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GALILEE


mouvement diurne. » Les qualificateurs se réunirent le 23 février, et le lendemain 24, la censure fut portée dans le Saint-Office, en présence des théologiens consulteurs : « Tous déclarèrent que la première proposition était insensée et absurde en philosophie, et formellement hérétique, en tant quelle contredisait expressément de nombreux passages de la sainte Écriture, selon la propriété des mots, et selon l’interprétation commune et le sens des saints Pères et des docteurs théologiens. « Quant à la seconde, ils déclarèrent, pareillement à l’unanimité, qu’elle « méritait la même censure en philosophie et que, par rapport à la vérité théologique, elle était au moins erronée dans la foi. » Von Gebler, Die Aclen, p. 47 ; manuscrit du procès, fol. 376 ; Favaro, Le opère, t. xix, p. 311. Suivent, dans les pièces du procès, les noms des onze consulteurs : ce sont Pierre Lombard de Waterford, archevêque d’Armagh ; six dominicains, Hyacinthe Petronio (maître du sacré palais), Raphaël Riphoe, vicaire général de l’ordre, Michelvnge Séghizy (commissaire du Saint-Office), Jérôme de Casale major, Thomas de Lemos, Jacques Tinto ; un jésuite, Benedetto Giustiniani ; un bénédictin, Michel de Naples ; un clerc régulier, Raphaël Ras telli ; et un augustin, Grégoire Nonnio Coronel.

Le 25 février, le cardinal Millin fit savoir à l’assesseur et au commissaire du Saint-Office que, vu la censure prononcée par les théologiens sur les propositions de Galilée, le Saint-Père avait ordonné au cardinal Bellarmin de convoquer Galilée afin de l’avertir qu’il eût à abandonner son opinion ( le texte primitif portait ses opinions) ; dans le cas où il refuserait d’obéir, le commissaire devait, devant notaire et témoins, lui intimer « l’ordre de s’abstenir entièrement d’enseigner cette doctrine et opinion, ou de la défendre ou de la traiter ; à défaut d’aquiescement, il serait incarcéré. » Von Gebler, Die Aclen, p. 40 ; ms. du procès, fol. 378 ; Favaro, Galileie l’Inquisizione, p. 62.

En conséquence, le vendredi 26, le cardinal Bellarmin fit venir Galilée dans son palais, et là, en présence du commissaire général du Saint-Office, l’avertit de l’erreur qui lui était reprochée et l’invita à l’abandonner. Ensuite le commissaire lui-même, devant témoins, et notamment devant le cardinal Bellarmin, lui intima au nom du souverain pontife et de la S. C. du Saint-Office, « l’ordre d’abandonner entièrement l’opinion qui prétend que le soleil est le centre du monde et immobile et que la Irrrr se meut, défense de la soutenir désormais en aucune manière, de l’enseigner ou de la défendre par parole ou par écrit, sous peine de se voir intenter un procès devant le SaintOffice. " Von Gebler, Dte Aclen, p. 40 ; ms. du procès, fol. 378-37'.) : Favaro, ibid.

Qu’allait faire Galilée devant une pareille sommation ? Ce serait le mal connaître que de lui prêter un sentiment de révolte. Dans la lettre du 16 février 1615, à Mgr Dini, que nous avons déjà citée, il écri : iil : « Je suis dans l’intime disposition de m’arracher l'œil pour n être pas scandalisé, plutôt que de résister à mes supérieurs et de faire tort à mon àme en soutenant contre eux ce qui présentement me parail évident et que je crois toucher de la main. Favaro, Le opère, t. v, p. 295. Guicciardlnl témoigne qu’il persistait dans ces sentiments à la veille de la décision du Saint Office. Lettre du 4 mars 1616, dans Favaro, ère, l xii, p. 242. On ne s'étonnera donc pas du Reste qu’il lit devant le commissaire de l’Inquisition. Galilée, dit le procès-verbal, acquiesça à l’ordre qui lui était, donné et promit d’obéir. > Von Gebler, Die Aclen, p. 10 ; manuscrit du procès, fol. 378879 ; Favaro, l.r opère, t. xix, p. 322.

