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HYPOSTASE


(lisp. XXXIV, sect. iv, n. 9, que, dans les créatures, la substance et le suppôt s’identifient et no se distinguent que par notre mode tle les concevoir, Suare/, établit que la personne est un suppôt de nature rationnelle, n. 1K. Hypostasc est le mot grec qui désigne la personne on le suppôt, n. 1-1. Subsistence, au sens concret, a la même signification qu’hypostase, avec une simple différence de raison, n. 15. Dans les créatures, le suppôt ajoute-t-il une entité réelle et positive à la nature concrète qui réalise dans tel individu déterminé l’essence spécifique ? (l’est, nettement posé, le problème de la subsistence, entendue au sens abstrait des scolastique « . Suarez indique les différentes solutions proposées par les théologiens et expose enfin sa manière de voir : « (-omme nous concevons, dit-il, la personnalité par mode d’acte et de perfection, nous comprendrons facilement sa nature et son habitude à l’essence, par l’analyse du rôle qu’elle joue dans la constitution de l'être. En premier lieu, la personnalité est donnée à la nature, afin de lui conférer le dernier complément de perfection dans l’ordre de l’existence, ou, pour m’expiimer ainsi, afin de compléter son existence dans l’ordre de la « 'iiisistence, de telle façon que la personnalité ne soit point le terme propre et immédiat du développement de l’essence, en tant qu’essence, mais de l’essence considérée comme déjà existante… Exister, en etlet, signifie simplement avoir une réalité en dehors des causes, c’est-à-dire dans l’ordre de la nature : d’où il suit que, par soi, l’existence n’implicque nécessairement ni l'être en soi, ni l'être en un autre sujet ; la subsistence, au contraire, indique un moiie d'être déterminé : être par soi et indépendamment de tout autre sujet, et elle s’oppose à Yinexislence. qui indique un mode déterminé d'être en un autre sujet. Donc, tant que l’existence n’est point terminée par ce mode d'être en soi ou d'être en un autre sujet, elle n’est point complète et se trouve dans un état quasi-potentiel : elle ne peut encore posséder la raison de subsistence. L’existence sera donc complète et atteindra sa perfection dans la subsistence, lorsqu’elle sera ainsi terminée par le mode d'être en soi, mode qui achève et complète la substance créée et possède la raison propre de personnalité ou de supposalité, " n. 23. Suarez conçoit donc l’existence prise en soi, existere, comme encore incomplète et attendant, d’un mode particulier d'être, sa détermination dans le sens de sitbsistere ou d’ineristirc. Il ne prétend pas que l’existence de la substance, tant qu’elle n’est pas déterminée par un mode particulier, est indifférente à l'être substantiel ou à l'être accidentel. 1, 'inesse dont il s’agit ici, et que nous avons traduit par incrislrnce, est l’existence substantielle, mais sans subsistence propre, ce qui peut se concevoir lorsqu’une nature est sustentée par une réalité plus parfaite en laquelle elle subsiste. A cette inexistence s’oppose l’existence en soi de la nature possédant sa propre subsistence, n. 20, 27. C’est, on le voit, transposée en termes abstraits, la conception grecque de l’jTroa-aaiç et de l'âvjTrdjTaTov. Mais, précisément à cause de cette transposition, Suarez conclut — ce qui est totalement étranger à la pensée traditionnelle — à la nécessité d’une entité métaphysique, mode substantiel, s’ajoutant à la nature concrète pour la déterminer, et se distinguant d’elle, non comme une chose se distingue d’une autre chose, mais comme le mode se distingue de la chose modifiée, n. 32. Ce mode doit être conçu comme un terme, achevant et complétant la substance dans le sens de l’existence en soi et de l’incommunicabilité : il fait, avec la substance, une véritable composition, n. 28. Cf. De incarnatione, disp. XI, sect. m. Cette théorie a un double fondement, dogmatique et philosophique. D’une part, elle est proposée pour expliquer plus facilement l’union hypostatique ;

