Aller au contenu

Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 7.1.djvu/79

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
143
144
HONORIUS AUGUSTODUNF.NSIS


évoque de la métropole anglaise (1033-1109) ; il expliquerait (mais ceci est beaucoup plus conjectural) la dédicace de deux ouvrages de notre auteur à un certain Thomas, en qui l’on pourrait voir Thomas Becket, archevêque de 1162 à 1170.

Reste à la thèse d’Endrcs une grosse difficulté. Gomment expliquer l'énigmatique notice : Ilonorius Augustodunensis Ecclesiæ presbytcr et scolasticus ? Sans s’arrêter à la conjecture, vraiment trop facile, qui consisterait à lire Aiiciuslinensis à la place d' Aiigiisloduncnsis, et qui ferait du moine Hoiiorius un ancien écolâtre d’Augsbourg, si près de Katisbonne, Endres essaie de résoudre la difficulté par une hypothèse compliquée. Le titre que se donne Honorius ne serait pas autre chose qu’un pseudonyme volontairement créé par lui pour dérober aux critiques ou aux admirations son humble personne. Pour qui connaissait l’auteur, il désignait sulTisamment le moine qui de son couvent, situé sur la hauteur d’Auguste (V Auguslodunum ; Ai ! (7Us/e=Char ; emagne ; d(inum = colline, en cette. Charlemagne passait pour avoir remporté une victoire aux portes de Ratisbonne), s’occupait à répandre dans le clergé les plus utiles connaissances (d’où le nom de scolasticus). En même temps ce pseudonyme égarerait tous les non-initiés à qui n’importait guère la personne d’Honorius, mais seulement son œuvre. Si telle était au Tai l’intention d’Honorius, il faut reconnaître qu’elle a été remplie à souhait. Dans la reconstruction d’Endres toutes les parties ne sont pas également satisfaisantes. Si le séjour de notre Honorius à Ratisbonne semble incontestable, l’explication des mots Augustodunensis Ecclesiæ presbytcr et scolasticus, est beaucoup moins satisfaisante Pourquoi ne pas traduire simplement Augustodunensis presbytcr, par prêtre d’Autun ? Quant à déduire les raisons pour lesquelle ; ce prêtre d’Autun aurait terminé sa carrière à Ratisbonne, c’est une autre affaire. Dans un travail postérieur à celui d’Endrcs, M. F. Baumker a soutenu, non sans vraisemblance, que l'écolâtre d’Autun avait été amené à quitter sa primitive résidence à cause de difficultés qu’aurait soulevées son enseignement. On prendra celle conjecture pour ce qu’elle vaut.

Ajoutons que les reconstitutions plus ou moins plausibles que nous venons de signaler supposent toutes, comme point de départ, l’authenticité de la notice finale du De luminaribus et l’attribution à Honorius des ouvrages mis sous son nom par les mss. Ces deux points sont-ils hors de conteste ? On l’a nié. J. Kelle, qui, dans une série de communications à l’Académie de Vienne, s’est fait une spécialité de la question d’Honorius, en est arrivé progressivement à nier l’authenticité des principaux traités jusqu’ici attribués à notre auteur. Le Spéculum Ecclesiæ, qui fut de tous le plus utilisé, circule le premier sous le nom d’Honorius. Peu à peu il attira à lui d’autres ouvrages anonymes que l’on s’habitua à considérer comme étant frères du Spéculum, sans qu’on pût en donner la preuve. C’est d’une telle situation qu’est témoin la notice finale du De luminaribus. Elle fut ajoutée après coup à l’ouvrage à une époque où l’on n’avait plus aucun renseignement sur la jeunesse ni sur l'œuvre d’Honorius. C’est dire qu’elle ne peut nullement servir à reconstituer le personnage du « grand inconnu du xiie siècle ».

  • "En tout cas, les divers traités attribués par la notice et

la tradition manuscrite à Honorius Augustodunensis sont d’auteurs extrêmement différents.

Ces conclusions, plus que radicales, n’ont pas été acceptées par l’ensemble des critiques. On peut contestersans doute l’appartenance de quelques-uns des ouvrages mis sous son nom par les manuscrits. Il n’en reste pas moins que l’ensemble des traités attribués à notre auleurpar les manuscrits et la notice du De luminaribus

présente un air de famille incontestable ; que les quelques indications personnelles fournies au début de plusieurs se superposent exactement aux données de cette notice ; que cette dernière, dès lors, est à considérer comme véridique ; elle est donc enfin l'œuvre authentique d’Honorius. Les recherches ultérieures sur le mystérieux personnage devront prendre leur point de départ dans la fameuse notice.

