul et même rite. Nous ne savons pas non plus si à Éphèse Paul a parlé en imposant les mains. Quant à la phrase par laquelle Ananie souligne l’acte de l’imposition, elle semble moins une prière qu’une explication et une formule de présentation. Act., ix, 17. Aussi l’érudit le plus soucieux de découvrir dans l’Écriture une parole qui accompagnait l’imposition des mains, est-il réduit à prendre pour point de départ des hypothèses vraisemblables. Celui qui imposait les mains, écrit A. Seeberg, op. cit., p. 225 sq., le faisait-il sans mot dire ? C’est peu probable. S’il parlait, exprimait-il n’importe quelle idée qui se présentait à son esprit ? On ne peut guère l’admettre, car il accomplissait un acte qui se répétait, toujours tendait au même but et répondait à un concepprécis. Tout naturellement aussi, pour énoncer une même idée, les mêmes mots se présentaient. « Nous devons donc postuler a priori l’existence d’un texte bien établi qui était récité pendant l’imposition des mains. » Il est permis de penser que l’auteur fait preuve d’une confiante perspicacité et d’une belle assurance. Il faut avouer néanmoins que son raisonnement n’est pas dépourvu de toute valeur. Cf. P. Pourrat, La théologie sarramentairc, 2e édit., Paris, 19l)7, p. 49, 90.

Celui qui imposait les mains conférait-il une onction ? Luc et les Actes ne le disent pas, et le plus sage parli serait d’enregistrer ce silence. Des théologiens ont observé qu’il ne prouvait rien contre l’existence de cette cérémonie. Luc, ont-ils dit, a voulu abréger et ayant désigné suffisamment le rite par un des actes qu’il comportait, il a cru inutile de mentionner l’onction, que d’ailleurs ses lecteurs savaient être l’accompagnement normal de la cérémonie expressément nommée par lui. Peut-être d’ailleurs était-ce le même geste vu sous un autre aspect, s’il est vrai que l’imposition des mains contenue dans l’onction est celle qui donne l’I.sprit-Saint. Voir liellarmin, Controvers., De sacramentis in specie, I. ii, De sacramento confirmationis, c. ix, Operaomnia, Paris, 1871, t. iii, p. 008 sq., dont les explications ont été reproduites par plusieurs théologiens.