écartée, du moins dans quelque cas particulier et apiid perlinacem aliquem. L’autorité des décrets de l'Église romaine n’est donc aucunement niée ; elle est simplement jugée moins éclatante, au moins dans quelque cas particulier, que l’autorité du magistère ordinaire de l'Église universelle.
Quant à la phrase : nec vindicat sibi fidem dari sub pœna perfidiæ, appliquée aux décrets de l'Église romaine comme aux autres autorités indiquées, elle peut simplement signifier qu’il n’y a pas nécessairement obligation d’y adhérer sous peine de perdre la foi catholique ; ce qui, dans les siècles suivants, et en l’absence de définition formelle jusqu’au concile du Vatican, fut encore admis par beaucoup de théologiens.
Dans un autre passage, Netter affirme incidemment que la promesse de Jésus, Ego rogavi pro te, faite à Pierre, doit s’entendre de l'Église universelle dispersée par toute la terre, t. II, c. xix, n. 1, 1. 1, p. 193. Cette affirmation signifiant assez fréquemment chez les meilleurs défenseurs de l’infaillibilité pontificale, comme nous l’avons montré précédemment, que la promesse faite à Pierre est en réalité pour le profit de l'Église universelle, rien ne paraît s’opposer à ce que le même sens soit attribué à la phrase de Netter.
2. Saint Antonin de Florence († 1459) insiste particulièrement sur ce que l’infaillibilité doctrinale appartient au pape, non comme personne privée, car, sous ce rapport le pape est capable de pécheret d’errer, mais au pape nlens cancilio et rcquircns udjuloriam universalis Ecdesiæ. Siimma theologica, part. III, tit. XXII, c. iii, Vérone, 1740, t. iii, col. 1188. Expressions qui, au siècle suivant, donnèrent lieu à une controverse, mais qui ne paraissent point avoir été comprises par l’archevêque de Florence, dans le sens d’une condition absolument nécessaire pour l’exercice de l’infaillibilité pontificale dans un cas particulier.
Saint Antonin appuie l’infaillibilité pontificale sur l’institution divine, d’après la promesse formelle de Jésus à Pierre : Ego rogavi pro le ut non deficiat fides tua. Loc. cil. Aucun détail n’est donné sur la manière dont doit s’exercer le magistère pontifical, mais la manière très nette dont saint Antonin affirme le caractère souverain et plénier de la primauté pontificale, écarte, dans sa pensée, toute subordination ou dépendance du pape vis-à-vis d’un concile ou de quelque autre autorité, part. IIl, tit. xxiii, c. iii, col. 1273-1275. Quant à cette remarque, que, dans un concile général, ceux qui sont inférieurs au pape paraissent plutôt des conseillers, polius videntur consultores, col. 1279, elle doit, à cause du correctif employé, n'être point prise trop littéralement.
3. Le cardinal Jean de Torquémada († 1468) prouve, par plusieurs témoignages de la tradition et par l'Écriture, cette assertion : Quodsedis aposlolicæ judicium in his quac fidei sunt et ad Immanain salutem necessaria errare non possil. Sunima de Ecclesia, t. II, c. cix, Rome, 1489, sans pagination. La principale preuve scripturaire est le texte Ego rogavi pro le, Luc, xxii, 32, dont l’interprétation en faveur de l’infaillibilité pontificale est appuyée sur de nombreuses autorités, particulièrement sur l’enseignement des papes saint Léon le (jrand, saint Agalhon et saint Léon IX, et sur le témoignage de saint Bernard, que nous avons cités précédemment. Ue toutes ces preuves, Torquémada conclut que l’opinion adverse est téméraire et opposée à la doctrine de Jésus-Christ et des Pères, et que l’on commet une erreur très pernicieuse en rendant suspectes de fausseté les définitions du saint-siège, les déclarations de la foi, les condamnations des hérétiques et les canonisations des saints. La réponse aux diverses objections, t. II, c. cxui. fournit ensuite à TorquéJiiada l’occasion de préciser la doctrine de l’infaillibilité
pontificale. Le pape, comme homme privé, peut errer dans la foi, tenendo malam opinionem circa ea quee fidei sunt. Mais il ne peut errer sententiando in judicio de his quæ sunt fidei. Cette infaillibilité provient de la promesse divine et de l’assistance du Saint-Esprit. Elle s'étend à tout ce qui touche à la foi in hujusrnodi arduis malcriis quee fidem langunt. Il est affirmé que le pape, avant de donner une décision en ces matières, prend toujours conseil cum dominis cardinalibus et aliis doctis palribus, mais rien n’autorise à admettre que, dans la pensée de l’auteur, cette consultation est nécessaire pour l’exercice de l’infaillibilité pontificale.