II. Ses écrits.

Nous croyons dès lors, en tête de cette recension des œuvres d’Honorius, devoir reproduire le texte exact de la notice finale du De luminuribus.

Honorius, Augustodunensis Ecclesiæ presbyter et scolasticus, non spernendo opusculo edidit : Elucidarium, in tribus libellis, primum de Christo, secundum de Ecclesia, tertium de futura vita distiiixit ; libellum de sancta Maria, qui Sigillum sanctæ Mciriic intitulatur ; unum de libero arbitrio qui Ineinlahile dicitur ; ununi li !)c’llum sermonum qui Spcculum Erdesiie nuncupatur ; de incontinentia sacerdotum, qui O/fendiciiliim appcllatur ; Suntinam (odiis, de omnimoda historia ; Gemmani anima ; de divinis officiis ; Sacramentarium, de sacranientis ; Ncocosnitim, de priniis sex diebus ; Eticliaristion, de corpore Domini ; Cognitionem vitæ, de Deo et aeterna vita ; Imnginem mundi, de dispositione orbis ; Summani gloriam, de Apostolico et Augusto ; Scalani cœli, de gradibus visionum ; De animd et de Deo, quædam de Augustino excerpta, sub dialogo exarata ; Exposilionem lotius Psalterii cuin canticis, miro modo ; Cantica canlicorum exposuit, ita ut prius exposita non videantur ; Evangelin, quae beatus Gregorius non exposuit ; Clavem plujsicie, de natuia rerum ; Rejectionem mentium, de festis Domini et sanctorum ; Pabulum vilic, de prsecipuis festis ; hune libellum De luminaribus EcclesiiC. Sub quinto Henrico lloruit. Quis post liunc scripturus sit, posteritas videliit. P. L., t. clxxii, col. 232-234.

L’ordre adopté par la notice est, de toute évidence, l’ordre chronologique. C’est lui que nous suivrons, en indiquant, pour chaque traité, la question d’authenticité, le contenu et les sources. Ce dernier point est d’importance, car Honorius est le moins indépendant des auteurs, et l’indication des sources où il a puisé peut éclairer plusieurs questions de doctrine. Une dernière remarque générale : presque tous les ouTages. en dehors de leur sous-titre qui indique assez bien le contenu, portent un titre expressif, destiné à frapper dès l’abord l’attention du lecteur. Plusieurs de ces expressions toutes faites ont été empruntées par Honorius à quelqu’un de ses prédécesseurs ; plusieurs aussi passeront après lui à d’autres ouvrages, quelquefois très différents. Enfin le dialogue, déjà employé par saint Anselme pour les discussions théologiques, est I très fréquent dans les œuvres d’Honorius. « 

1° Elucidarium, sive dialogns de summa tolius christianæ theologiæ, P. L, t. clxxii, col. 1109-1176. — Ce traité dans les mss est ballotté d’auteur en auteur. Saint Augustin et Abélard, Anselme et Lanfranc, pour ne pas citer d’autres noms moins célèbres, ont été successivement désignés. Hauréau pouvait écrire en 1892 : « L’auteur, qui n’a pas voulu se nommer, sera toujours inconnu. » Notices et extraits de quelques mss latins de la Bibliothèque nationale, t. v, p. 266. J Kelle est d’avis que l’attribution à Honorius est sans garantie ; sans qu’on puisse jamais savoir de qui est V Elucidarium, on peut affirmer qu’il n’est pas antérieur à l’avant-dernière décade du xiie siècle. Hauck, j qui n’admet pas, tant s’en faut, les conclusions radicales de Kelle sur Honorius, donne cependant raison à ce critique sur le point de V Elucidarium. Realencyclopàdie fur protestantische Théologie und Kirche, . t. xxiii, Nachlrcige, 1913, p. 661. L’un et l’autre ont fait observer que la description de V Elucidarium dans la notice (trois livres : sur le Christ, sur l'Église, sur la fin dernière) ne correspond que partiellement à la division du texte édité. Ils font état également des cr.ntradictions apparentes qui existent entre certaines idées de ce livre et d’autres traites d’Honorius.