Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 6.djvu/610

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

1201.

GENÈSE

1202

Genesi ad lilteram, 1. VIII. c. xi, n. 20, P. L., t. xxxiv, col. 382. Cette explication n’est pas fondée, puisque Dominus est la traduction de Jéhovah qui ne signifie pas seigneur ou maître. A propos de Gen., ii, 7, saint Chrysostome a remarqué plus justement que Moïse a réuni, au début de son livre, les deux noms divins pour montrer qu’ils convenaient également à Dieu et qu’on pouvait les employer indifïéremment l’un pour l’autre. In Gen., homil. xiv, n. 2, P. G., t. lui, col. 112

C’est un médecin de Montpellier, Jean Astruc, qui, le premier, proposa une explication de l’alternance des noms divins dans la Genèse. Cette diversité provenait, selon lui, de deux documents ou mémoires antérieurs, dont Moïse s’était servi pour écrire sur des événements dont il n’avait pas été le témoin : dans l’un, Dieu était appelé Élohim et dans l’autre, Jéhovah. Conjectures sur les mémoires originaux dont il paroit que Moyse s’est servi pour composer les livres de la Genèse, avec des remarques qui appuient ou qui eclaircissent ces conjectures, in-12, Bruxelles (Paris), 1753, p. 10-15. Cf. F. Vigouroux, Les Livres saints et la critique rationaliste, 3° édit., Paris, 1890, t. ii, p. 480-483. Moïse avait eu à sa disposition deux autres mémoires encore : l’un, d’où proviennent les doubles récits, et l’autre, qui comprenait les narrations où Dieu n’est pas nommé. Il avait disposé ces quatre documents sur quatre colonnes parallèles, que les copistes avaient ensuite combinées en les transcrivant les unes à la suite des autres, dans leur état actuel. Cf. G. Hoberg, Die Genesis, p. xxxiixxxiii.

Cette hypothèse de deux documents, distincts par les noms divins employés, fit fortune. Eichhorn étendit la distinction aux cinq premiers chapitres de l’Exode, caractérisa les deux documents élohiste et jéhovistepar leur contenu et leur style, et maintint cjue Moïse, ou un autre rédacteur, avait utilisé ces sources. Dans l’hypothèse fragmentaire, on groupait les fragments en deux séries distinctes par l’emploi des noms divins, Élohim et Jéhovah. Dans l’hypothèse complémentaire, la Genèse était d’abord un écrit unique, bien ordonné, dans lequel l’auteur nommait Dieu Élohim et auquel un dernier rédacteur ajouta plus tard des morceaux jéhovistes. On revint enfin à l’hypothèse documentaire. On admit d’abord plusieurs documents, dont l’un était élohiste cl l’autre jéhoviste, mais à cette phase de la critique du Pentateuque, l’écrit élohiste était le Grundschrift, ou écrit fondamental, qu’on appela plus tard le code sacerdotal. A cette dernière pliase, à laquelle on est demeuré, on a distingué, comme nous l’avons précédemment exposé, trois documents : le petit élohiste, E, le jéhoviste, J, et le grand élohiste ou code sacerdotal, I’. Ce dernier emploie le nom d’Élohim comme le premier. Ce sont 1rs rédacteurs postérieurs qui, en réunissant [’élohiste au Jéhoviste, puis leur combinaison avec le code sacerdotal, ont employé en certains passages les deux noms Jéhovah et Élohim pour établir le raccord des sources. Mais la diversité’des noms divins n’a plus dis lors l’importance quille a eue au début de la critique ; loin d’être décisive, elle n’est plus qu’un élément, el même un élément accessoire, de la distinction des sources, documents sont surtout caractérisés par leur

Contenu et leur Style, et les noms divins servent seulement à dénommer les deux premiers.

