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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 6.2.djvu/39

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GEROCH — GERSON


des Kirche im Ml Jahrhundert, in-8°, Leipzig, 1881 ; Potthast, Bibliotheca hislorica medii œvi, t. i, p. 502-503 ; dom Ceillier, Histoire générale des auteurs ecclésiastiques, 2° édit., Paris, 1863, t. xiv, p. 627-033 ; Realencyclopàdie fur protestanlische Théologie und Kirche, t. VI, p. 505-568 (avec bibliographie) ; The calholic cncgclopedia, New York, 1900, t. vi, p. 472 (avec bibliographie).

J. Besse. GERSON (Jean le Charlier de). — I. Biographie.

II. Ses opinions sur le pape, le concile et la hiérarchie ecclésiastique ; son rôle au concile de Constance.

III. Sa théologie morale. IV. Sa théologie mystique. V. Sa prédication.

I. Biographie.

Jean le Charlier dit de Gerson naquit le 14 décembre 1303 au hameau aujourd’hui détruit qui portait autrefois ce nom, et qui dépendait du village de Barby, dans le diocèse de Reims, non loin de Rethel (Ardennes). Son père s’appelait Arnauld et sa mère Elisabeth la Chardenière : tous deux étaient en excellent renom de foi et de piété. Ils eurent douze enfants et Jean en était l’aîné. Il fréquenta les écoles de Rethel, puis de Reims, et entra à quatorze ans (1377) au fameux collège de Navarre à Paris. Il y connut le futur évêque de Genève, Jean Courtecnissc, son contemporain, un peu plus âgé que lui. Bibliothèque de l'École des chartes, 1904, p. 471. II eut comme condisciples le futur cardinal Pierre de Luxembourg et l’humaniste Nicolas de Clémangis, qui étaient plus jeunes de quelques années. Ses maîtres furent Laurent de Chavanges, Gilles des Champs qui fut aussi honoré de la pourpre, et surtout le célèbre Pierre d’Ailly, de Compiègne, dont il suivit les cours pendant sept ans et dont il resta toujours l’ami dévoué. D’Ailly assistait parfois à ses leçons et il l’appelle son vénérable et très cher compagnon. Scrnio foetus in synodo Cameraccnsi ; Tractatus et sermones. De son côté, Gerson lui dédia son livre intitulé : De vita spiriluali anima'. Opéra, t. iii, col. 3, et lui adressa parfois des vers latins. Ibid., I. iv, col. 789. Il le nomma en plein concile de Reims son illustre et vénéré maître (1408) et au concile de Constance (1416) son incomparable professeur. Jean Gerson fut promu licencié es arts sous maître Jean Loutrier en 1381 ; baccalarius biblieus en 1388, il lut les Sentences en 1390 et devient licencié en 1392. Il fut promu au doctorat en théologie, à l'âge de 31 ans, en 1394. Cf. Denifle, Chartularium universilalis Parisiensis, t. iii, p. 454. Dès avant son doctorat, il avait composé plusieurs écrits. En 1387, il prêcha devant le pape Clément VII d’Avignon, pour provoquer la condamnation du dominicain Jean de Monteson qui niait l’immaculée conception de la sainte Vierge. Monteson fut condamné en effet et l’Aima mider décida de rejeter de son sein les frères prêcheurs qui refuseraient de confesser cette vérité qui est aujourd’hui un dogme. Notre docteur pense que cette sentence prononcée contre les dominicains fut trop dure : « Dieu sait, dit-il, et je l’ai plus d’une fois montré, que je ne déteste point les mendiants et que je n’ai point voulu leur destruction. » Et dans une épître adressée aux élèves de Navarre, il réprouve la sévérité de l’université dans cette occasion, Opéra, t. i, p. 129 ; il regrette aussi les pertes que la science et l’influence de l’université ainsi que la vertu des étudiants ont faites par suite de l’absence forcée des dominicains qui ne rentrèrent en grâce qu’en 1403.

