toute sa rédaclion. Au lieu de prétendre qu’il a, parartifice littéraire, fait parler Moïse rétrospectivement, comme il aurait dû parler sur la rive orientale du Jourdain, il est plus naturel de reconnaître que le législateur luimême a résumé la loi qui devrait régir son peuple en Clianaan et a exhorté itérativement celui-ci à la pratiquer. Tout donc dans le contenu du Deutéronome concourt à confirmer la rédaction par Moïse lui-même dans les circonstances historiques qui sont indiquées au déhut du livre.
/L RÉPONSE AUX THÉORIES DES CRITIQUES. — 1o Le
Deutéronome n’est pas indépendant des livres précédents. — 11 en dépend, au contraire, et pour l’histoire et pour la législation. Les critiques le reconnaissent, à leur manière, lorsqu’ils disent que l’auteur du Deutéronome a connu et utilisé les documents élohiste et jéhoviste, soit à l’état isolé, Eet J, soit à l’état combiné, JE. Voir les tableaux de Driver, Einleitung in die Litteratur des A. T., trad. Rothstein, Berlin, 1896, p. 73-76, pour la législation, et p. 82-83, pour l’histoire. Mais, en dehors des emprunts faits à ces prétendus documents, on remarque dans le Deutéronome des indications de faits et de lois, qui ne proviennent pas de E et de J. Il y a au moins trois faits, qui sont dans ce cas et qu’on trouve mentionnés cependant dans les livres du milieu ou dans le document que les critiques appellent code sacerdotal ou P. Ce sont le nombre des douze espions envoyés au pays de Chanaan, i, 23 ; les 70 personnes qui sont entrées en Egypte, x, 22 ; la matière (bois de sittim) dont l’arche d’alliance était faite, x, 1, 3. On peut bien, pour les besoins du système, supposer qu’ils étaient déjà rapportés dans des fragments perdus de l’histoire élohiste ou jéhoviste. Il reste vrai qu’ils font partie des livres actuels, dits du milieu, et il est légitime de conclure qu’ils leur ont été empruntés. La législation deutéronomique a aussi des traits, qui n’ont leur pendant ni dans le décalogue ni dans le livre de l’alliance, mais qui se remarquent dans le soi-disant code sacerdotal. Assurément les critiques rapportent la plupart à la loi de sainteté, 11, Lev., xvii-xxvi, qui, selon eux, a été insérée dans le code sacerdotal. Il est d’autres détails toutefois, dont le plus remarquable concerne les animaux purs et impurs. Deut., xiv, 3-20 ; Lev., xi, 2-22. Cf. Deut., xii, 29-32, et Num., xxxiii, 52 ; Deut., xiv, 22-29, et Num., xviii, 21-32 ; Deut., xv, 19-23, et Num., xviii, 17 ; Deut., xvi, 1-17, et Num., xxviii, xxix ; Deut., xviii, 1-8, et Lev., iiv 32-34 ; Num., xviii, 1-20 ; Deut., xix, 1-13, et Num., xxxv ; Deut., xxii, 12, et Num., xv, 37-41 ; Deut., xxiii, 10-15, et Num., v, 1-4 ; Deut., xxiii, 22-24, et Num., xxx, 3 ; Deut., iiv 2-4, 16, et Num., xxxiii, 55 ; Deut., iiv 6 ; xiv, 2, 21 ; xxvi, 19 ; xxviii, 9, et Lev., xi, 44 ; Num., xv, 40 ; Deut., xvi, 4, et Num., ix, 12 ; Deut., xvii, 6 ; xix, 15, et Num., xxxv, 30. Ou bien, on n’en tient pas compte, ou bien on observe que ces points communs ne sont rien en comparaison des prétendues divergences qu’on signale entre les deux législations. Cependant des critiques, comme Dillmann et M. Bruston, pensent que le code sacerdotal est antérieur au Deutéronome et lui a servi de source. Bruston, L’histoire sacerdotale et le Deutéronome primitif, Paris, 1906, p. 28-40. Si on n’admet pas la distinction des documents du Pentateuque, on conclura légitimement de ces faits que les livres du milieu ont précédé le Deutéronome. L’omission des lois sacerdotales et lévitiques se comprend suffisamment dans un code populaire, qui n’a rien de rituel et n’est pas destiné aux prêtres. Moïse n’a pris dans la législation antérieure que les dispositions du droit qui convenaient aux particuliers. Cf. F. de Hummelauer, Deuleronomium, Paris, 1901, p. 149-151 ; J. Brucker, op. cit., p. 173-175.
