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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 7.1.djvu/619

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IMMUNITÉS ECCLÉSIASTIQUES


reservalionem casibus de quitus jure vel privilégia permillitur ut episcopus aul alius absolvat. L’exception finale fait surtout allusion à l’induit quinquennal de la Sacrée Pénitencerie qui, anciennement, permettait à l’ordinaire d’absoudre les coupables quand il n’y avait pas eu de mort, de mutilation, de blessure mortelle ou de fracture et que le délit n’avait pas entraîné une action au for externe. Un décret de la S. Inquisition du 9 janvier 1884 décida que les percussores clericorum étaient vitandi, même sans dénonciation ou publication, la constitution de Martin V restant en vigueur sur ce point.

2. La discipline actuelle.

Elle est définie par les canons 119 et 2343 du Codex juris canonici.

Le canon 119, après avoir énoncé le principe général que les fidèles doivent le respect aux clercs et un respect d’autant plus grand que ces derniers occupent un rang plus élevé dans la hiérarchie ecclésiastique, détermine la nature du ciùme constitué par un manquement grave et extérieur à ce respect : c’est un sacrilège : seseque sacrilegii delicto commaculant, si quando clericis realem injuriam intulerint. La realis injuria suppose un acte et non de simples paroles. Cette prescription générale implique tout un ensemble de devoirs qui dépasse de beaucoup la simple observation du privilège du canon. C’est à cette dernière que se limite le canon 2343 qui édicté plusieurs peines contre les agresseurs des clercs. On peut l’analyser en répondant aux questions suivantes : Quels sont ceux que ce canon protège ? les coupables qu’il frappe ? les peines qu’il porte ?

a) Les bénéficiaires du privilège sont les clercs et les religieux des deux sexes. Cf. can. 614 et 490. Par clercs il faut entendre tous les tonsurés, même non pourvus d’office ou de bénéfice, même suspens, irréguliers, censurés ou déposés. Cf. can. 2303. Sous le nom de religieux on comprend les profès à vœux simples temporaires, can. 488, § 1, les frères laïcs, can. 614, les novices, can. 614, et même ceux qui vivent en commun sans vœux, can. 680. Il ne semble pas que dans le droit actuel les ermites qui ne font pas partie d’une congrégation soient de vrais religieux : autrefois ils étaient considérés comme tels s’ils avaient reçu l’habit de la main de l’évêque et exerçaient le saint ministère au service d’une église placée sous l’autorité de ce dernier. Par contre ne jouissent plus du privilège du canon : les clercs définitivement privés du droit de porter l’habit ecclésiastique, can. 2304, §2, les clercs réduits à l’état laïc, can. 213, § 1, par exemple, à la suite d’une dégradation, même par une simple sentence (degradatio verbalis, opposée à la degradatio realis, can. 2305), les clercs mineurs qui contractent mariage, can. 132, § 2 (ces clercs, en agissant ainsi, usent d’un droit, mais par le fait même ils perdent tous les privilèges cléricaux ; l’ancienne discipline était différente, cf. Décrétales, t. III, tit. II, c. unique. De clericis conjugatis), les clercs qui s’engagent volontairement dans l’armée de leur propre initiative, serait-ce seulement pour se trouver libérés plus tôt, can. 141, § 2, les clercs qui restent plus d’un mois sans porter l’habit ecclésiastique après monition de l’ordinaire, can. 236, § 3. Sont également exclus du privilège les religieux sécularisés qui ne sont pas clercs, parce que la sécularisation entraîne l’obligation de quitter l’habit, can. 640 ; on leur assimile ceux qui sont renvoyés au siècle, même les minorés, car la diinissio implique la réduction à l’état laïc, can. 648, 669, § 2.