lin face et à (’encontre des conclusions de In critique rationaliste, qui enlève < Mole la paternité des docu ments dont serait formée la G< tuelle, les

commentateurs catholiques ont pris des positions différentes, ils ont maintenu fermement < Mol .i ecrétain i et sa direction, la

composition de la Genèse, Quelque ! uns ont expliqué

la diversité des noms divins par l’exigence du sujet. Ces noms, en effet, ne sont pas synonymes. Ils désignent bien la divinité, mais sous des aspects différents : Élohim, qui désigne les divinités païennes elles-mêmes, est dit de Dieu, envisagé comme Dieu de l’humanité entière, et Jéhovah, qui est le nom propre du Dieu d’Israël, est dit de ce Dieu, honoré spécialement par le peuple choisi. Cf. P. Julian, Élude critique sur la composition de la Genèse, p. 190204 ; F. de Ilummeiauer, Comment, in Genesim, p. 8-14. Cette explication convient à quelques cas, mais non pas à tous. Aussi, pour rendre compte de la diversité des noms divins, d’autres ont-ils admis que Moïse avait utilisé des documents antérieurs, qui donnaient à Dieu des noms différents. M. Vigouroux a pensé que Moïse, écrivant lui-même, employait de préférence le nom de Jéhovah, mais qu’il a inséré dans son œuvre d’anciens documents (traditions orales ou écrites), dans lesquels Dieu était nommé Elohim. Or, en les insérant, il les a conservés tels qu’ils étaient, sans y apporter de changement et en particulier il n’a pas changé le nom d’Elohim. parce que ce changement n’était pas.nécessaire à son but. Et c’est pour faire comprendre à ses lecteurs que la diversité des noms divins n’a point d’importance qu’après avoir reproduit le récit élohiste de la création du monde, il reprend, en son nom, ce récil pour le compléter par d’autres renseignements et il unit dans la même phrase Jéhovah Élohim. Gen., ii, 4. Voir Manuel biblique, 12e édit., Paris, 1906, t. i. p. 253, p. 448-450 ; Les Livres saints et la critique rationaliste, 3° édit., Paris, 1890, t. iii, p. 133-14 1. Cf. abbé de Broglie, Élohim et Jéhovah, dans les Annales de philosophie chrétienne, 1891, t. cxxii, p. 539-568.

M. Hoberg a prétendu, sans raison suffisante, que les sources utilisées par Moïse dans la Genèse ne contenaient que les noms dl’.l et d’Élohim, que Moïse les avait conservés, mais que des copistes postérieurs les ont remplacés en partie par le nom de Jéhovah. Aloses und der l’enlateuch, dans Biblische Studien, Fribourg-cn-Brisgau, 1905, t. x, fasc. 4, p. 49-52 ; Die Genesis, 2e édit., 1908, p. xxii-xxviii. Cf. F. de Ilummeiauer, op. cit., p. 7-8. On ne voit pas pourquoi ces noms n’auraient pas été changés par les copistes dans tous les passages de la Genèse.

D’autres exégètes catholiques oui pensé que Moïse avait utilisé des documents distincts par l’emploi du nom divin, des documents élohistes et jéhovistes. au moins pour les doubles récils de certains faits, dont nous parlerons bientôt. M. Vigouroux croyait ce sentiment faux, mais il reconnaissait qu’il n’était pas condamné et qu’on pouvait soutenir l’emploi, fait par Moïse, de deux documents antérieurs, l’un élohiste et l’autre jéhoviste. Cf. 1’. Vetter, Die li/erarkritisrhe Bedeutung der alttestamentlichen Gottestament dans Tiïbinger theologische Quarlalschrifl, 1903, ]>. 12 sq., 202 sq., 520 sq.

Du reste, Indépendamment de la diversité des noms divins, il est de plus en plus vraisemblable que Moïse a eu à sa disposision des documents écrits, par exemple.

lec.xrvde la Genèse. Cf. J.KIey, Die Pentaleuchf rage,

Munster. 1903, p. 110-112 ; G. Hoberg, Die Genesis. p. xx : M. Ilel/enauer. Iniroductio in librum Gcncseos. p. 65-66. Mais, pour la détermination « les sources utilisées, la considération « h’la diversité des noms

divins ne joue pins qu’un rôle secondaire, et c’est a

juste titre, pour deux considérations principales.

I.a première est que les différents noms divins ne

sont ]ias toujours absolument sûrs, au point de vue

le la critique textuelle, et qu ils nul pu elle ch.i

el déplacés par les copistes. L’état actuel des différents

lextes de la (lenèse en es ! la preuve indéniable.