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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 7.1.djvu/344

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IDOLOTHYTES

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Dans la première Épître aux Corinthiens.

La

-question des idolothytes préoccupait les chrétiens de Corinthe en l’an 57. Quelques-uns interrogèrent à ce sujet saint Paul, leur apôtre. Celui-ci fit une longue réponse, I Cor., viii, 1-xi, 1, et donna une solution théorique et pratique.

1. Solution théorique, viii, 1-ix, 22. — Saint Paul pose d’abord deux principes de solution, la science et la charité, viii, 1-3. Il sait que ceux qui l’ont interrogé ont une science parfaite sur Dieu et les idoles ; mais cette science ne suffit pas à résoudre la question des idolothytes, il faut y joindre la charité. La science seule enfle, donne de l’orgueil, fait mépriser les faibles et ne tient pas compte de leur faiblesse, mais la charité envers Dieu et envers le prochain édifie, concourt à l’édification de l’Église, dont les chrétiens sont les pierres. Si quelqu’un s’imagine avoir la science parfaite sur quelque chose, il ne sait pas encore comment il faut savoir, comment il faut s’y prendre pour avoir la science parfaite de cette chose. Mais si quelqu’un aime Dieu, celui-là est vraiment connu de Dieu, qui le reconnaît pour son fils, parce qu’à la science il joint la charité.

Quel est le rôle de la science et de la charité dans la solution de la question des idolothytes ? viii, 4-6. Au sujet de la manducation des viandes immolées aux idoles, les chrétiens savent qu’il n’y a pas d’idole, c’est-à-dire de faux dieux dans le monde et qu’il n’y a pas de Dieu, sinon l’unique vrai Dieu. En effet, s’il y a au ciel et sur terre des êtres qu’on appelle des dieux dans le paganisme, pour nous, chrétiens, il n’y a qu’un seul Dieu, le Père, duquel viennent toutes choses et nous pour lui, et un seul Seigneur, Jésus-Christ, par qui sont toutes choses et nous par lui. Voilà ce que nous apprend la science, viii, 4-6. Il n’y a pas de faux dieux, et par suite les viandes qui leur sont immolées pourraient être mangées sans scrupules. Mais la charité fraternelle intervient. Comme certains chrétiens croient encore peut-être à la réalité de l’idole, s’ils mangeaient des idolothytes, leur conscience qui est faible, en serait souillée, en raison de la fausse idée qu’ils auraient de la réalité des idoles. En réalité, un aliment ne nous fait pas valoir devant Dieu ; la nourriture est une chose indifférente aux yeux de Dieu ; si nous n’en mangeons pas, nous ne valons pas moins ; si nous en mangeons, nous ne valons pas plus. Les chrétiens peuvent donc manger des idolothytes, dont la manducation aussi bien que l’abstention est sans valeur auprès de Dieu. Mais ils doivent, pour régler leur c induite, prendre en considération si leur droit d’en manger ne devient pas pour les faibles une pierre d’achoppement. La science de la non-existence des faux dieux ne suffit pas à autoriser la manducation des Idolothytes en n’importe quel cas. Par exemple, si quelqu’un voit un chrétien, qui a cette science et agit en conséquence, assis à table dans un temple d’idoles et participnnt au banquet d’un sacrifice idolâtrique, sa conscience à lui, qui est faible, ne l’incitcra-t-elle pas à manger des idolothytes ? ne le portera-t-elle pas, malgré sa fausse conviction, à imiter son frère fort et savant, et à souiller sa conscience ? Son frère sera <Ionc pour lui une pierre d’aclioppement, et ce faible, pour qui le Christ est mort, se perdra en raison de l’usage que le chrétien fort aura fait de sa science. Or, en p6( ; iiant de la sorte, en induisant ses frères au péché et en portant un coup mortel à leur conscience faible, on pèche contre le Ciirist lui-même, puisqu’on méprise la mort qu’il a subie pour le salut des âmes faibles. C’est pourquoi, conclut l’apôtre, si la nourriture scandalise mon frère, je ne mangerai plus de viande pour toujours, pour ne pas scandaliser mon frère, viii, 7-1.3. Ainsi le principe de la charité doit écarter de la manducation des Idolothytes, que la

niCT. DU TUf.Ol.. CATIIOI, .

science autoriserait, de peur de scandaliser les chrétiens faibles qui, par une fausse persuasion, croiraient encore à la réalité des faux dieux.

