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ESPAGNE (ÉGLISE D'), ÉTAT RELIGIEUX


intervint en temps utile, et, avec l’accord du pouvoir civil, mit beaucoup de zèle à réorganiser les affaires ecclésiastiques, que l'époque précédente avait bouleversées. Toutefois, les principaux objets de ses soins furent les séminaires diocésains… »

Nous avons cité plus haut l’art. 28 du concordat, par lequel le gouvernement promet l'érection de séminaires conciliaires dans les diocèses qui en manquent encore, et, « aussitôt que les circonstances le permettront, de séminaires généraux. »

La collaboration de l'État ayant manqué, l'Église dut assurer elle-même complètement le soin d’améliorer les études ecclésiastiques. « Beaucoup d’obstacles, dit Léon XIII, ont empêché et empêchent encore aujourd’hui qu’en fait ces conditions soient réalisées. Ainsi, maintenant que n’existe plus l’appui des universités, on doit regretter beaucoup de ces secours sans lesquels un clerc peut dillicilement aspirer à l’honneur d’une science complète et profonde. »

Or, à Rome, centre de la foi catholique, existent déjà beaucoup d’institutions destinées à promouvoir les études ecclésiastiques dans les grandes nations catholiques ; par malheur, il y avait peu d'élèves espagnols, n Nous avons formé le projet, dit le souverain pontife, de faire en sorte que le collège romain des clercs espagnols, fondé naguère, grâce au zèle éclairé de pieux prêtres, non seulement demeure florissant, mais encore devienne de jour en jour plus prospère. Il Nous plaît donc que tous les sujets de la Péninsule ibérique et des îles voisines soumises au Roi catholique, qui seront rassemblés dans ce collège, soient placés sous Notre autorité, que, menant une vie commune, … ils se livrent aux études qui élèvent d’une façon excellente le cœur et l’esprit. »

Léon XIII, en même temps, mettait à la disposition du collège espagnol, provisoirement le palais Alfieri, puis, aussitôt aménagé, le palais Altemps et il désignait les archevêques de Tolède et de Séville pour traiter désormais avec le Saint-Siège de tout ce qui concerne ce collège.

Quelques chiffres donneront une idée plus précise de l’importance de cette fondation.

Pendant l’année scolaire 1906-1907 (la 15^ depuis la fondation), le personnel du Collège hispanique de Saint-Joseph comprenait 18 personnes (recteur, vicerecteur, professeurs, confesseurs, etc.) ; les élèves étaient au nombre de Il de la province de Burgos, 9 de celle de Saragosse, 7 de SaintJacques de Coinpostelle, 7 de Grenade, 6 de Séville, 20 de Tarragone, 12 de Tolède, 15 de Valence, 12 de Valladolid. Soit, au total 99 élèves, ainsi répartis : faculté de théologie 55 ; faculté de droit canon 15 ; faculté de philosophie 29. Dans cette même année, 7 élèves reçurent à l’université grégorienne, en théologie, le titre de docteur, 101e titre delicencié, 271e titre de bachelier. En droit canon, Il le titre de docteur, 10 celui de licencié, 14 celui de bachelier, et en philosophie, 3 le titre de docteur, 4 celui de licencié, 8 celui de bachelier.

Dix obtinrent le titre de docteur à l’Académie romaine de Saint-Thomas d’Aquin. Enfm, nombre de récompenses ont été obtenues par les élèves espagnols dans les concours, en particulier de l’université grégorienne (pour l'Écriture sainte, la théologie dogmatique, l’hébreu, l’arabe, la théologie morale, l’histoire ecclésiastique, l’archéologie sacrée, le droit canonique, le droit public ecclésiastique, la philosophie, l’astronomie, l'éthique et le droit naturel, l’histoire de la philosophie, la métaphysique, la physique et la chimie, la physiologie, la mécanique, la logique, les mathématiques, la littérature espagnole, le grec, le français, l’anglais, l’italien). En l’année 1905-1906 ont quitté le collège 20 élèves, dont 4 étaient docteurs à

la fois en théologie, en droit canon et en philosophie, dont 8 autres avaient deux doctorats et 5 autres un doctorat. On voit quelle influence doit exercer le collège Saint-Joseph sur les études ecclésiastiques en Espagne.

