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DIEU (SA NATURE SELON LES SCOLASTIQUES ;
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•diverses classes d’attributs. Pour ce travail il s’aida de ce que les soufistes et surtout les philosophes arabes avaient écrit sur ce sujet. En le lisant, les scolastiques se trouvèrent donc en présence d’un travail très élaboré sur la distinction et la classification des attributs divins ; et on ne peut pas mettre en doute l’iniluence de Maimonide quand on constate avec quelle précision nouvelle le xni° siècle disserte sur les noms divins. C’est surtout chez saint Thomas que cette influence se fait sentir. Cf. Kaufmann, Die Attributcnlehre in der jïidischen Religionsphilosophie, Gotha, 1877. D’ailleurs, Franzelin. De Deo uno, th. x, et Pohle, Lehrbuch der Dogmalil ;, 1. I, c. II, Paderborn, 1902, t. i, p. 29-36, montrent bien l’accord parfait de saint Thomas et de la tradition patristique.
Le troisième service que rendit Maimonide aux scolastiques fut de les mettre en présence du problème de l’agnosticisme, et par là il leur donna l’occasion d’établir plus solidement que n’avait fait le XII e siècle la théorie philosophique de la valeur ontologique des divers attributs de Dieu. L’agnosticisme était le mal endémique du péripalétisme néoplatonicien de la philosophie arabe. Chez Avicenne, il dérivait surtout de ce que nous ne connaissons Dieu qu’en fonction de la créature ; chez Avicebron, il se fondait surtout sur ce que Dieu n’a pas d’essence, mais est l’existence pure. Algazel avait attaqué ces vues dans sa Destruction, mais pour soutenir lui-même l’agnosticisme par une autre voie dans sa métaphysique : Si est cujus simile non est in le Uludnullo modo poteris intelligere. Et hsec est ejus essentiel, cum ipse est eus absqueeo quod respondealad qnid est, Metap/tt/s., c. III, cité par Richard de.Middleton, In IV Sent., 1. 1, dist. III, q. m, a. 2, Venise, 1507, fol. 15. Averroès prit une position nettement opposée à l’agnosticisme. Voici le texte du passage principal de sa métaphysique sur ce sujet : Et cum intellectus est unus, et cum actio ejus est vit a, illud igitur i/uoil intelligens est, (/nia inlelligit se non quia intelligit aliud, illud est vivum, quod habet vilam in fine nobilitalis ; et ideo vita et scientia proprie dicuntur de eo. Est igitur unus, Deus, sapiens. Suit le passage contre la Trinité et contre les attributs réellement distincts rapporté plus haut, et on poursuit : El sic est intelligendum quum dicimus ipsum esse unum et habentem vilam, scilicet idem i » subjecto et duo secunihtm hinilum ; non quia significant idem omnibus modis, sicut’significant nomina synonyma. Un peu plus bas. la distinction des attributs entre eux et avec l’essence est énoncée : unum in esse, duo in consideratione ; ou encore, unum in preedicatione, et duo in intentione ; ou bien in polenlia duo, quando intellectus (/inscrit unum ab altero. Intellectus enim naïus est dividere adunata in esse, etc. Melaphys., 1. XII, com. 39, fol. 151. Snin t Thomas renvoie fréquemment à ce passage, et aussi au coin. 19 du même livre, fol. ! îi. où on lit : sunt radem secundum proportionalitatem, non tecundum deflnitionetn.Ct..landun, In XII libro » metaphysicee, Venise, 1560, sur ce passage, fol. (i. « ><) ; s. Thomas, / » IV Seul., 1. I. prologus, q. i, a. 2, ad 2, , m ; De potentia, q, vu, a. 7 ; De veritaïc, q, n, a. II. On le voit, averroès avait retrouvé la solution donnée au problème de la valeur des attributs absolus et de leur relation à l’< i >nnée par les Pères cappadociens contre l< — anoméens,
Malgré les démonstrations d’Averroès, Maimonide soutint l’agnosticisme et le présenta comme l’aboutissant du péripalétisme. Nous avons il le détail de son argumentation 1 1 de la réfutation qu’en donna saint Thomas, dans d’Ali —. Dictionnaire apologétique dr in foi, t. i, col. 28-56 ; ■ i nous nous sommes plu^ haut, col. 784, I i*. du fond de la réponse de saint m< n’j reviendront pai Voici seulement quelques Indications historiques sur le procédé
