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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 7.2.djvu/212

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INFAILLIBILITÉ DU PAPE


dans son ensemble, ne donne aucun témoignage concluant en faveur de l’infaillibilité pontificale, nous le mentionnons ici, parce que, dans les siècles suivants, il a fourni des arguments aux adversaires aussi bien qu’aux défenseurs de l’infaillibilité pontificale.

Contre l’infaillibilité pontificale, on a invoqué l’attitude prise par Gratien à l’égard d’Anastase II. L’auteur du Décret rapporte d’abord la décrétale, d’ailleurs authentique, d’Anastase II reconnaissant la validité des sacrements conférés par Acacede Constanlinople depuis sa déposition, et établissant d’une façon générale la validité des sacrements conférés par des ministres indignes. Puis il ajoute : " Pour avoir agi de cette manière illicite et anti-canonique, à rencontre des décrets de ses prédécesseurs et de ses successeurs, Anastase est rejeté par l’Église romaine, et on sait par ailleurs qu’il fut frappé par Dieu, ideo ab Ecclesia romana repudiatur, et a Deo percussus leyiiur fuisse hoc modo. Suit la notice empruntée au Liber pontificalis, qui justifie l’assertion de Gratien. Décret., l, dist. XIX, c. 8 et 9, P. L., t. clxxxvii, col. 109 sq. ; édit. Friedberg, t. i, col. 63 sq. On remarquera seulement que l’appréciation sévère de Gratien ne tombe pas sur le décret dogmatique d’Anastase, mais seudement sur les collusions dont ce pape se serait rendu coupable avec des hérétiques déclarés. En ceci Gratien ne faisait que suivre toute son époque qui unanimement regardait Anastase comme un des papes tombés dans l’hérésie. Au xive siècle encore, Dante fait une place dans son En/er, t. XI, 9, à Anastase, « que Photin a entraîné hors du droit chemin. >- Voir J. Dôllinger, JDie Papstfabeln des Mittelallers, p. 124 sq.

En faveur de l’infaillibilité, on a pu citer le dictum de Gratien ainsi formulé : Jésus-Christ accordant à Pierre, præ omnibus et pro omnibus, les clefs du royaume des cieux, donne lui-même sa parole, qu’il a prié spécialement pour la foi de Pierre et qu’il lui a enjoint de confirmer ses frères par ces mots : Ego rogavi pro te ut non deftciat fides tua, et tu aliquando conversus confirma fratres tuos. Décret., part. I, dist. XXI, édit. Migne, col. 115 : Friedberg, col. 67.

Le Decretum contient encore plusieurs canons favorables à l’infaillibilité pontificale, presque tous d’origine pseudo-isidorienne. La sainte et apostolique Église romaine, mère de toutes les Églises, n’a jamais dévié de la vraie foi apostolique, et elle garde intacte, jusqu’à la consommation des siècles, la règle de la foi chrétienne qu’elle a reçue de ses fondateurs. Décret., part. II, causa XXIV, q. i, c. 9, canon pseudo-isidorien, édit. Migne, col. 1268 ; Friedberg, col. 969. La foi de l’Église romaine n’a jamais aidé aucune hérésie et elle les détruit toutes, c. 10, canon pseudo-isidorien, édit. Migne, col. 1268 ; Friedberg, col. 969. Dans le siège apostolique, la religion catholique a toujours été exempte de tache, c. 11, canon pseudo-isidorien, édit. Migne, col. 1268 ; Friedberg, col. 969. Toutes les fois que la question de la foi est agitée, il y a obligation pour tous, fidèles et évêques, d’en référer à Pierre, afin que celui-ci puisse, dans tout l’univers, être utile à toutes les Églises, selon la lettre du pape saint Innocent 1^’, en 417, aux évêques du concile de Milève, c. 12, édit. Migne, col. 1269 ; Friedberg, col. 970. C’est au pape qui tient la foi et le siège de Pierre, à corriger ce qui peut être dit minus periie aut parum caute relativement à la foi. La sainte Église romaine, qui est toujours restée immaculée, le restera toujours, dans l’avenir, avec le secours de la providence divine et celui du bienheureux apôtre Pierre ; et elle continuera, dans tous les temps, à être à l’abri de toutes les attaques de l’hérésie et inébranlableanent ferme, c. 14, canon pseudo-isidorien, édit. Migne, col. 1269 ; Friedberg, col. 970. Il n’est point permis

d’enseigner ou de penser autrement que l’on a été enseigné par le bienheureux Pierre et les autres apôtres, parce que saint Pierre est le chef de toute l’Église, auquel toutes les affaires majeures doivent être référées, c. 15, canon pseudo-isidorien, édit. Migne, col. 1270 ; Friedberg, col. 970.

