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CONFIRMATION DANS LA SAINTE ÉCRITURE


Le quatrième Évangile est aussi d’accord avec les synoptiques pour attester que Jésus a promis l’Esprit aux disciples. Le Christ priera et le Père le leur donnera, xiv, 16 ; il l’enverra au nom du Christ, xiv, 26. Jésus est donc en droit de dire que lui-même enverra le Paraclet, xv, 26 ; XVI, 7. Le monde ne voit pas et ne connaît pas cet Esprit, mais il sera dans les disciples, xiv, 17, et ce ne sont pas seulement les douze, mais tous les croyants qui le recevront, vii, 38, 39, sans doute jusqu’à la fin des temps, car il demeurera avec les fidèles éternellement, xiv, 16.

Qu’est-ce que ce don ? A quoi est-il destiné ? Jésus promet un Ktxpiv.Xr^oi ;, xiv, 16, 26 ; xv, 26, c’est-à-dire un auxiliaire, un avocat, un tuteur. C’est l’Esprit de vérité, xiv, 17 ; xv, 26 ; xvi, 13 ; il parlera d’après ce qu’il a entendu de Dieu, rappellera ce que Jésus a dit, enseignera toutes choses, conduira dans toute vérité, donnera l’intelligence des leçons du Christ, xiv, 26 ; xvi, 13 ; annoncera l’avenir, xvi, 13. C’est sans doute aussi l’Esprit qu’il faut voir dans cette onction du Saint qui permet de discerner les antéchrists, qui apprend à distinguer le vrai du faux, qui instruit en toutes choses au point de rendre superflue toute autre prédication. I Joa., il, 20, 21, 27. L’Apocalypse le présente aussi comme un conseiller, un éducateur, l’organe de la révélation, il, 7 ; xiv, 13 ; iii, 6, 13, 22. Et puisqu’il est l’Esprit de vérité, il rend témoignage. I Joa., v, 6 ; Joa., xv, 26. On surprend ici l’écho du langage de Luc. Le Paraclet glorifie le Fils, xvi, 14 ; convainc le monde, xvi, 8 sq. ; il est témoin avec l’eau et le sang, c’est-à-dire il manifeste le Verbe au baptême et à la passion de Jésus, ou bien il rend témoignage au Christ en vivifiant l’eau du baptême et le sang de l’eucharistie. I Joa., v, 7, 8. A leur tour, ceux qui ont reçu l’Esprit rendent témoignage au Christ. Joa., xv, 27. C’est la promesse des synoptiques. On a même cru pouvoir découvrir (sur un indice bien vague, il est vrai, ni, 33, rapproché de I Joa., v, 9, 10), dans le quatrième Évangile une allusion à un sceau imprimé par l’Esprit au baptême et « qui ferait de chaque fidèle une attestation vivante de la véracité divine » . Loisy, op. cit., p. 341.

Ce qui est certain, c’est que, d’après la première Epi-Ire, grâce à ce don, les croyants demeurent en Jésus et Jésus demeure en eux, ii, 27, 28 ; iii, 21 ; iv, 13. Ainsi, à n’en pas douter, l’Esprit n’est pas et ne donne pas seulement le pouvoir d’opérer des prodiges ou de rendre des oracles. Tout le monde s’accorde à le reconnaître ; l’œuvre du Paraclet continue l’œuvre du Christ. L’Esprit commence sa tâche quand le Verbe incarné achève la sienne, et les deux tâches n’en font qu’une. Le Père a envoyé le Fils préexistant, il agit en lui et par lui ; Jésus le révèle, lui rend témoignage, le glorifie, et ainsi il est pour les hommes la lumière, la vérité, la vie : qui demeure en lui, demeure dans le Père. De même, le Saint-Esprit préexistant est envoyé par le Père et par Jésus ; tous deux opèrent leur œuvre en lui et par lui ; l’Esprit les manifeste, est leur témoin, les glorifie, et par là, il est pour les croyants un maître et un second tuteur, un lien d’amour entre eux et le Christ. Le quatrième Évangile parle une langue originale, présente des considérations et essaie des rapprochements nouveaux ; mais, comme les écrits de Luc, il montre dans l’Esprit un principe de lumière et une source de force, un don qui crée le parfait chrétien, un témoin divin qui recrute, éclaire et soutient les témoins humains.