de Maimonide et la marche de la discussion de saint Thomas. Les attributs négatifs d’éternité et d’immensité ne nous renseignent pas sur la nature intrinsèque de Dieu, puisqu’ils ne font qu’exclure de lui les relations spatiales et temporelles ; mais tous les noms que nous donnons à Dieu se réduisent en dernière analyse à des négations du même genre. Ces noms en effet se divisent en termes anthropomorphiques ou figurés, en termes relatifs, et en termes essentiels ou en apparence absolus. Or les termes figurés, Dieu descendit, marcha, etc., se réduisent à des symboles d’action ; il en est de même des noms relatifs évidemment ; et aussi des noms essentiels : vivant, puissant, sachant et voulant ; car puisque nous ne connaissons Dieu qu’en fonction du monde, dire qu’il vit, cela signifie que son œuvre est semblable à celle d’un vivant. Tous les noms de Dieu sont donc des dénominations extrinsèques, tirées de ses œuvres ; ils n’ont qu’un sens causal ; Dieu est sage, cela signifie que la sagesse est son œuvre. Et il est impossible de remonter de notre sagesse à l’attribut intrinsèque de sagesse en Dieu ; car il faudrait qu’il y eût une relation réelleentre la nature divine et son œuvre, au moins une relation de similitude sur laquelle se fonderait une connaissance analogique ; mais cela est impossible, car Isaïe a dit : Cm » similem me fecistis. Quoi qu’en dise Averroès, tous les noms divins sont donc de pures homonymies, œquivoce ; et notre connaissance de Dieu est purement négative. Dire que Dieu est sage, c’est exprimer que ses œuvres ne ressemblent pas à l’effet d’un agent ignorant ; mais cela ne nous renseigne pas plus sur sa vraie nature, que de dire au sens purement négatif qu’il n’a pas de corps ou qu’il est hors des relations spatiales et temporelles. Il en va de même de l’existence que nous lui attribuons ; que Dieu existe, cela signifie simplement pour le philosophe que les preuves de son existence sont telles qu’il nous est impossible de penser qu’il n’existe pas. Reprenant ici les vues d’Avicebron et d’Avicenne, Maimonide va plus loin encore. L’existence même que nous affirmons de Dieu, c’est l’être considéré en lui-même comme faisant abstraction de tout ce qui peut servir ; i le déterminer, comme la quiddité, la qualité ; c’est l’existence pure ; car Dieu n’a pas d’essence.
On peut lire dans la Somme tliéologique, I", q. xm, et dans le De potentia, q. vu, la solide réfutation de toute cette série de sophismes. Saint Thomas y emploie à la fois la pensée chrétienne et les données patristiques, et son argumentation dépend aussi d’Aristote par l’intermédiaire d’Averroès, au jugement duquel il en appelle à plusieurs reprises. Les fondements sur lesquels s’appuie Maimonide sont branlants. S’il conroit l’existence pure comme il fait, c’est qu’il imagine quod ci quod dico esse aliquid addatur quod sit eo formalius, ipsum déterminant. De potentia, q. vu. a. 2, ad 9 um. De même, il a tort d’assimiler toutes les relations aux relations spatiales et temporelles, a. 10 ; car il faut considérer les relations causales, qui peuvent ne pas être mutuelles. Sum. theoL, 1 q. iv, a. I et 2, ad 3 um ; a. 3. Ces deux bases établies, l’infinie perfection de Dieu se démontre et nous avons dans le principi raison suffisante un moyen de remonter a posteriori aux attributs intrinsèques de Dieu ; et la connaissance analogique reste valable, q. xtn. B. 5. Nous connaissons donc, bien que très imparfaitement, l’absolu, i U, ad ,. : In M Sent., I. I, dist. Wll, q. i, a. 2. Mais cette solution nous amené s l’étude d’un problème généi il dont l’exposé donnera tout le sens de l’inno.ition opérée en théodicée par l’admission du pérlpatétisn
10 » L’être tranteendant et » i’tut monde :
l’infinité divine démontrée, étudiée et ex
trine péripatéticienne de l’acte et delà