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1049 CONFIRMATION D’APRÈS LES PÈRES GRECS ET LATINS

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pouvoir de confirmer ; c’est pourtant là l’antique usage de notre Église. Néanmoins nous l’accordons…, etc. » Epist., 1. IV, epist. xxvi, P. L., t. lxxvii, col. 696. C’était donc que, dans l’Église latine, l’évêque était regardé comme le ministre ordinaire de ce sacrement, tandis que le simple prêtre, dans certains cas et avec l’autorisation du pape, pouvait en être le ministre extraordinaire. Et c’est encore la doctrine d’aujourd’hui.

Quant à la question de savoir si la dignité morale du ministre importait à la validité du sacrement, elle ne se posa dans toute sa rigueur qu’à l’époque des donatistes. Déjà, au ine siècle, saint Cyprien acceptait comme valide l’onction pratiquée au sein de l’Église par un ministre coupable, tandis qu’il la jugeait nulle, si elle était faite en dehors de l’Église par un hérétique ou un schismatique. Les Églises de Rome et d’Alexandrie, qui admettaient la validité du baptême des hérétiques, rejetaient cependant le rite de la confirmation conféré par eux. Ce rite devait donc être réitéré pour l’hérétique qui demandait à rentrer dans l’Église. Duchesne, Origines du culte chrétien, Paris, 1889, p. 326. Hefele, Histoiredes conciles, trad.Leclercq, 1. 1, p. 175-176, croit que la réponse du pape saint Etienne contient une allusion à la réitération de la confirmation par les hérétiques. Cf. L. Saltet, Les réordinations, Paris, 1907, p. 18-22. Saint Cyprien s’autorisait de cette pratique pour accuser d’inconséquence les antirebaptisants. Epist., lxxiii, n. 6, P. L., t. iii, col. 1114. Saint Augustin, au contraire, à l’encontre des prétentions donatistes, se prononça pour la validité dans les deux cas. De bapt. cont. donat., V, xx, 27, 28, P. L., t. xliii, col. 190. A ses yeux la culpabilité du ministre ne nuit pas à la validité du sacrement. Le sacrement de confirmation, comme celui du baptême dont il parle, vaut par lui-même, parce qu’il est de Dieu et non de l’homme. Le ministre ne saurait intercepter le bienfait divin. Et appliquant ce principe à l’onction, il dit : Oleum Christi elsi per peccalorem ministretur, non est oleum peccatoris. .. Non intercipit médius minister beneficium largitoris. Serm., cclvi, 1, P. L., t. xxxviii, col. 1225. C’est la doctrine actuelle.

L’usage de réitérer la confirmation donnée par les hérétiques se constate encore au Ve siècle. Au IIe concile d’Arles (443 ou 452), on prescrit (can. 17) de réconcilier les bonosiens par l’onction du chrême et l’imposition des mains. Hefele, op. cit., t. il, p. 467. Gennade de Marseille, De ecclesiasticis dogmatibus, 52, P. L., t. lviii, col. 993-994, atteste le même usage. Le 7e canon de Constantinople, bien que n’émanant pas du concile œcuménique de 381, témoigne cependant de l’usage de l’Église grecque au v c siècle. Il prescrit de réconcilier les hérétiques, dont le baptême est accepté, en les marquant du saint chrême avec la formule de la confirmation. Hefele, op. cit., t. H, p. 35. Ce canon a été inséré dans le concile in Trullo, can. 95, et est entré ainsi dans le droit canonique byzantin. Mais, à Rome, dans la seconde moitié du ive siècle ou plus tard, la réconciliation des hérétiques s’est faite par la seule imposition des mains. Cf. S. Grégoire le Grand, Epist., 1. XI, epist. lxvii, P. L., t. lxxvii, col. 1205. Voir P. Morin, Comment, hist. de disciplina in administralione sacramenti pxiiilenliæ 1. IX, c. ix-xiii, Anvers, 1682, p. 639-658. Sur l’explication de ces faits, voir P. Pourrat, La théologie sacramentaire, p. 191-194 ; L. Saltet, Les réordinations, p. 404-406.

Dans l’Église grecque.