2o L’uiixié du Deutéronome exige un seul auteur. — Le Deutéronome donne l’impression d’un écrit
d’une seule et unique inspiration, produit tout entier d’un seul jet. Le même but y est poursuivi d’un bout à l’autre ; l’esprit et la langue sont partout identiques, tellement que les critiques, tout en découvrant des mains différentes, reconnaissent qu’elles sont d’écrivains de la même école, qu’ils appellent deutéronomiste. Mais leurs dissections du texte ne s’imposent pas. Outre qu’elles ne se rencontrent pas dans les résultats soi-disant acquis, elles sont faites sur le texte massorétique, qui est altéré en divers endroits, et elles ne réussissent pas à entamer sérieusement l’unité du livre. Kuenen a admis longtemps l’unité du discours parénétique, v-xi, avec le code, xii-xxvi, et Dillmann l’a péremptoirement établie ainsi que celle des c. xxvnxxxi. Numeri, Deuterononium und Josua, 2e édit., Leipzig, 1886, p. 263 sq. Ce grand discours forme, en effet, une introduction au code, une exhortation prolongée à observer un code, reproduit plus loin. Or. il est difficile d’admettre qu’elle a été composée après ce code, qui en était indépendant, comme un supplément parénétique. L’exhortation avec ses références continuelles à une législation, avec ses reprises perpétuelles, suppose plutôt, comme cela est attesté d’ailleurs au c. iv, que l’orateur vise une législation, qu’il a présente à l’esprit, qui était connue de ses auditeurs et dont il se propose de faire un résumé. Si ses auditeurs ne l’avaient pas connue déjà, l’exhortation à observer une loi, dont l’orateur recule sans cesse l’énoncé, aurait été insupportable. Joignez à cela que le ton parénétique se retrouve encore dans le code lui-même et que les motifs de pratiquer les ordonnances promulguées s’ajoutent au texte du code. D’autre part, les quatre premiers chapitres du Deutéronome n’ont pas une origine distincte des c. v-xxvi ; ils présentent avec eux une unité de conception et de style, qui en font un préliminaire obligé du corps même du livre. M. Van Hoonacker l’a solidement prouvé. L’origine des quatre premiers chapitres du Deutéronome, dans Le Muséon, Louvain, 1888, t. iiv p. 464-482 ; 1889, t. viii, p. 67-85, 141-149. F. Montet admet aussi l’unité des c. i-xxvi. xxvm-xxx. Le Deutéronome et la question de V Hexaleuque, Paris, 1891, p. 49-116. Pour l’identité du style dans toutes les parties, voir F. de Hummelauer, Deuteronomium, Paris, 1891, p. 110-135. Cf. Josue, Paris, 1903, p. 57-60. Les derniers chapitres, formant épilogue, ont pu être ajoutés par une autre main, sans que ni l’unité du livre ni sa rédaction par Moïse en soient atteintes.
3 » Les dates diverses, proposées par les critiques, ne sont pas démontrées. — Les Pères de l’Église ont justement remarqué que le livre, retrouvé au Temple de Jérusalem sous le règne de Josias, était le Deutéronome. Le pseudo-Athanase, Epist. ad Marcellinum, n. 32, P. G., t. xxvii, col. 41 ; S. ; Jérôme, AdvcrsusJovinianum, 1. 1, n. 5, P.L., t. xxiii, col. 217 ; Comment. in Ezech., i, 1, P. L., t. xxv, col. 17 ; S. Chrysostome, In Matth., homil. ix, n. 4, P. G., t. lvii, col. 181 ; Jn 1 Cor., homil. iiv n. 3, P. G., t. lxi, col. 58 ; Procope de Gaza. Comment, in Deut., xvii, 18, P. G., t. lxxxvii, col. 916. Or, ce livre ainsi retrouvé comprenait au moins les c. v-xxvi et le c. xxviii. En effet, la réforme de Josias, faite conformément au code retrouvé, concernait non seulement l’abolition des cultes étrangers et de leurs infiltrations dans le culte de Jéhovah, la centralisation du culte au temple de Jérusalem et la célébration correcte de la fête de Pâque, trois points spécialement recommandés par le code proprement dit, niais aussi la rénovation de l’alliance, signalée v, 2, 3 ; xxvi. 17-19. Cf. F. de Hummelauer, Deuterononium, p. 46-60, 83-87. D’autres rapprochements entre le Deutéronome et II (IV) Reg., xxii. 8-xxiH, .23, confirment cette conclusion. Cf. E. Mangenot, L’authenticité mosaïque du Penlateuque, p. 117-118. D’autre