d’autre part, la conception d’un mode substantiel distinct de la nature s’impose dans l’hypothèse suarézienne de la non-distinction réelle de l’essence et de l’existence. 'Voir Essence, t. v, col. 8tS. " L’existence, dit Suarez, ne se distingue pas réellement de l’essence actuelle ; la subsistence, au contraire, se distingue réellement de cette essence ; donc elle n’est point la même chose que l’existence. Ou bien à l’inverse : l’essence actuelle et l’existence ne se distinguent pas réellement ; donc, puisque la subsistence se <listingue de l’essence actuelle, il est nécessaire qu’elle se distingue de l’existence L’existence d’une chose n’est pas en effet séparable de cette chose, si cette chose demeure réalité actuelle ; la subsistence, au contraire, est séparable de la nature, quand même cette nature demeurerait dans son entité actuelle, comme c’est le cas pour l’humanité du Christ. Metaph., disp. XXXIV, sect. IV, u. 15 ; cf. De incarnatione, disp. XI, sect. m. Cet exposé du système répond à peu près à la conception de tous les théologiens qui, rejetant la distinction réelle de l’essence et de l’existence, acceptent le mode substantiel dans l’explication de l’union hypostatique. Voir De Lugo, De incarnatione, disp. Ail, sect. I, n. 1-4 ; Vasquez, In Sum. S. Thomæ, III=, q. IV, a. 2, disp. XXXI ; Grégoire de N’alencia, /)('mfcarnatione. In Sum. S. Thomse, III », q. iv, p. ii (notons toutefois que ce théologien, qui ne rapporte pas moins de huit opinions sur la question, tient pour plus probable l’opinion de Scot) ; les Conimbricenses, De qener. et corrupt., t. I, c. iv, q. vi, a. H ; Diatect. de prædic. c. V, q. i, a. 1 ; Ragusa, In Sum. S. Thomæ, lll. disp. LVII, n. 2 ; Arrubal, In Sum. S. Thomæ, I q. XXXI, a. 4, disp'. CVI, c. il ; Lossada, Metaph., disp. III, c. II ; Silvius, In Sum. S. Thomse, III », q. I^, a. l ; Tolet, In Sum. S. Thomæ, III », q. ii, a. 2 ; Didace Ruiz, De Trinilute, disp. XXXIV, sect. vii, n. 1, 2 ; sect. viii, n. 18 ; Th. Raynaud. Theologia naturalis. disp. III, q. Lvi ; et de nos jours, Schmid. Quæstiones selectse, Paderborn, 1891, p. 340 sq. : Urraburû, op. cit., disp. V, c. II, a. 2 ; Muncunill, De Verbi divini incarnatione, Madrid, 1905, n. 193. Mais il est bon de noter que les grands théologiens, Suarez. De Lugo, Vasquez, qui ont le plus contribué, par leur talent et leur autorité, à répandre cette doctrine dans l’enseignement catholique, sont loin de s’accorder sur la portée philosophique du système. Suarez trace du mode une métaphysique toute spéciale. Le mode, pour lui, n’est pas, à proprement parler, une chose, ni, en rigueur, un être réel : il est attaché à la substance dont il marque les modifications. Toute modification est le résultat d’un mode : modification substantielle suppose mode substantiel ; modification accidentelle suppose mode accidentel. Partant, toute union est elle-même le résultat d’un mode, le mode d’union (dont Suarez, à rencontre de Cajétan et de l'école thomiste, fera l’un des points essentiels de sa théorie de l’unionhj’postatique) ; l’union de la matière et de la forme suppose un mode par lequel matière et forme sont réunies pour former le composé ; ce mode, c’est Vinhœsio subslantialis. Metaph., disp. VII, sect. ix, n. 5. L'éduction de la forme est un mode ; la génération est un mode ; la causalité, sous ses divers aspects, est un mode ; l’union de l'âme et du corps est un mode, n. 6-12. En considérant la subsistence comme un mode de la substance, Suarez ne fait donc qu’une application particulière de sa théorie générale, mais il est obligé d’en pousser les conséquences logiques jusqu’au bout. Comme la substance peut être composée, composée aussi pourra être 'a subsistence, composée de.mbsistence matérielle et de subsistence formelle, Metaph., disp. XXXIV, sect. v, n. 5, 22, 35, 42 : cf. disp. XIII, sect. v, n. 14 : l'âme aura sa subsistence incomplète, mais spirituelle ; le corps, sa subsistence incomplète et matérielle, n. 27, 30 ;