Tout autre a été l’usage

d’Orient. Sans doute, au ine siècle, saint Firmilien, évéque de Césarée en Cappadoce, estimait que le pouvoir d’imposer les mains, c’est-à-dire de confirmer, appartenait comme celui de baptiser et d’ordonner à l’évêque, Epist., i.xxv, 7, P. L., t. iii, col. 1161 ; et, à la fin du ivsiècle, saint Chrysostome disait que le privilège de donner le Saint-Esprit revenait de droit aux

principaux du clergé, aux évêques. In Act., homil. xviii, 3, P. G., t. lx, col. 144. Mais ce pouvoir ou ce privilège ne fut pas regardé comme exclusif. Dès la formation des paroisses, non seulement on l’accorda aux simples prêtres à titre exceptionnel, mais il leur fut dévolu à titre permanent. Nous en avons un double témoignage pour l’Egypte, et en particulier pour Alexandrie, dans l’Ambrosiastre, In Eph., iv, 11, P. L., t. xvii, col. 388, et dans l’auteur des Quæstiones Vel. et Novi Testamenti, q. ci, P. L., t. xxxv, col. 2302. Ce fut l’usage de l’Église grecque : tout prêtre qui baptisait donnait également le Saint-Esprit par l’onction chrismale faite en forme de croix sur le front du baptisé. Ce qui n’était qu’un privilège exceptionnel, chez les Latins, fut la règle ordinaire chez les Grecs.

VII. Sujet.

Le baptisé seul peut recevoir le sacrement de la confirmation, et il le reçoit après le baptême et avant l’eucharistie, dans la cérémonie solennelle de l’initiation chrétienne. Dans le cas où le baptême a été conféré seul par un prêtre ou par un diacre, ou même par un laïque, le baptisé doit recourir, dès qu’il le peut, à l’évêque pour recevoir de lui le Saint-Esprit. Bien préparé, il reçoit le caractère et les grâces propres du sacrement de confirmation ; mal préparé ou dans de mauvaises dispositions morales, il reçoit le sacrement, mais non la grâce du sacrement. C’est ce qui faisait dire à saint Cyrille de Jérusalem que la communication du Saint-Esprit est proportionnelle à la foi de celui qui le reçoit, xatà àvaXo-fi’av ttjç êxiarou tz’.gzkjô ;, Cat., I, 5, P. G., t. xxxiii, col. 377. Et c’est ce que la controverse donatiste permit à saint Augustin de mettre en lumière. Il dit du baptême : Non eorum meritis, a quibus minislratur, nec eorum quibus ministratur, constat baplismus, sed propria sanctitate atque veritate, propter eum a quo institutus est. Cont. Cresc, IV, xvi, 19, P. L., t. xliii, col. 559. C’est dire par conséquent que la valeur du baptême est indépendante et de celui que le confère et de celui qui le reçoit. Or, ce principe s’applique à la confirmation ; sa valeur est indépendante du ministre et du sujet. Un autre principe, également proclamé par l’évêque d’Hippone, c’est celui de l’efficacité du sacrement, qui peut être arrêtée par la faute de celui qui le reçoit et comme tenue en suspens tant que l’obstacle persiste, mais qui, l’obstacle venant à disparaître, produit tout son effet. C’est déjà en germe la théorie de la reviviscence des sacrements. « Oui, dit saint Augustin à Pétilien, vous avez raison de placer dans l’onction le sacrement du chrême, qui dans le genre des signes visibles est sacro-saint, tout comme le baptême ; mais il peut exister dans des hommes pervertis, passant leur vie dans les œuvres de la chair et ne devant jamais posséder le royaume des cieux. Mais il faut distinguer ce sacrement visible, qui est saint, qui peut se trouver et chez les bons et chez les méchants, récompense pour les uns, jugement pour les autres, de l’onction invisible de la charité, qui est le propre des bons. » Cont. litt. Petit., II, civ, 239, P. L., t. xliii, col. 342. Prenant ailleurs pour exemple le cas de Judas, coupable quia a botio bonum malus excepit, il l’applique à l’onction de l’huile du salut, c’est-à-dire à la confirmation : « L’huile du salut, dit-il, n’est pas l’huile du pécheur. Bcne accipiatur, et bonum est ; etsi maie accipiatur, bonum est. Vse hominibus bonum maie accipientibus. » Serm., cclxvi, 7, P. L., t. xxxviii, col. 1229. Donc, d’après saint Augustin, dans le cas où le sujet n’ofi’re pas les conditions requises de préparation et de moralité, réception valide de la confirmation, mais illicite, culpabilité à mal recevoir l’onction chrismale. Vienne à disparaître l’obstacle, l’onction produit son effet, sans qu’il soit nécessaire de la réitérer. Car ici s’applique le principe formulé si souvent au sujet du baptême et de l’ordination, objet de la controverse avec les donatistes. Au sujet du baptême, il