La S. G. de l’Index eut sans doute égard à la sim plicité et à la franchise de cette soumission. Dans la condamnation générale qu’elle porta, le 5 mars suivant, contre la théorie copernicienne et contre les ouvrages de Copernic, donec corrigantur, elle ne prononça pas le nom de Galilée ni ne signala expressément ses ouvrages. Von Gebler, Die Aclen, p. 50 ; Favaro, Le opère, t. xix, p. 323 ; cf. Mùller, Galileo Galilei, p. 208-210. Celui-ci n’en comprit pas moins la leçon qui lui était donnée « L’issue de cette affaire, écrivait-il le 6 mars, a montré que mon opinion n’a pas été acceptée par l'Église. Celle-ci a seulement fait déclarer qu’une telle opinion n'était pas conforme aux saintes Écritures, d’où il suit que les livres voulant prouver ex projesso que cette opinion n’est pas opposée à l’Ecriture sont seuls prohibés. » Alberi, Le opère, t. vi, p. 231.

Ses adversaires cependant ne désarmaient pas. Dans une audience du. Il mars, où le souverain pontife lui témoigna une extrême bienveillance, il se plaignit des calomnies qui circulaient toujours sur son compte. Paul V le rassura en affirmant que les Congrégations et lui-même connaissaient parfaitement la pureté de ses intentions et la droiture de son esprit. « De mon vivant, ajouta le pape, vous pouvez être sûr qu’on ne donnera aucune créance aux calomniateurs. » Lettre du 12 mars 1616, dans Alberi, Le opère, t. vi, p. 233.

Cette assurance n’empêcha pas le bruit de se répandre que l’Inquisition avait condamné Galilée à une abjuration et à une pénitence salutaire. Pour réfuter cette allégation injurieuse, Galilée sollicita de Bellarmin une attestation qui lui permît de fermer la bouche à ses ennemis, en rétablissant les faits. Le témoignage du cardinal figura plus tard au procès de 1633. En voici la teneur : « Galilée n’a abjuré ni entre nos mains ni en celles de personne autre, à Rome ou ailleurs, que nous sachions, aucune de ses opinions ou doctrines ; il n’a pas non plus reçu de pénitence salutaire, ni d’autre sorte ; on lui a seulement notifié la déclaration faite par notre Saint-Père et publiée par la S. C. de l’Index, où il est marqué que la doctrine attribuée à Copernic, à savoir que la terre se meut autour du soleil, et que le soleil se tient au centre du monde, sans se mouvoir de l’orient à l’occident, est une doctrine contraire aux saintes Écritures, et que par conséquent on ne peut la défendre ni la soutenir. >< Attestation datée du 26 mai 1616, dans von Gebler, Die Aclen, p. 91 ; manuscrit du procès, fol. 427 ; Favaro, Le opère, t. xix, p. 348.

IV. Infraction au DÉCRET dk 1616. — Galilée quitta Rome et regagna Florence où l’attendaient la bienveillance et les faveurs du grand-duc de Toscane. Allait-il s’ensevelir dans une futile oisiveté ? S’il continuait à poursuivre ses recherches astronomiques, il était bien difficile, pour ne pas dire impossible. qu’il ne retrouvât pas. au bout de ses nouveaux calculs, ses anciennes conclusions.

Or tout l’invitait, ses admirateurs comme ses adversaires, à reprendre ses éludes et à suivre sa pointe.

Dès le 1 er juin 1616, UII médecin napolitain, philosophe et mathématicien, Steiliota, lui traçait un plan de conduite en ces ternies : « Les professeurs des sciences doivent montrer les calomnies des sophistes. La pensée des supérieurs est sainte et juste : mais, comme le décret (de 1616) a été rendu sans que les parties aient été entendues, il faudrait revoir la cause qui Intéresse tout le monde ; il faudrait que les pro fesseurs de mathématiques étrangers présentassent un mémoire. » El avec un grand sens il ajoutait :

tintes prévenir ceux qui gouvernent le monde que les

nies qui cherchent à mettre la discorde entre la science et la religion sont peu amies de l’une et de l’autre. » Alberi. /./ opère, t. viii, p. 386,