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Ce qui résulte du ti’inoifinage de ces Pères est avant tout raucienneté du dogme latin. Les thiéologiens ortliodoxes paraissent l’oublier, lorsqu’ils appellent le Filioqiie une nouveauté hérétique : v.atvotouia aip£Ti/.r, . Palinieri, Theokxjia doymatica orlhodoxa, Florence, 1911, t. i, p. 340. Ki toutefois cette nouveau^était commune en Orient et en Occident plusieurs siècles avant que Pholius prit à cœur d’informer le monde grec que l’Église latine était décline de la vraie foi catliolique. Et il faut ajouter qu’elle n’avait pas soulevé de protestations de la théologie trinitaire grecque depuis le iv jusqu’au viii'e siècle. Pour la rejeter, les théologiens grecs qui vécurent avant Photius, de même que ses partisans, auraient dû renier les textes explicites des Pères, qui, d’après Nealy, sont favorables aux Latins, A hislorij of the holij castern Church, Londres, 1850, t. II, p. 1131, et en même temps condamner les principes théologiques des Pères grecs du ivsiècle.

Il existe, nous le reconnaissons, une manière différente de s’exprimer entre les Pères grecs et latins au sujet de la procession du Saint-Esprit. Par conséquent, une étude approfondie de la controverse théologique du Filioque exige au préalable une connaissance exacte de la terminologie trinitaire grecque. La pensée des Pères grecs du ive siècle gagnerait à ttre développée à la lumière des principes qui sont la base de leur théologie trinitaire. Mais une étude pareille n’entre pas dans le cadre d’un article du Dictionnaire, et d’ailleurs, elle serait plus à sa place dans un travail scientifique sur la Trinité. Nous nous sommes donc borné à suivre la méthode des adversaires du Filioque, et les témoignages que nous avons puisés dans les écrits des Pères suflisent largement à montrer que l’Église latine n’a point innové, en définissant que le Saint-Esprit procède à la fois du Père et du Fils.

Théodiilphe d’Orléans (ix’siècle) a été le premier à recueillir les textes des Pères grecs et latins favorables au dogme catholique du Filioque. De Spiritu Sanclo, P. /.., t. cv, col. 239-276. Une riche moisson des textes des Pères grecs et de quelques Pères latins est contenue dans deux écrits du patriarche Vekkos : Rejiilationes adversiis Andronici Camaieii super scripto tradilis testimoniis de Spirilu Saneto animadversiones, P. G., t. CXLI, col..’J95-f)12 ; Epigraphse sive priescriplioiies in dicta ac sententias sanctorum Patrum a se collectas de processione Spiritus Sancti, ibid., col. 613-724. Voir Petau, De Trinitatc, vii, 3-18, Dogmala théologien, Paris, 1865, t. iii, p. 274-414 ; Thomassin, Dogmata tlieologiea. De Trinitate, 29-31, Paris, 1868, t. v, p. 48U510 ; Klee, Katholische Dogmedil ;, JMayence, 1844, t. i, p. 177185 ; Franzclin, De Dca trino, Rome, 1895, p. 444-482 ; Heinrich, Dogmalisclie Théologie, Maycnce, 1885, t. iv, p. 389415 ; de Régnon, Études de tliéologie positive sur la sainte Trinité, Paris, t. iii, p. 3-283 (nous lui avons emprunté la traduction française de plusieurs textes des Pères). Pour les théologiens orthodoxes, l’arsenal des te.xtes contraires au Filioque est l’ouvrage de Zoernikav, traduit en grec ; et annoté par Eugène Roulgaris : Tli’A t ;  ;  : Iz-oçiOtriu ; t.ù Hiia-j IlvciiiaToç £x (Jiovoj Toû ic-f, , :, Saint-Pétersbourg, 1797, t., i, p. 1-397. Voir aussi Prokopovltch, Traclatus de processione Spiritus Sancti, Gotha, 1772, p. 39-151 ; Macaire, Pravos. lavno-dogmatitcheskoe bogosloide, Saint-Pétersbourg, 1895, t. I, p. 302-343 ; Sylvestre, Opy/ pravos Uwnagodogmatitchestiago bogosloviia, Kiev, 1892, t. ii, p. 438-489.


