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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 4.djvu/545

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DIEU (SA NATURE D’APRÈS LES PÈRES)


simple, parfaite en elle-même et source de toute bonté participée, telle serait la plus haute notion de Dieu. On peut toutefois se demander si l’apologiste parle simplement en son nom, ou si, plutôt, il ne résumerait pas l’enseignement de Porphyre.

Didyme s’accorde naturellement avec les autres alexandrins pour voir dans la création une œuvre de bonté, àyaô’oç yîxp cV>v outq ; , SïipiioupYet, De Trinitate, 1— II, c. vi, t. xxxix, col. 516, et pour dénier au mal toute provenance divine et toute réalité substantielle. Contra manichseos, c. ii, xii, col. 1088, 1100. Admirateur fervent d’Origène, Didyme est-il allé jusqu’à le suivre dans son erreur sur l’éternité de la création V Voir t. iv, col. 750, 753. Cette doctrine semble bien contenue dans un traité qui nous a été conservé sous le nom de saint Grégoire de Nysse, et qu’un critique récent a revendiqué pour Didyme : le traité Adversus Arium et Sabellium, P. G., t. xlv, col. 1281 sq. Dieu, pour l’auteur de cet ouvrage, est toujours actif, àsi èvepfr, ; , col. 1288. Expression dont on peut rapprocher cette autre de Didyme : àEtxc’vi, To ; , nunquam otiosus, De Trinitate, 1. II, c. iivi t. xxxix, col. 612, et cette assertion, que pour Dieu, penser, c’est agir, o-j ai vor, ctecç TCotr, (recç ûaiv. lbid., 1. I, c. VIII, col. 277. En revanche, dans ce même ouvrage sur la Trinité, Didyme considère comme connexes ces trois prédicats : n’être pas soumis au temps, être éternel, être incréé : qui non est tempore obnoxius, œlernns est ; qui autem seternus est, increatus est, 1. I, c. XV, col. 310. Ailleurs, il affirme que la créature, n’ayant pas existé dès le début, a commencé d’être : r t Lt ; <ti ; xb sîvai ïyti, oùx oStra ttjv àp-/V>l— II) c — VI, col. 508. Ces passages rendent douteuse, soit l’attribution faite à Didyme du traité A dversus Arium et iSabellium, soit l’interprétation origéniste des expressions relevées ; car l’éternelle activité de Dieu peut s’entendre de ses opérations immanentes, et, même par rapport aux opérations extérieures, elle peut s’entendre d’une façon relative, dans l’hypothèse de la création, au sens où Notre-Seigneur dit, Joa., v, 17 : Pater meus usque modo operatur. Voir aussi les annotations, dans Migne, col. 277, n. 38 ; col. 611, n. 67.

b) Pères palestiniens : Eusèbe de Césarée (f vers 339), saint Cyrille de Jérusalem († 386), saint Épiphane (-f 403). — Ces Pères ne forment pas, comme les alexandrins, un groupe homogène, qui appartienne à une école déterminée. Si Eusèbe, disciple de Pamphile, dépend fortement d’Origène, saint Èpiphane fut un ardent adversaire du grand alexandrin, et saint Cyrille, par sa formation comme par la tournure de son esprit, se rattache à l’école d’Antioche.

Eusèbe de Césarée rentre dans la catégorie des Pères apologistes par sa Préparation et sa Démonstration évangélique, P. G., t. xxi, XXII. C’est surtout dans le premier ouvrage, travail de vaste compilation, qu’il est amené à parler de la divinité. Là se retrouvent les thèmes communs à ses devanciers : l’unité de Dieu, d’un Dieu bon, qui n’est pas l’auteur du mal, 1. IV, c. xix ; 1. VI, c. vi ; 1. XI, ex ; 1. XIII, c. ii col. 291, 425, 879, 1065 ; la providence, avec la prescience qui ne nuit pas à la contingence de l’événement prévu ou prédit, 1. VI, c. xi ; 1. VII, c. x ; 1. VIII, c. xiv, col. 492, 531, 651 ; la réfutation de l’erreur dualiste sur la matière incréée et cause du mal, 1. VII, c. xix, xxii, col. 563, 570. Pour justifierlescbrétiens d’avoir suivi la doctrine des Hébreux de préférence à celle des Grecs, Eusèbe démontre l’excellence de la première. Dans ce dessein, il signale la concordance entre la doctrine chrétienne ou mosaïque et celle des sages de l’antiquité, Platon surtout, sur Dieu considéré sous divers aspects : comme l’Être même (Exod., iii, 14), incréé, éternel, immuable par nature, 1. XI, c. ix sq., col. 867 sq. ; comme ineffable et incompréhensible^, xii, col. 879 ; comme seul et unique vrai Dieu, c. xiii, col. 879 ; comme souverainement et essentiel lement bon, c. xxi. col. 902 ; comme incorporel, 1. XV. c. xvii, col. 1345. Par contraste, il relevé clic/, les philosophes leurs opinions discordantes et erronées sur la divinité, 1. XIV, c. xvi ; I. XV, c. xv sq., col. 1237, 1342 sq. Comme l’auteur de la Préparation évangélique procède habituellement par voie de citations et de rapprochements, sa théodicée présente, au point de vue de la terminologie, une saveur platonicienne, ou plutôt néoplatonicienne, assez prononcée. Au reste, rien de personnel, comme l’observe E. Preuschen, art. Eusebius von Cdsarea, dans Pœalencyclopudie fur protesta » lische Théologie und Kircfie/6’édit., Leipzig, 1898, t. v. p. 617.