Mais il manquait l’intermédiaire nécessaire entre ce collège et les séminaires, puisque les séminaires généraux prévus par le concordat n’avaient point été institués. Des décrets royaux du 21 mai 1852 et du 27 novembre 1876 avaient désigné, en attendant, divers séminaires pour conférer les grades majeurs. Ce n'était qu’un expédient. La S. G. des Études (30 juin 1896) publia une instruction qui érigeait en universités pontificales d'études ecclésiastiques (en se conformant à la bulle Quod divinæ sapientiœ), les cinq séminaires où se conféraient les grades majeurs, et, dès l’année suivante, tous les séminaires métropolitains. Les élèves y reçoivent la licence en théologie au bout de 4 ans et la licence en droit canonique au bout de 2 ans ; les élèves des autres séminaires doivent y venir un an pour la licence, et un an encore pour le doctorat. Voir S. G. des Études, Il juillet 1899 ; 21 mars 1900. On voit, dans tout ce processus, sur un point particulier, un nouvel exemple de la séparation toujours plus nette entre l'Église et l'État ; ajoutons que la révolution a supprimé (21 octobre 1868) la validité académique auparavant reconnue (décrets royaux 21 mai 1852, 10 septembre et 6 octobre 1866) aux études d’enseignement secondaire et de droit canonique faites dans les séminaires.

Voici la liste des séminaires, avec, pour la plupart, la date de leur fondation, et le nom de leur patron. Les séminaires métropolitains ou universités pontificales, et le séminaire de Salamanque, dirigé par les jésuites, confèrent les grades majeurs dans les facultés ecclésiastiques (licence et doctorat) ; les autres confèrent les grades mineurs. (Voir ci-contre, col. 585586.)

A la collégiale du Sacro Monte, à Grenade, est uni le collège-séminaire de Saint-Denis l’Aréopagite, où les chanoines sont professeurs.

Tels sont les cadres de l’enseignement ecclésiastique. Qu’est cet enseignement lui-même ? Lorsque l’archevêque de Burgos, cardinal Aguirre, depuis archevêque de Tolède et primat d’Espagne, sollicitait du souverain pontife, en 1896, l'érection d’une université pontificale à Burgos, il alléguait la nécessité d’adapter l’enseignement ecclésiastique aux conditions du temps présent. Voir Canonica erectio et constitutio facultatum sacra ; theologiæ, juris canonici et philosophiie scholasticæ in scminario Burgensi, Burgos, 1897. Il s’agissait, sans diminuer la part accordée à la théologie positive, de cultiver d’autres sciences ecclésiastiques autrefois trop négligées.

Il y avait, en effet, un complément indispensable à apporter aux études faites dans les séminaires conciliaires. Ges séminaires ont deux grandes catégories d'élèves ; les uns suivent la carrera brève, ou menor, les autres la carrera lata ou mayor, mais la distinction tend à s’effacer. La carrera brève comprend, en général, 4 années de latin et de belles-lettres : Humanidades, deux de philosophie, avec quelques notions de sciences mathématiques, physiques et naturelles, deux de théologie dogmatique et morale, « je devrais dire plutôt : deux années de morale, car, pour le dogme, on se contente d’un enseignement aussi élémentaire et abrégé que possible » (dom J. L. Pierdait). La morale est étudiée dans le Compendium de Gury, d’une manière qui fait beaucoup travailler la mémoire. Quoique les élèves de la carrera menor se destinent en général aux charges les plus modestes, grâce au régime des concours ils peuvent ensuite, en travaillant, l’emporter sur ceux de la carrera mayor.