III. D’après les conciles.

Dans sa Mystagogie, 5, Photius s’évertue à représenter la procession du Saint-Esprit du Fils comme une opinion hérétique anathématisée par les sept conciles œcuméniques. Le I" et le IP conciles, dit-il, ont défini que le Saint-Esprit procède du Père ; le III accepta cette définition ; le IV' la confirma ; le V « la fit sienne ; le VI" la publia à l’univers entier ; le VIP la sanctionna solennellement. P. G., t. cil, col. 285. Les polémistes grecs, qui partagèrent sa haine contre les latins, en appelèrent, comme lui, aux conciles œcuméniques pour combattre le dogme latin. Michel Glycas déclare que les conciles œcuméniques ont été unanimes à affinner que le Saint-Esprit procède du Père seul. De processione Spiritus Sancti, P. G., t. clviii, col. 957. Nil Damylas, Michel Balsamon, Joseph Bryennios sont du même avis, .llatius. De perpétua conscnsione, col. 917-919. Et les théologiens gréco-russes de nos jours, à quelque exception prés, suivent leur exemple. « Tous les conciles œcuméniques, déclare Macaire, ont unanimement recoium que le Saint-Esprit procède seulement du Père. « Op. cil., t. I, p. 288. Cf. Chrysostome (prolosyncelle), Ihp’’E/.x/r, ^ ; a.-, Athènes, 1896, t. ii, p. 372-376. La même assertion est invariablement répétée dans les lettres encycliques des patriarches de Constantinople, toutes les fois qu’ils touchent aux nouveautés latines, n La doctrine que le Saint-Esprit procède du Père et du Fils, dit Anthime VI, est contraire à la confession universelle de l’Église catholique, selon le témoignage des sept conciles œcuméniques, qui ont établi que le Saint-Esprit procède du Père. » Lettre encyclique de 1848, VI, 5, dans Petit-Mansi, Concil., Paris, 1909, t. XL, col. 381. Voir aussi la Lettre encyclique d’Anthime VII, Constantinople, 1895, p. 7.

Il n’est pas difiicile de montrer que cet appel aux conciles œcuméniques, pour écarter de la théologie chrétienne la doctrine exprimée par le Filioque, est tout à fait arbitraire. La théologie catholique prouve en effet :
1° que les conciles œcuméniques n’ont jamais enseigné que le Saint-Esprit procède du Père seul ;
2° que plusieurs conciles œcuméniques et particuliers ont enseigné que le Saint-Esprit procède à la fois du Père et du Fils.

Les conciles œcuméniques n’ont jamais enseigné que le Saint-Esprit procède du Père seul.

Les théologiens orthodoxes invoquent, contre le dogme latin, l’autorité de ces conciles qui, dans leurs professions de foi, déclarent que le Saint-Esprit jirocède du Père. Or, aucun théologien latin ne conteste la vérité de cette procession. Mais, comme le remarquait Hugues Etherianus au xii’e siècle, il y a une différence entre procéder du Père et procéder du Père seul, et pour résoudre la controverse du Filioque en faveur des grecs, il faudrait prouver que, réellement, les conciles ont enseigné la procession du Père seul. De hseresibus f/riecorum, ii, 16, P. L., t. ccii, col. 321. Cette démonstration n’est guère possible, et nous sommes heureux de constater que les meilleurs théologiens russes de nos jours, Mgr Sylvestre par exemple, n’y ont pas recours.

Le P’concile œcuménique proclame que le Fils engendré du Père est Dieu et que le Saint-Esprit, procédant il (t-JTo’j ToO Ilarpo :, participe aussi à la nature divine. D’après les théologiens orthodoxes, l’expression è ? aJTO-j -oj Ilarpôç est équivalente à l’expression èI. ij.dvou To-j Ilarpôç. Macaire, op. cit., t. i, p. 288 ; Chrysostome, op. cit., t. ii, p. 372. Une telle exégèse, il n’est pas besoin de le dire, est fantaisiste r.u plus .haut point et change la signification des mots. Rappelons aussi que le concile de Nicéc n’a touche aucunement aux questions théologiques concernant le Saint-Esprit, car il visait uniquement à mettre en lumière la consubstantialité divine des trois personnes en Dieu.

Ce que nous disons du concile de Nicéc s’appiique aussi au IP et au IIP conciles, qui confirment la profession de foi nicéenne. On a tort surtout d’en appeler au IIP concile, qui sanctionna le triomphe décisif de la doctrine théologique de saint Cyrille d’Alexandrie, qui approuva le ix’^anathématisme du même docteur, où il est dit que le Saint-Esprit est le propre du Fils. Voir AUatius, Vindiciæ synodi Ephesinæ, p. 644, 645 ; Lépicier, De Spiritus Sancti a Filio processione, Rome, 1898, p. 8-11.

Le IV « et le V’^ conciles proclament la perpétuité et