Au XI W siècle.

1. Interventions doctrinales ou affirmations des souverains pontifes. — a) Chez le pape Innocent III († 1216), on rencontre, à peu près, les mêmes expressions que chez ses prédécesseurs du xiie siècle. Il afilirme, dans plusieurs circonstances, que Jésus a prié spécialement pour que la foi de Pierre ne défaille pas, Luc, xxii, 32 ; qu’en conséquence il appartient à Pierre et à ses successeurs de confirmer les autres, de telle sorte que la nécessité d’obéir leur soit imposée. Regesta, t. II, epist. ccix, P. L., t. ccxiv, col. 760 ; Registrum de negotio romani imperii, epist. Lxxxv, P. L., t. ccxvi, col. 1091.

On doit aussi mentionner l’appellation cunctorum fidelium mater et magistra donnée à l’Éghse romaine par le IV « concile de Latran en 1215. Denzinger-Bannwart, n.433, 436.

b) Le pape Clément IV, en 1267, détermine, par sa seule autorité, la profession de foi demandée à Michel Paléologue, empereur de Constantinople, en vue de l’union projetée avec l’Église romaine. Dans cette profession de foi, le pape, de lui-même, insère l’affirmation explicite de plusieurs dogmes qui, jusqu’à cette époque, n’avaient point encore été l’objet d’une telle affirmation, ni dans les professions de foi, ni dans les déclarations des conciles : notamment la croyance au Saint-Esprit procédant ex Pâtre Filioque, la croyance au purgatoire et à l’efficacité des suffrages offerts pour les âmes du purgatoire, et toute la doctrine sur les sacrements. Denzinger-Bannwart, n. 463 sq.

On doit aussi noter l’insistance avec laquelle la profession de foi propose la croyance de l’Église romaine, comme la règle de foi que doit suivre tout fidèle catholique, ainsi que l’affirmation très explicite de la souveraine autorité doctrinale du pape : Et sicut præ cœteris tenetur fidei veritalem defendere, sic et si quæ de fide subortæ fuerint questiones, suo debent fudicio definiri. Denzinger-Bannwart, n. 466. On sait d’ailleurs que cette profession de foi fut solennellement approuvée et acceptée par le Ifi^ concile œcuménique de Lyon en 1274.

c^ Il convient particulièrement d’observer que les condamnations portées, à cette époque, avec une souveraine autorité, par les pontifes romains, ont pour objet non seulement la réprobation de ce qui est directement et immédiatement opposé à la foi, comme la condamnation portée contre les cathares et autres hérétiques du même genre, Denzinger-Bannwart, n. 444, mais encore ce qui est contre la foi d’une manière plus indirecte et plus lointaine, comme l’abus théologique des expressions nouvelles empruntées à la philosophie ou des raisonnements purement naturels, n. 442 sq. Voir Église, t. iv, col. 2182.

2. Affirmations des principaux théologiens.

Nous citerons particuhèrement Innocent III dans son traité De si cro allaris mysterio composé avant son pontificat, saint Thomas et saint Bonaventure.

a) Innocent III († 1210) insiste sur l’impossibilité d’une erreur quelconque dans la foi du siège apostolique, d’après le texte Ego autem pro te rogavi : Ad Petrum igitiir tanquam ad magistrum pertinet cœteros confirmare, cujus fides in nulla leniatione defecit. Fides cnim apostoticæ sedis semper firmam petram stabili soliditate fundata, nullis unquam errorum sordibus potuil inquinari ; sed absque ruga manens et macula, pro necessitate temponim, a cseleris maculas detersit errorum. De sacro altaris mysterio, t. I, c. viii, P. L., t. ccxvii, col. 778.