Saint Paul illustre ensuite cette manière d’agir par son propre exemple. Quoiqu’il ait, comme les autres apôtres, le droit de vivre de son apostolat, il travaille de ses mains et ne se fait pas accompagner d’une femme-sœur, ix, 1-18. Bien qu’il soit libre, il se fait l’esclave de tous : il se fait juif pour les juifs, soustrait à la Loi avec ceux qui ne sont pas sous son autorité, faible avec les faibles afin de les gagner, ix, 18-22. 2. Solution pratique.

La pratique de la manducation des idolothytes doit se régler sur les exemples des juifs, qui, malgré les privilèges qu’ils avaient reçus du vrai Dieu, se sont laissé aller à l’idolâtrie. Ces exemples doivent servir de leçons aux chrétiens, puisqu’ils sont des tj-o-, des images prophétiques, des événements providentiellement ordonnés pour apprendre ce qu’il ne faut pas faire. Ils enseignent donc aux « forts » ce qu’ils doivent redouter s’ils ne veillent pas sur eux-mêmes : eux, qui sont debout, doivent prendre garde de ne pas tomber. Si Dieu permet la tentation, il donne la force de la supporter, x, 1-13.

Puisque les Israélites, au désert, sont tombés dans l’idolâtrie, 7, les chrétiens doivent fuir l’idolâtrie, 14, s’ils veulent profiter des leçons du passé. Saint Paul leur parle comme à des hommes sensés, capables de juger eux-mêmes de ce qu’il leur dit. Ils communient au sang du Christ en participant à la coupe de bénédiction qu’ils bénissent, et au corps du Christ, en mangeant le pain eucharistique qu’ils rompent. Un des effets de la manducation de l’eucharistie consiste à faire de tous ceux qui la mangent un seul corps. Les Israélites, en mangeant les victimes, participent, eux aussi, à l’autel, x, 15-18. Un repas sacrificiel a donc des conséquences religieuses, et y participer n’est pas une chose indifférente. Ainsi saint Paul est-il amené à résoudre un premier cas, celui des repas de sacrifice, pris dans les temples païens ou dans leurs dépendances.

1° cas, manducation des idolothytes dans les temples païens. — Si la participation à la coupe et au pain eucharistiques est pour les chrétiens une communion au sang et au corps du Christ, si la participation aux victimes immolées au vrai Dieu est pour les juifs une participation à l’autel, l’idolothyte et l’idole des païens sont-ils quelque chose ? Non. Saint Paul maintient donc le principe de science parfaite, qu’il a exposé plus haut. Mais ce que Jes païens offrent en sacrifice, ils l’immolent à des démons et non pas à Dieu. Les chrétiens ne doivent donc pas en manger, car saint Paul ne veut pas qu’ils soient en communion avec les démons. Ceux qui boivent le calice du Seigneur et participent à sa tal)Ie ne doivent pas boire le calice des démons ni participer à la table des démons. Croire qu’on peut prendre part à la fois au sacrifice chrétien et aux sacrifices païens, n’est-ce pas vouloir jirovoquer la jalousie du Seigneur Jésus, tenter Dieu comme ont fait les juifs, 9, et attirer sur soi sa vengeance ? N’est-ce pas s’imaginer qu’on sera plus fort que lui et qu’on évitera sa punition ? x, 19-22.

La conclusion est donc qu’un chrétien ne peut pas prendre part aux repas sacrés que les païens faisaient dans les temples des idoles. Après avoir offert un sacrifice, ils invitaient leurs parents et leurs amis. Ainsi Chérémon, au ii » siècle de notre ère, invitait à dîner à la table du Seigneur Sérapis et au Sérapéum, pour le lendemain 15 du mois, à 9 heures. Grenfell et Hunt, The Oxijrrinchus papyri, Londres, 1898, t. i, p. 177, n. cv. Un chrétien n’aurait pu réjiondre à cette invitation, parce que le repas était pris dans un temple, iv i’.f » <})J.f>. I Cor., viii, 10. L’invitation à un banquet sacré qui serait fait dans une maison privée devrait

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