Ce Paraclet est-il communiqué aux chrétiens dans le baptême et dans le baptême seulement ? On a observé que maintes fois l’Esprit est associé à l’eau : Jésus affirme qu’il faut naître d’eau et d’Esprit. Joa., ni, 5. Il invite ceux qui ont soif à venir à lui et à boire, ajoutant que des fleuves d’eau vive jailliront de leur sein ; or, « il disait cela de l’Esprit que devaient recevoir ceux qui croiraient en lui, » vii, 38 39. Cette promesse

rappelle celle que le Christ fit à la Samaritaine d’une eau vive qui calme la soif et qui jaillit en la vie éternelle, iv, 10, 14. Enfin, l’Esprit, l’eau et le sang rendent témoignage. I Joa., v, 7, 8. Pour expliquer ces textes, il suffirait peut-être de soutenir que le Paraclet est avec l’eau principe de régénération, source de la vie éternelle et témoin du Verbe, ou encore d’affirmer qu’il donne au baptême la vertu de régénérer, de sauver les hommes et de manifester le Fils. Si on va plus loin, le plus avant possible, si on admet que ces paroles rattachent au rite du baptême la communication du Paraclet, qu’elles font allusion à deux éléments, au symbole et à la réalité, « l’un figurant et contenant en quelque façon l’autre ; » si l’on pense que l’initiation chrétienne est pour le quatrième Évangile une régénération et une sanctification par l’Esprit, que l’eau est le véhicule de ce don comme le sang de l’eucharistie est le canal de la vie, Loisy, op. cit., p. 112-116, 310-314, 351, 522-523, on n’a pas encore démontré que dans l’ablution seule toutes les promesses du Sauveur se réalisent pleinement. L’eau ne pourrait-elle pas désigner l’ensemble des rites de l’initiation et non pas la seule ablution ? Si on estime que l’épisode de la Samaritaine fait écho au récit de la conversion de ses compatriotes relatée dans les Actes, l’eau vive demandée par la femme rappelant l’Esprit que Simon veut acheter, Loisy, op. cit., p. 351, on pourrait peut-être conclure que le quatrième Évangile connaît et mentionne le don divin communiqué par l’imposition des mains. Mais l’indice est faible, et, en réalité, les écrits johanniques ne désignent expressément que l’eau. Seulement il n’est pas démontré du tout que l’Esprit figuré et contenu dans cet élément ne puisse être l’objet d’une communication postérieure et complémentaire. Au contraire, car ce qui est attribué à l’eau, c’est seulement la vertu de régénérer, de produire des enfants de Dieu, de jaillir pour la vie éternelle et d’être témoin du Verbe, précieuses grâces mais qui n’épuisent pas tout le contenu des promesses de Jésus. Le don du baptême pourrait donc laisser place à un second envoi du Paraclet qui viendrait, cette fois, pour être le tuteur des chrétiens, leur maître dans la vérité et pour leur permettre de rendre témoignage avec lui.

Si les écrits johanniques n’affirment pas que seul le baptême donne l’Esprit, font-ils allusion à un rite distinct de l’ablution et destiné à communiquer le Paraclet ? Schell, op. cit., p. 483, a proposé de comprendre ainsi une parole de Jésus, Joa., x, 10 : « Je suis venu pour qu’ils aient la vie (par le baptême) et qu’ils l’aient plus abondamment (par la confirmation). » Mais le texte original se refuse à cette interprétation : de l’avis des meilleurs exégètes, il signifie que Jésus est venu pour communiquer la vie spirituelle et pour la communiquer large, copieuse, surabondante. C’est aussi sans preuve suffisante que le même théologien, op. cit., p. 508 (voir encore Janssens, op. cit., p. 188-189), voit dans le signe marqué au front des serviteurs de Dieu, Apoc, vu, 3 ; xxii, 4, le caractère imprimé par la confirmation. Les textes permettent seulement de conclure que cette marque est la contre-partie de celle de la bête, Apoc, xiii, 16, 17 ; xiv, 9, 11 ; xvi, 2 ; xix, 20 ; xx, 4 ; et qu’elle est le nom de Dieu, XXII, 4, celui de l’agneau et du Père, xiv, 1.

Un plus grand nombre d’écrivains, depuis saint Cyprien, Episl., uni, n. 1, P. L., t. iii, col. 1056, jusqu’à nos jours, ont cru que Jésus avait révélé à Nicodème, Joa., ni, 5, une double génération spirituelle ou du moins une renaissance en deux actes : l’ablution d’eau ou l’immersion, et l’effusion de l’Esprit ou l’imposition des mains. En réalité, le texte biblique ne parait ni favoriser, ni permettre cette exégèse. Il semble insister sur l’unité de la régénération. Sans doute, elle suppose deux éléments, deux réalités, deux principes, l’un divin et spirituel, l’autre terrestre et matériel.