b) Tous les agresseurs des clercs sont atteints par notre canon, fussent-ils clercs eux-mêmes. Il faut excepter les cardinaux qui n’encourent les censures que s’ils sont expressément nommés par la loi ou le législateur, can. 2227, § 2. On doit également se rap peler que les impubères ne sauraient être frappés de censures lalæ sententiæ, can. 2230. En vertu du principe posé par le canon 2209, § 3, sont assimilés aux auteurs mêmes de la violence ceux qui l’ont ordonnée et qui y ont coopéré, physiquement ou moralement, de telle sorte que sans leur intervention elle n’aurait pas pu avoir lieu. Ces deux cas ne constituent qu’une partie de ceux que prévoyait la bulle Apostolicse sedis, en frappant de l’excommunication spécialement réservée au souverain pontife les agresseurs des cardinaux, patriarches, archevêques, évêques, légats et nonces, necnon ea mandantes vel rata habentes, seu prsestantes in eis auxilium, consilium vel favorem. Par contre, la bulle ne faisait pas cette énumération extensive quand elle parlait des simples clercs. L’ignorance simplement vincible, c’est-à-dire celle qu’on a pris quelque peine de combattre, met à l’abri de la censure. Au contraire l’ignoraniia crassa seu supina, qui ne suppose aucun effort pour s’in struire, n’en rend pas exempt. Le Code a, en effet, supprimé le suadente diabolo de la bulle Apostolicæ scd Ps, —section ii, n. 2, qui a généralement pour but de faire une excuse de V ignorantia crassa elle-même. Voir col. 738. Mais évidemment ne sera excommunié que celui qui connaîtra le caractère clérical du personnage qu’il moleste.

Quant à l’acte condamné il s’agit d’une violence véritable, coupable et de l’ordre des faits extérieurs. La légitime défense est d’abord exclue. Un meurtre ou une blessure accidentels, même résultant d’une imprudence, ne rentrent pas non plus dans le cas. Une pression morale, un abus d’autorité sont également hors de cause. Seule entraînera l’excommunication une violence grave, au moins par l’injure qu’elle fait ou par l’atteinte qu’elle porte à la liberté (l’emprisonnement, par exemple), sinon par le coup lui-même qu’elle donne. De simples paroles, si offensantes qu’on les suppose, ne sauraient constituer la violenta manuum injectio.

c) Tandis que la bulle Apostolicæ sedis n’édictait que deux catégories de peines suivant la dignité des personnages atteints, le Code établit une série de sanctions à quatre degrés. Tout d’abord il considère à part la violence exercée sur le souverain pontife, ce que ne faisait pas la législation antérieure, bien qu’évidemment le pape fût compris parmi les hauts dignitaires ecclésiastiques qu’elle protégeait. L’excommunication portée dans ce cas est réservée specialissimo modo, ce qui est un cas nouveau de la plus grave des excommunications. Le coupable est, ipso jacto, vitandus, sanction également spéciale, carlesilence du canon 2343 sur ce point quand il s’agit des autres membres de la hiérarchie ecclésiastique, les cardinaux compris, fait croire que les agresseurs de ces derniers ne seront plus désormais vitandi. (L’édition annotée du Code ne renvoie pas au décret contraire de la S. C. de l’Inquisition en date du 9 janvier 1884.) L’infamie de droit et, pour les clercs, la dégradation sont les deux autres sanctions de l’atteinte portée à la personne du pape.

A l’excommunication réservée speciali modo portée par la bulle Apostolicæ sedis, le Code ajoute l’infamie ainsi que la privation des bénéfices, offices, dignités, pensions et fonctions, seulement quand des cardinaux ou des légats sont en cause, mais non pas lorsqu’un patriarcl’.e, un archevêque ou un évêque a subi la violence.

Enfin l’excommunication simplement réservée au souverain pontife dans le cas de l’agression des clercs ou des religieux, édictée par la huile Apostolicæ sedis. se réduit maintenant à une excommunication réservée à l’ordinaire qui, d’ailleurs, pourra y ajouter d’autres peines s’il le juge nécessaire.