Quant à cette objection que le pape, pouvant tomber dans l’hérésie, peut aussi porter une définition en faveur de l’hérésie à laquelle il aurait ainsi adhéré, Torquémada donne simplement cette réponse qu’il juge la meilleure. Si le pape devient hérétique, il cesse, par le fait même, d'être pape ; sa définition hérétique, s’il en portait une, n'étant plus une définition du siège apostolique n’aurait plus le privilège de l’infaillibilité. Il est manifeste que l’hypothèse ainsi envisagée est uniquement celle d’un pape tombant dans l’hérésie comme personne privée, et essayant vainement de porter une définition avec une autorité qu’il n’a plus.
4. Biel († 1495), appliquant au pape les paroles de Jésus à Pierre, Luc, xxii, 32, affirme que le successeur de Pierre doit confirmer ses frères per prædicationew. videlicet et doclrinam verse fidei et evangelii. Sacri canonis missee lucidissima expositio, lect. xxxiii, Brescia, 1576, p. 146. Parlant du décret de Sixte IV concernant l’immaculée conception de Marie, il déclare que toutes les questions de foi devant être référées au siège apostolique et tous les fidèles étant tenus de se soumettre à sa détermination, il est téméraire d’affirmer ou de penser contrairement à ce décret pontifical. InISenl., . III, dist. III, q. i, Brescia, 1574, p. 49. D’ailleurs, à plusieurs reprises, parlant des définitions de foi, il emploie comme synonymes les expressions delerminalio Ecdesiæ autsumrni pontificis. In IV Sent., t. IV, dist. XIII, q. II ; t. III, dist. III, q. i, p. 223, 49. Ce qui suppose chez le pape, en matière doctrinale, la plénitude de l’autorité donnée par Notre-Seigneur à son Église.
3° En même temps, plusieurs documents ecclésiastiques de cette époque, en écartant les erreurs opposées à l’infaillibilité pontificale, devaient servir au progrès de ce dogme. Ainsi la constitution de Martin V du 10 mars 1418 et la bulle Exsecrabilis de Pie II du 18 janvier 1459, en condamnant la proposition d’après laquelle il est permis d’en appeler de la décision du pape à celle d’un concile mettaient en évidence la souveraine indépendance du magistère du pape vis-àvis de toute autre autorité, quelle qu’elle fût. Voir Constance (C’onc/7erfc), t. iii, col. 1222, et DenzingerBaniTwart, n. 717.
Le même enseignement résultait aussi de la définition du concile de Florence affirmant que le pontife romain possède dans l'Église la plénitude de toute autorité. Donc aussi la plénitude de l’autorité doctrinale, et l’infaillibilité doctrinale que celle-ci comporte.
L’infaiUibilité pontificale résultait aussi avec évidence de la condamnation portée par Sixte IV, le 9 août 1479, contre cette proposition de Pierre d’Osina : Ecclesia urbis Romæ errare potest. Denzingcr-Bannwarl, n. 730.
4° Comme conclusion de cette période, on doit, à côté des quelques erreurs signalées, noter, du moins chez les théologiens ultramontains, un progrès très manifeste portant surtout sur l’exposition doctrinale et sur la démonstration théologique de l’infailhbilité pontificale. Dans l’exposition doctrinale le concept de l’indépendance du pape, vis-à-vis du concile ou de n’im-