Il prononça peu après le panégyrique de saint Louis, roi de France, et lit ainsi ses débuts dans sa carrière d’orateur qui devait être si brillante. Il avait conquis le doctorat depuis un an lorsque son maître Pierre d’Ailly fut nommé évêque du Puy (1395). Sur la proposition du jeune prélat, Gerson fut choisi par Benoît XIII pour lui succéder dans le poste émanent de chancelier de Notre-Dame et de l’université (13 avril). C’est à partir de cette date qu’il commença à s’occuper d’une manière très active de l’extirpation du schisme qui divisait depuis dix-sept ans l'Église en deux parties ennemies et numériquement presque égales. Ami de la paix et de l’union, il professa toujours à l'égard du pontife de Rome et de celui d’Avignon des opinions très modérées. En mainte occasion, il sut montrer sa vive répugnance pour les procédés violents préconisés par certains membres de l’université. Noël Valois, La France et le grand schisme, t. iii, p. 71, 180. Aumônier du duc de Bourgogne, il fut nommé doyen de l'église de Saint-Donatien à Bruges. Gerson y demeura pendant quatre ans (1397-1401) et il écrivit à cette époque le traité remarquable intitulé : Sententia de modo se habendi lemporc schismatis. Schwab, Johanncs Gerson, p. 97, 152.

Dans les discussions souvent orageuses de ce temps si troublé, le théologien trouvera peu de propositions pratiques où se rencontrent plus de fermeté doctrinale et plus de sérénité d'âme. Voilà pourquoi il nous semble utile de résumer les points fondamentaux sur lesquels Gerson émet son avis, salvo semper in omnibus superiorum et sapicnliorum judicio : « Dans le présent schisme, écrit-il, en une matière si douteuse il est téméraire, injurieux et scandaleux d’affirmer que tous ceux qui sont attachés à tel ou tel parti, ou tous ceux qui veulent absolument rester neutres, sont hors de la voie du salut, excommuniés ou suspects de schisme. Il est licite et même prudent de prêter obéissance à tel ou tel pape, mais sous condition tacite ou expresse. Il est téméraire, scandaleux et sapiens hæresim d’affirmer que les sacrements de l'Église n’ont pas leur efficacité au sein du parti contraire, que chez nos adversaires les prêtres ne sont pas ordonnés, les enfants ne sont pas baptisés et l’eucharistie n’est pas consacrée. Dans ce schisme, il est téméraire et scandaleux d’affirmer qu’il n’est point permis d’ouïr la messe des dissidents et de recevoir les sacrements de leurs mains. Il serait plus utile, plus juste et plus sûr de chercher l’unité de l'Église en agissant sur les deux compétiteurs à la papauté, soit en employant la voie de cession, soit celle de soustraction d’obédience, soit tout autre moyen légitime de coaction. A quoi sert de vexer et de troubler les âmes par l’excommunication ou autrement ? A quoi bon rejeter opiniâtrement une partie des chrétiens de la communion de l’autre ? » Opéra, t. ii, p. 3. D’Ailly, son maître, qui venait d'être nommé évêque de Cambrai et qui avait été témoin des mêmes excès, partageait tout à fait son avis et il s’en expliqua plus tard à plusieurs reprises. Discours du Il décembre 1406 au concile de Paris, dans Bourgeois du Chastenet, Nouvelle histoire du concile de Constance, p. 153 sq., et Apologia concilii Pisani (1412), dans Tschackert, Peter von Ailli, appendix, p. 31.

En 1398, Gerson ne vota pas la soustraction d’obédience à l'égard du pape d’Avignon pour lequel l'Église de France s'était dès l’abord déclarée. Il fut un des premiers à démontrer que Benoît ne devait pas être considéré comme hérétique ou schismatique et qu’il n'était nullement à propos d’entamer, de ce chef, une action contre lui. Opéra, t. ii, passim. Par suite, il réclama énergiquement la restitution d’obédience, c’est-à-dire la cessation de cet état anormal qui constituait un schisme dans un schisme. Cette attitude conciliatrice, très conforme à son caractère, lui attira alors et plus tard bien des rancunes peu dissimulées.

Après la restitution d’obédience et le concordat du 30 mai 1103, Gerson, revenu de Bruges, célébra dans un sermon enthousiaste la cessation partielle du schisme, le triomphe des projets d’union et la fin de ces longues querelles, trop semblables, disait-il, aux luttes légendaires entre guelfes et gibelins. Dans son discours du 4 juin, il compare Benoît à Antée qui

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