Comment Platon est-il parvenu à sa doctrine sur Dieu et les choses incorporelles’.’Intéressante est la réponse de l’évêque de Césarée, 1. XI, c. VIII, col. 868. Il a recours, comme ses devanciers, à la théorie des emprunts faits à ! Moïse et aux autres prophètes des Hébreux, mais d’une façon qui n’a rien d’absolu ni d’exclusif ; car il propose, en outre, comme hypothèses plausibles, l’exercice naturel de la raison humaine ou quelque disposition providentielle : eite xai —ap’êixvto-j xr k tC>v TipaY|j.âTa>v êjtiêaÀù)’/ S’Jtei Eite ôitwijoOv Cîtô Heov zatal-iuiŒlç t ?, ç vv<i<jcu>î. Rom., i, 20. D’une façon plus générale, il fait appel, contre les païens, à la notion commune et comme instinctive de Dieu qui se trouve en tout homme ; elle leur aurait suffi, s’ils l’avaient écoutée, pour éviter tant de grossières erreurs sur la divinité, 1. II, c. VI, col. 140.

Les autres ouvrages d’Eusèbe ajoutent peu de chose à ce qui précède. La preuve de l’existence de Dieu par l’ordre et la beauté du monde, Sap., xiii, 5 ; Rom., i, 20, apparaît, Comment, in Ps., xviii, % et xcm. 8-11, t. xxiii, col. 186 sq., 1200. La transcendance divine, exprimée dans la Préparation évangélique en langage platonicien, n’est pas moins fortement accentuée dans la Démonstration, 1. IV, c. I, t. xxii, col. 252 : —i.’zr ; -LpeÏTTûv npoffir)Yopta ; , appï]-o/, àvsv.îpasTov. aitepiv(5r, TOv ; en même temps le grand principe de l’immanence divine est rappelé : In Mo enim vivimus et movemur etsumus. Act., xvii, 28. Mais parfois la transcendance est attribuée à Dieu le Père en des termes où le subordinatianisme d’Eusèbe paraît se reiléter ; ainsi en est-il particulièrement dans l’un des écrits qu’il composa contre Marcel d’Ancyre, De ecclesiastica theologia, t. xxiv, col. 825 sq. Après avoir énoncé la foi de l’Église en un seul Dieu, Père tout-puissant, 1. I, c. iivi col. 837, il s’explique, c. xi, col. 844, de telle façon que le Père seul semble, rigoureusement parlant, l’unique vrai Dieu : exelvoç ô |j.6vo ; àvap/o ; xai àf£vvr]TOÇ, 6 tifi ÔEOTïjTa olxeiav xeimjiiévoî. Dans le passage le plus qualificatif de la divinité qui se trouve en cet ouvrage, Eusèbe emploie la série d’épithètes commençant par auto, que saint Athanase, on l’a iiv appliquait au Verbe, précisément pour affirmer sa parfaite consubstantialité ; mais, détail notable, c’est au Père seul, dont il s’agit dans le contexte, que l’évêque de Césarée attribue ces épithètes : Ssov, é’v t ; ôeïov, appr, Tov, àyxôôv, â-/o, v. àaJvôstov, [xovoe’.Se ; , xb l-ÉxEiva Ttôv ô’/u)v ôjj.o).oyetv, aj-ôŒov, oc’jtovoOv, —x-j-.’ji ôyov, a’JTOOOçiav, a^tô ? <o ; , avTo^(or, v, aviTÔxaXov, auroâyaOov ovra… xb-i oï tovtou jjlovoyevt, Yi’ov… y.j’i a’jTÔv Œôv, xa’i voCv, xai /rivov, xa ffoçt’av, etc., 1. II, c. xiv, col. 928. Ce passage, pris séparément, n’est pas décisif contre l’orthodoxie d’Eusèbe ; voir, pour l’ensemble de la doctrine, dom B. de Montfaucon, préface des Commentaires sur les Psaumes, c. vi. n. 2, P. G., t. xxiii, col. 29. Il prouve du moins ceci : c’est tlans les endroits où l’évêque de Césarée parle du Pire, qu’il faut avant tout chercher sa pensée, entière et incontestable, sur la nature de Dieu, entendu au sens strict et absolu.

Saint Cyrille de Jérusalem, docteur de l’Église et auteur de catéchèses adressées à des catéchumènes qui